monsieur burp a écrit: Pour moi je suis rentré à fond dans l'histoire. Un résumé en longueur sur la première guerre mondiale. Un bel et beau album à découvrir...
Pareil. Je me suis tellement régalé à sa lecture et à l'écoute du CD joint que j'ai ressorti mes six exemplaires des faux "journaux de guerre" de 2008 pour relire dans ce grand format magique
Putain de Guerre !. Dans la foulée, je me suis retapé également
C'était la guerre des tranchées.
Une très large partie de l'oeuvre de Jacques Tardi forme une fresque monumentale dédiée à ces destins brisés à jamais, à tous ces jeunes venus des quatre coins du monde se faire faucher, gazer, hacher menu pour une cause qui les dépassait très largement, à ces familles cruellement amputées d'un ou plusieurs membres, sans parler des handicapés et des survivants physiquement normaux mais mentalement détraqués. Mais Tardi ne nous assomme jamais avec des discours larmoyants ou moralisateurs. Il préfère l'ironie et l'humour qu'il manie avec aisance et c'est ce qui permet d'aller de l'avant.
L'ensemble ainsi formé dépasse largement les trois albums précités (ce sont les plus récents et donc les mieux dessinés sur la guerre de 14-18) qui forment le socle principal. Mais il convient d'y inclure tout ce que Tardi a produit et qui se rapporte de près ou de loin à ce thème, et alors la somme devient assez considérable. On doit donc ajouter certains passages d'Adèle Blanc Sec, l'album
Varlot soldat (L'association) — épisode se rattachant à
Le Der des ders (sc. Daeninckx) —,
Le trou d'obus édité par les imageries Pellerin et épuisé depuis longtemps, et les deux plus anciens récits en lien avec la guerre de 14 que sont
La fleur au fusil (un épisode de Brindavoine en 10 planches paru dans le journal Pilote en 1974 et
La Véritable Histoire du soldat inconnu (Futuropolis 1974).
Pour être exhaustif, il faudrait rattacher à cet ensemble diverses choses éparses (para BD) ainsi que l'album illustré
Casse-pipe et les premiers chapitres de
Voyage au bout de la nuit où Tardi met en images Louis Ferdinand Céline.
Tardi est non seulement un véritable cador en dessin —imité depuis longtemps mais jamais égalé— mais aussi sur le plan littéraire. L'écriture est élaborée, travaillée, paufinée. Avec
C'était la guerre des tranchées,
Putain de Guerre ! et
Le dernier assaut, on a l'impression de lire un prolongement de
Casse-pipe ou des épisodes militaires du
Voyage, qui sont des romans et non des BD. Tardi a su introduire dans ses textes (récitatifs ou dialogues) le ton et certaines tournures de phrases de Céline, ce qui donne ce côté décalé savoureux, bourré d'humour noir mais jamais larmoyant alors qu'il met en scène l'indicible horreur. Par moments, on est tenté d'établir des rapprochements avec ces perles littéraires que sont le roman
Ras le casque ! et les recueils de nouvelles noires (dont certains épisodes ont pour cadre la Grande guerre) et intitulés
L'unijambiste de la côte 284 et
Reflets changeants sur mare de sang de Pierre Siniac. Profitons-en pour signaler que Siniac (hélas adapté une seule fois par Tardi) entretenait une correspondance épistolaire nourrie avec J.P. Manchette (qui a collaboré de son vivant avec Tardi pour un scénario original —
Griffu — puis fut adapté à plusieurs reprises) et qu'il avait pondu un délectable roman intitulé
Louis FerdinAUd Céline ?
Le seul bémol concernant
Le dernier assaut se rapporte à la couverture. Pourquoi ce choix de simplement agrandir une case ? C'est un peu dommage.