Oui enfin j’ai 30 ans, donc je ne me sens pas comme un public « vieux et captif », et pourtant j’attends de Spirou quelque chose d’autres. J’ai décroché il y a un moment déjà de la série-mère, à l’adolescence avec les M&M puis les Y&V, lui préférant les spin off.
Je ne me sens donc pas du tout comme faisant « partie de ce jeune public qui adhère au nouveau Spirou », et vu les clients de Spirou chez mon libraire habituel tout comme la réaction de mes élèves quand je leur présente Spirou (cf plus bas), à savoir « personnage inconnu », je ne suis pas certain de la réalité de ces dires mais bon, je ne suis pas aussi bien placé que M. Beaujean, donc admettons (ma réalité n’est pas « la » réalité, nous sommes bien d’accord).
Bien sûr que Franquin, Fournier et T&J proposaient des récits avec un double niveau de lecture, comme tous les classiques de la BDFB.
Enseignant d’Histoire-Géographie, j’utilise Spirou à travers le programme de terminale, en proposant une étude par chapitre (Dictateur et Champignon sur les Totalitarismes, le Spirou de Bravo pour la Seconde Guerre Mondiale et Kodo le Tyran/Des Haricots partout pour la Guerre froide).
Donc je pense être à même de traiter de cet aspect double des grands classiques, notamment de Spirou…
Mais le côté aventure doit être le principal, le dépaysement doit passer avant la leçon scientifique ou géopolitique.
Quand je lis le Dictateur et le Champignon ou que je fais travailler mes élèves dessus, ce qui ressort avant tout c’est l’humour, le côté risible de ce Zantas, l’aspect ridicule des palombiens qui le suivent, le caractère totalement burlesque des directives de Zantafio… et l’enjeu conséquent, pour Spirou et Fantasio, de sortir de prison, quitte à manipuler Zantas en faisant mine d’accepter son pouvoir et de devenir général.
Idem pour Kodo/Des haricots, où la réflexion géopolitique ne vient qu’après les enjeux : Fantasio va-t-il parvenir à s’en sortir vivant, tout en obtenant des photographies compromettantes ? Spirou va-t-il convaincre les rebelles de suivre le plan proposé ?
J’ai trouvé que ce Spirou ne mettait pas assez en avant le coté aventure, qui est la base sur laquelle on peut ensuite construire un récit plus engagé et réfléchi. Avec le temps, Machine qui Rêve ou les M&M paraissent mieux perçus qu’à leur sortie, y compris de mon point de vue. Mais cela ne fait pas d’eux les égaux des grandes aventures de la série.
Donc même si le futur donnera peut-être une meilleure perception de ce diptyque, il n’empêche que le manque d’aventure et de rythme ne lui permettra pas, je pense, de sortir du lot.
Truc tout simple : l’enjeu écologique avec les limules, évoqué au début comme une base de réflexion pour un reportage de Seccotine… puis totalement inusité par la suite. Ce qui au final
donne des scènes en pagaille avec les limules sans aucun intérêt : à quoi servent-elles ?
"Mais la plus belle des victoires, mon fils, est de faire battre le coeur de ton peuple.
Je te confie cela, car lorsque ma vie s'achèvera,
Toi, tu seras roi. »
Terenas Menethill II