Au-delà de l'inquiétude que la situation en Belgique peut me causer pour les personnes que j'y connais et simplement pour l'avenir de l'ensemble des Belges (au-delà des clivages communautaristes), je m'interroge sur les répercussions et les conséquences qu'une scission aurait sur l'Union Européenne. Si pour des raisons historiques évidentes, l'Allemagne et la France en sont (ou passent ou s'en veulent, selon) les phares, la Belgique a été un des piliers de cette construction européenne dès le début et c'est à Bruxelles que se trouvent le Conseil et la Commission européenne. Qu'adviendrait-il de ces institutions en cas de scission ? Y a-t-il une réflexion sur la question en Belgique, dans l'une et/ou l'autre des communautés ?
Les questions que tu poses sont plutôt pertinentes. Et sont les principales raisons (avec, aussi, la gestion de la dette publique et les pensions) pour lesquelles la scission n'aura jamais lieu.
Par aillaurs, quel serait l'avenir régional, national, européen et international des communautés si le pays explose ?
Difficile de répondre avant de voir les effets... Mais il faut bien constater que le produit "Belgique" s'exporte plutôt bien (et pas seulement le chocolat ou la bière, comme l'a maintenu Leterme il y a qq mois). Alors, dans un monde où l'internationalisation prend de plus en plus de place, il me semble très difficile de vendre le produit "Flandres" ou "Wallonie". C'est, disons, une abérration stratégique
Est-il (encore) possible d'enrayer le processus et comment ?
Bien sûr. Le gros problème, comme indiqué dans ces derniers jours dans une certaine presse, c'est que la génération actuelle d'hommes politiques:
- ne se connaissent pas d'un côté et de l'autre de la frontière linguistique. Ca n'aide pas les négociations
- n'a absolument aucune expérience du fédéral. A part les négociateurs Open VLD (libéraux flamands) et MR (libéraux francophones), les autres ne se sont jamais mis autour d'une table de négociation fédérale ou n'ont jamais participé aux affaires fédérales. De Wever (NVA) peut aboyer autant qu'il veut, il n'est jamais sorti de sa Flandre natale. Idem pour Vandeurzen & Leterme (CD&V). Mais aussi côté francophone: Milquet et Watelet Junior (CDH).
Ce manque d'expérience et de connaissance ne joue absolument pas en faveur d'une solution au problème.
A quoi cela est dû? Un manque d'intérêt pour l'autre communauté? Sans doute. Cela se retrouve aussi chez le citoyen lambda. D'ailleurs, à ce niveau-là, il faut épingler la presse (perso, j'aime taper sur la presse - il faut bien avouer qu'ils sont rarement blanc comme neige). Combien de fois a-t-on fait une interview d'un homme politique appartenant à l'autre communauté linguistique? Et ce, même pour des questions qui les concernent directement. Par exemple, côté francophone, il était fréquent qu'en cas de question sur le budget fédérale (au main d'une ministre néerlandophone), la presse francophone interroge un ministre francophone (Reynders ou Onkelinx), pas nécessairement spécialiste du sujet.
Alors, comment sortir de l'impasse? Difficile à dire. Mais il me semble que l'approche actuelle préconisée par Bébert II est correcte: prendre conseil auprès de gens d'expérience ayant connus les discussions communautaires des années 70 & 80.
Le roi Albert II peut-il et a-t-il l'envergure de passer outre la Constitution et d'imposer le maintien de l'unité du pays ainsi qu'une série de réformes qui amènerait une nouvelle donne ?
D'un point de vue constitutionnel, le Roi est un eunuque. Comme on dit: "Le Roi règne mais ne gouverne pas".
Le Roi, il est vrai, nomme les ministres. Mais c'est tjrs sur proposition du formateur (nous sommes à une époque où c'est le peuple - donc, ces représentants élus - qui choisit et non plus un souverain tout puissant). Le Roi a aussi pour mission de signer les lois. A qq exceptions près (cfr la loi sur l'avortement, fin des 80's, début des 90's), le Roi est obligé de soumettre à la signature.
Donc, grosso modo, le Roi n'a aucun pouvoir, du moins au sens strict. Tout au plus peut-il arriver à suggérer certaines choses.
Dans le cas qui nous occupe, ce sont tjrs les politiques qui ont la main. Et la meilleure chose qu'ils peuvent faire, c'est redevenir raisonnable, et ce des deux côtés de la frontières linguistiques. Le fédéralisme d'union (comme on l'appelait dans les 80's) est encore fort jeune en Belgique et, il est vrai, encore imparfait. Certaines réformes sont nécessaires afin de mieux faire fonctionner la mécanique.
Et, à l'avenir, pour éviter les situations comme celle que nous sommes en train de vivre, il faut préconiser un meilleur dialogue entre les communautés. Et là, je rejoins la propositions du groupe Pavia (
http://www.paviagroup.be) qui propose la création d'une circonscription fédérale. De quoi s'agit-il? C'est très simple: 15 des 150 sièges de la Chambre sont attribués selon la formule habituelle de scrutin proportionnel (le système D’Hondt) dans une circonscription correspondant à l’ensemble du territoire de l’Etat fédéral. Les 135 autres sièges continuent à être attribués selon la formule actuelle dans les 11 circonscriptions que nous appellerons, pour faire bref, « provinciales ». Chaque électeur dispose de deux voix. L’une doit se porter sur une liste ou des candidats se présentant dans sa circonscription « provinciale ». L’autre doit se porter sur une liste ou des candidats se présentant dans la circonscription fédérale. Les listes de la circonscription fédérale sont donc les mêmes dans l’ensemble du pays.
Ceci permettrait, à mon sens, de redonner une logique fédérale (et donc d'union) à certains de nos "chers" élus
la situation actuelle ne peut être maintenue à l'infini mais une séparation est-elle la meilleure solution ?
Non. Et je ne suis pas plus belgicain qu'un autre... Mais, il me semble, la séparation n'a aucun sens. Si aujourd'hui la Flandre propère d'un point de vue économique, ça ne durera pas éternellement. Et attention au retour de flammes. Notamment qd il faudra payer les pensions (il y a bien trop de vieux en Flandres et qd viendra l'heure de casquer pour eux, la pression sur les jeunes sera énorme, ce qui risque de mener à un clash, comme on dit chez nous
). Tout ça pour dire que la séparation est une solution à court terme (le court terme étant un concept prépondérant dans notre société "moderne", malheureusement).