Rusty Brown - Chris Ware

[edgarmint]

Message précédent :
Oui, la question de la vue se pose là avec acuité... le hasard fait que je viens de changer de verres, heureux hasard. j'en ai lu les 2/3 ce WE, c'est un formidable bouquin. Cette manière qu'a Chris Ware de donner à percevoir ce que ressentent les protagonistes, cette manière qu'il a de faire se croiser les destins dans ce qui est tout de même un sacré pavé et, surtout, cette manière qu'il a d'évoquer les choses simples est très forte.

[Le Tapir]

Oui, la question de la vue se pose là avec acuité... le hasard fait que je viens de changer de verres,

On s'est passé le mot ou quoi? C'est dommage que ben27 avait de la friture sur la ligne à ce moment là sinon il serait allé chez Afflelou lui aussi!

[Gaston68]

Si je vous suis bien, vous venez de me saloper mes vacances...comme j'ai pas du tout le temps d'aller chez l'opticien, je vais pas pouvoir changer de lunette, et donc pas pouvoir lire l'album...je ne vous remercie pas pour cette Information tardive

[edgarmint]

C'est une lecture pour les jeunes

[Le Tapir]

Quand Jimmy Corrigan est sorti, le problème ne se posait pas en ces termes !!!

[le ppj]

A propos de la partie "Jason Lint", j'ai trouvé que Ware reconstitue magnifiquement le développement du cerveau humain ainsi que le travail de la mémoire et de ses faiblesses.

[Révéler] Spoiler:

Par exemple, le dessin est extrêment schématique à la naissance de Jason/Jordan pour se préciser peu à peu.
Mais on peut aussi constater la différence de traitement de dessin entre la maison familiale avec l'épisode de la fourmie et des pivoines lorsqu'il a 3/4 ans et son design après le décès de sa belle mère lorsque sa nouvelle compagne le pousse à y déménager alors qu'il a la cinquantaine. Lorsqu'il est enfant, le dessin de la maison aurait "presque" pu être dessiné par Jason à cet âge là, fenêtres et fenêtres sommaires... Alors que lorsque l'on revoit la maison quand Jason a 50 ans, on peut distinguer une maison de style néo victorien (?) avec fenêtres spécifiques, des colombages bien visibles... Son cerveau a évolué, il a appris au cours de son existence et il "voit" mieux les choses qui l'entourent.

De même j'ai noté un autre point qui m'a interpelé sur la faillibilité de la mémoire.
Pour reprendre l'épisode fourmie/pivoine des 3/4 ans : Jason est avec sa mère qui jardine et porte un fichu bleu quand Jason écrase une fourmie. A l'anniversaire de ses 11 ans, il se remémore ce souvenir et sa mère a changé par rapport à l'image d'il y a quelques pages, elle porte un fichu rouge. Enfin après le décès de son ami Bretislav Hornslach dans l'accident de voiture, sa belle mère lui parle de ce moment passé ensemble au jardin où il était si triste d'avoir tué une fourmie. C'était donc sa belle mère et non sa mère qui était avec lui à ce moment là. On voit d'ailleurs les "fantômes" de la mère (fichu rouge) et de Jason 4 ans apparaitre dans le salon à côté de la belle mère qui parle. Ce souvenir a donc eu lieu après le décès de sa mère mais dans le livre Ware nous le présente dans la chronologie créée par le cerveau de Jason.

Je conseille le livre à tous, quitte à changer de lunettes ou de s'acheter un loupe

[BDbilos]

Le cerveau enfant qui a son écho à la fin avec de nouveau un rendu graphique qui renvoi au début.
Et le vocabulaire suit le même processus (exemple le texte dit par le prêtre que l'enfant comprend "à sa manière"...)

[Révéler] Spoiler:

Oui le coup du fichu est vraiment génial. Comme les fugaces images que l'inconscient fait apparaitre et que Lint enfouit immédiatement.
Autres trucs qui m'on scotchés :
Le renvoi de la position des fleurs du buisson par rapport au décors des gâteaux d'anniversaire, qui du coup convoquent le souvenir de la mère par association d'idées.
Et le geste pour endormir la petite fille qu'on retrouve sur la couverture avec le fantôme de sa mère
On convoque aussi cette idée de la mémoire défaillante ou sélective dans la partie Cole avec notamment la rencontre entre Joanna et une ancienne élève au supermarché.

On peut citer tant d'exemples, on peut le décortiquer à l'infini

[danielsansespace]

Et il y a en anglais dans le Lint original cette dernière planche qui se termine par i am, avec le corps vu de haut qui se transforme en "i", puis les am .... am répétés qui sont les derniers mots. Et quand tu fermes le livre sur le 4eme de couv tu devines un filigrane sur la couverture en tissu. Et c'est écrit par transparence avec les derniers mots "ma... ma..."
Malheureusement absent du nouveau recueil mais ça m'avait scotché...

[BDbilos]

Intraduisible... Am/ma

[le ppj]

Et il y a en anglais dans le Lint original cette dernière planche qui se termine par i am, avec le corps vu de haut qui se transforme en "i", puis les am .... am répétés qui sont les derniers mots. Et quand tu fermes le livre sur le 4eme de couv tu devines un filigrane sur la couverture en tissu. Et c'est écrit par transparence avec les derniers mots "ma... ma..."
Malheureusement absent du nouveau recueil mais ça m'avait scotché...

