thyuig a écrit:Thierry_2 a écrit:oui, elle est où, cette chronique
j'a cherché sur le sujet, mais pas envie de me fader les dizaines de pages du sujet, et la recherche avancée ne m'a pas avancé beaucoup
perso, je n'ai pas été mal à l'aise, même si la fin est très rude. Tout ce que je supposais au début se touve bien dans ce roman, avec une belle férocité, entre autres lors des passages du tournage du "Sanctuaire" qui démontre la puissance du soft power. Pour le reste, la batardise du narrateur lui permet de dénoncer avec une même acuité les travers des 2 camps, quitte à passer un peu vite sur sa propre hypocrisie. Pour moi, c'est une très bonne lecture.
Je pensais l'avoir postée ici ?
En me relisant je remarque qu'elle est un peu obscure mais compréhensible, je l'avais publiée sur babelio.SYMPATHISANT : n. m. : personne qui approuve les idées et les actions d'un parti sans y adhérer.
Le narrateur est une taupe, un animal clandestin embarqué dans un camp qui n'est pas le sien. Pourquoi une taupe ? Il faudrait rechercher l'étymologie spécifique de celui qui se fait passé pour ce qu'il n'est pas pour pouvoir vivre sereinement auprès du camp qu'il combat. C'est là toute l'ambiguïté du roman. Viet Thanh Nguyen a inventé un narrateur omniscient - puisque informé par les deux camps - tout à fait conscient de son impuissance - puisque obligé à agir dans l'ombre et rarement directement.
"Je suis un espion, une taupe, un agent secret, un homme au visage double. Sans surprise, peut-être, je suis aussi un homme à l'esprit double. Bien que certains m'aient traité de la sorte, je n'ai rien d'un mutant incompris, sortie d'une bande dessinée ou d'un film d'horreur. Simplement, je suis capable de voir n'importe quel problème des deux côtés".
Ainsi s'ouvre le Sympathisant, par des mots dont la limpidité cachent autant qu'ils ne livrent. Le narrateur dont nous ne connaîtront jamais l'identité est un bâtard, le fruit de l'amour irrespectueux d'une Vietnamienne et d'un curé français. Il espion du Nord auprès des américanophiles du Sud, capitaine de la police secrète. L'idée de Viet Thanh Nguyen est intéressante, jouer sur le double langage, la double culture, la bâtardise qui guette chacun de nous, cette peur de tout perdre des deux côtés que l'on se penche. Il cherche à être le plus précis tout en oubliant le flou de façon tout à fait consciente. Viet Thanh Nguyen a les idées claires, ne dit-il pas : " en tant que non-Blanc, il savait, comme moi, qu'il fallait être patient avec les Blancs, lesquels étaient facilement effrayés par les non-Blancs. Même avec les Blancs progressistes, on pouvait aller trop loin ; avec les Blancs moyens, on ne pouvait aller à peu près nulle part."
Difficile de se remettre d'une telle sentence. Comment prendre ce roman ? Il y a de multiples manières. En tant que Blanc, non-Blanc, Occidental, Oriental ? le narrateur est un bâtard mais si les deux camps marquent le même irrespect à son égard, il se revendique comme non-Blanc. Implicitement, alors mêmes les bâtards sont dans la bonnes catégories, non ?
La bonne idée de Viet Thanh Nguyen est alors une idée follement dangereuse. Sous couvert d'une prose aussi limpide qu'elle tend à éviter toute nuance, le roman cherche alors à racheter aux yeux occidentaux un mal qu'ils auraient TOUS commis envers le Vietnam. Eh oui, ici aussi le bien et le mal s'affrontent puisque nous l'avons compris, seule la double culture du narrateur lui confère l'omniscience. Pour tous les autre c'est l'enfer : une seule vision pour eux, un seul paradis, un seul bonheur. le Sympathisant, c'est notre mea culpa, le roman que l'on autorise et qui nous ridiculise - il n'y a pas d'autre mot - en bloc.
