Hep ! Xavier Guilbert, je suis dans les "positifs"
(
j'ai écrit l'une des premières critiques, ici, le matin-même de la sortie )
J'ai donc déjà donné mon avis (enthousiaste bien que ados trop mous + bateaux très présents), mais je pense comprendre les avis de lourdeurs, et de gags semblant "rajoutés", qui agacent certains.
Et je suis un peu d'accord, même si je trouve l'ensemble franchement réussi.
Voici pourquoi :
- Je suis persuadé que Goscinny commençait ses scénarios par un gros brainstorming, listant toutes les idées, scènes et gags qui lui venaient à l'esprit sur le thème à traiter.
Ce qui était d'autant plus prégnant dans les histoires villageoises, car il ne pouvait pas s'appuyer sur les clichés nationaux du pays visité.
Ces thèmes, c'était "la peur", "les charlatans", "la politique", "la guerre psychologique", "l'esclavage", "l'argent et l'économie", "l'argent et le marketing", etc...
- Dans un deuxième temps, il triait ces idées et se demandait comment il pourrait les caser dans une histoire structurée : par quel biais, dans quel ordre, leur association avec la personnalité de nos héros, etc...
- Il en déduisait un développement, un "moteur" aventureux ou sociologique :
"voler grâce à la peur + le courage", "le manipuleur manipulé", "le pouvoir et les élections", "les fake-news et leurs conséquences", "de la difficulté de devenir esclave", "entreprendre et gagner de l'argent", "réussir à vendre l'inutile + la réussite sociale", etc...
- Il aboutissait ainsi à un plan général, qu'il découpait ensuite en planches, puis en cases.
Et c'est tout ce cheminement qui faisait "la patte" de Goscinny : les aventures imaginées n'étaient qu'un prétexte pour réussir à caser toutes ses idées et ses gags (tout en en ajoutant d'autres en cours d'écriture), découlant, pour beaucoup, du contraste entre l'Antiquité et notre époque.
Et c'est ce qui manque chez Ferri.
Prenons l'exemple de cet album :
- Goscinny aurait listé tout ce qui fait l'adolescence : ses clichés, ses doutes, ses gags, ses contradictions, son moteur, etc (un peu comme il l'avait fait avec Goudurix qui ne représentait pas vraiment "l'adolescence", dans un sens familial, mais plutôt "la jeunesse et sa culture", dans un sens plus sociologique. Notez bien que ce n'était là qu'un thème
secondaire, vaguement esquissé, le premier étant "la peur").
Il aurait ensuite imaginé une Adrénaline beaucoup plus dynamique, à l'image de Pépé Soupalognon Y Crouton. avec, par exemple, quelques caractéristiques typique : anti-autorités mais anti-responsabilités, négociations permanentes, humeurs changeantes, rêves idéalistes... et on aurait eu (par exemple) un final totalement renversé, les adultes du village s'avérant plus ados que les ados (face à César ?). Bref, le véritable thème aurait été "les ados", et le développement aurait été : "on ne s'oppose que parce qu'il y a une opposition" (ou autres... ce n'est qu'une supposition)
- Ferri a préféré partir d'une idée plus "romantique" (et un peu "people"), partant du principe qu'il est très dur d'être une "fille de", qui plus est, en cette période capitale et traumatisante qu'est l'adolescence ! Comment le vivre, sans sacrifier à l'amour familial, et comment s'en échapper ? Donc, en gros : comment se révéler et grandir pour construire sa propre personnalité ? (un synopsis parfait pour un téléfilm
).
Sauf que tout ceci a été noyé par l'aventure elle-même, par les poursuites et les bagarres. Ramenant Adrénaline (et les ados en général) à un thème secondaire. Un thème qui n'a pas été "traité", mais "évoqué" au détour d'un récit trop dynamique, où l'aventure et l'action priment, à l'image d'un Tintin filmé par Steven Spielberg (Tintin-enquêteur devenant un Indiana Jones sautillant).
C'est à mon avis ce qui fait la "lourdeur" ressentie dans cet album, par certains.
Et mon regret à chacun des scénarios de Ferri.
...ce qui ne m'empêche pas d'avoir apprécié cet album
, comme un très bon "Astérix-aventureux" ! (mais pas comme un Astérix-sociologique)
PS : "Finis de faire les saules d'abord !" = "finis de faire les soldes, d'abord !"
non ? (celles qui puent et qu'on met dans un bac "offres spéciales")