Je ne l'avais pas vu et c'est bien impressionnant !
Je viens de vérifier sur mon exemplaire du Lint original et je dois également avoir besoin de lunettes car j'ai du me rapprocher pour lire correctement le 4eme de couv et je lis plutôt "mo mo" que "ma ma".
Le "am" se transforme en "mo", s'étouffe t il ou essaye-t-il d'appeler sa mère ? Je n'ai pas la réponse

[Charlus]

Je connais pas du tout Chris Ware. C'est bien ce Rusty Brown pour commencer ?

[Le Tapir]

C'est une bonne question mine de rien, et il n'est pas si aisé d'y répondre.
Personnellement, je dirais qu'il vaut mieux lire Jimmy Corrigan avant, mais c'est hautement subjectif, avec une petite maniaquerie personnelle pour le sens de la chronologie...

[Charlus]

Merci

Une édition à conseillée ?
J'avoue ne pas avoir bien compris ce qui est disponible, quelle est l'étendue de l'univers (en ce limitant aux éditions françaises)

[le ppj]

Tu peux commencer par Jimmy Corrigan ou Building Stories ou Rusty Brown. Je ne pense pas qu'il y ait un ordre particulier pour aborder sa bibliographie. Mais ces trois là sont le "coeur" de son travail.
En complément si tu as aimé, tu peux lire Quimby the mouse et ACME qui sont plus fragmentaires.

Et si tu deviens fan hardcore, en VO, il y a ses ACME novelty date book, sa monographie et tu peux chercher tous ses comics avant qu'ils ne soient rassemblés dans les ouvrages traduits en français.
Bref, il y a de la lecture

[EYE OF DOOM]

Il y a tout de meme deux options:
D’un côté des receuils petits format avec des recits sur la durée : Jimmy Corrigan et Rusty Brown
De l’autre des « beaux livres » ou l’exubérance maniaque de Ware s’exprime le mieux, avec des recits sur 1 planches (voire 2 ou 3) et/ou des jeux naratifs complexes: Acme library et Building Stories.
Personnelement je prefere cette deuxieme categorie. Trouvant Ware limité dans le petit format

Il faut savoir que dans les deux cas, c’est franchement deprimant voire sinistre.

[BDbilos]

Il faut savoir que dans les deux cas, c’est franchement deprimant voire sinistre.

Là se situe une frontière étrange. Ware est souvent drôle au second ou troisième degré... Comment dire...
Je suis d'accord pour dire que Building Stories et Rusty Brown ne sont pas bien gais.
Mais déjà Jimmy Corrigan est plus délicat à juger, car il y a des aspects très amusant dans ce personnage et dans ses petites misère ridicules. Bon d'accord c'est un humour spécial auquel on n'est pas forcément sensible, mais par moment j'ai bien rigolé.
Quand à Acme c'est pour moi très drôle. Les parodies de publicités, les personnages totalement hors réalité, les délires sur Dieu, etc...
Par contre j'ai eu du mal à entrer dans Quimby, plus conceptuel, difficile à lire parfois, même si là encore certaines pages sont très drôles (à mon goût !)

Bref mon conseil pour un bon panorama de l'art de Ware :

[Le Tapir]

Il faut savoir que dans les deux cas, c’est franchement deprimant voire sinistre.

Là se situe une frontière étrange. Ware est souvent drôle au second ou troisième degré...

Complètement d'accord, et cet humour sous forme de ce que l'on pourrait qualifier "d'auto dérision" (même si c'est plus riche que ça comme humour) est une partie importante du propos de Ware amha...

[EYE OF DOOM]

Les pages de Rusty Brown dans Acme, désolé mais c’est sinistre.
Mais Acme est sinon un livre super.
En fait je trouve Ware plus fort dans ces dessins que dans ces bd proprement parler, par exemple dans cette couverture :

Où tout est dit.

Ou ici :

[Gaston68]

C’est vraiment super. Je suis sûr que si le format des albums était plus grand, il gagnerait beaucoup de lecteurs. La taille de certaines cases et donc du texte est rédhibitoire pour beaucoup de personnes...vraiment dommage...
Si une édition luxe -un peu comme certains mangas- sortait un jour, avec une taille plus grande, je ne serai pas contre.

[danielsansespace]

En grand et lisible ici : https://i2.wp.com/varadero.wordpress.co ... s-ware.jpg

Moi j’ai commencé par cette planche, vue en original dans l’expo Quintet au musée d’art contemporain de Lyon. Ça m’a bouleversé et c’est comme ça que je suis revenu à la lecture de Jimmy Corrigan dans lequel j’avais du mal à me plonger.

[Le Tapir]

Les pages de Rusty Brown dans Acme, désolé mais c’est sinistre.
Mais Acme est sinon un livre super.
En fait je trouve Ware plus fort dans ces dessins que dans ces bd proprement parler, par exemple dans cette couverture :

Où tout est dit.

Ou ici :

Merci pour ces extraits. C'est vraiment "vachement bien"...