Au delà de cette critique, quel bonheur de lecture ! La prose est tout à fait réjouissante, pleine de métaphores, emplie de liberté de ton et d'un humour percutant. Les pages consacrés à Apocalypse Now, si elles confèrent là aussi au ridicule en finissant par honorer l'oeuvre, sont vraiment réussies. Elles marquent un tournant notable dans le roman en instillant un peu de drame, ce dernier étrangement absent depuis la scène inaugurale de toute beauté : la chute de Saïgon.
Même si je ne partage pas l'ambition de l'auteur et si je me trompe quant à sa vision des choses, le Sympathisant est un moment rare de lecture. Pour moi il est sujet à débat, on ne peut pas tout en aimer. Cette façon un peu facile de limiter les protagonistes et de les faire se rencontrer aux moments opportuns est un réflexe un peu simpliste, cinématographique. C'est d'ailleurs la belle ironie du roman. Il étrille Apocalypse Now et sa vision on ne peut plus caricaturale du peuple vietnamien et propose en contre-pied une intrigue dans laquelle Hollywood s'engouffrerait sans en changer un seul signe. La pierre de rosette permettait une traduction en trois langues, le Sympathisant offre une solide seconde version du mythe vietnamien, le roman rassembleur n'a pas encore été écrit.
(merci à Belfond et Balelio pour l'envoi)
Thierry_2 a écrit:
Le géant enfoui se présente comme un conte post-arthurien.
Dans une Angleterre pacifiée par le Roi Arthur, Saxon et Bretons vivent dans une paix fragile. Axl et Béatrice vivent misérablement dans une village troglodyte, maltraités par leur concitoyens. Ils décident alors de partir rendre visite à leur fils, qui vit dans une village distant de quelques jours de marche. Ce voyage, ils en parlent depuis longtemps, mais ils l'ont reporté tant de fois, sans vraiment se rappeler pourquoi. Axl est conscient que les souvenirs tendent à s'étioler, sans doute dans cette brume surnaturelle qui envahit parfois la vallée. Quelle en est la cause ?
Kazuo Ishiguro signe un conte fantastique à l'atmosphère mystérieuse, invoquant les derniers vestiges de la légende arthurienne et autres mythologie fantastique. Ogres, elfes, dragons... mais sans ostentation. Son propos est ailleurs. Et tout bon auteur se doit d'être illusionniste. Il faut distraire l'attention du lecteur pour qu'il se laisse porter, qu'il s'attache à des détails, se passionne pour un chevalier vieillissant, un enfant en quête de figure paternelle... jusqu'à ce qu'il soit mûr pour le coup de grâce... cette chute que nous avions pourtant pressentie depuis longtemps. Nous savions que tout ne pouvait que converger vers cette ultime étape. Et pourtant, quand elle survient, elle nous prend quand même de court. Ishiguro n'a même pas besoin de sortir un lapin d'un chapeau pour réussir son coup. Il propose un réflexion intrigante sur l'oubli et ses conséquences, que ce soit collectivement ou individuellement. Du grand art, et un très beau livre.
Coldo3895 a écrit:Je me suis dit... tiens ! et si je tentais un Philip Roth maintenant qu'il est mort ?!
Alors j'ai pris Portnoy et son Complexe...
370 pages d'un type qui s'astique la nouille en pensant à sa mère.
Je me demande qui ça intéresse.
Le Complot a écrit:Coldo3895 a écrit:Je me suis dit... tiens ! et si je tentais un Philip Roth maintenant qu'il est mort ?!
Alors j'ai pris Portnoy et son Complexe...
370 pages d'un type qui s'astique la nouille en pensant à sa mère.
Je me demande qui ça intéresse.
Tu n'y mets pas du tien aussi, il faut lire the human stain.
Coldo3895 a écrit:J'ai aussi acheté Le Complot ( ) contre l'Amérique.
J'espère que c'est mieux
MLH a écrit:Coldo3895 a écrit:J'ai aussi acheté Le Complot ( ) contre l'Amérique.
J'espère que c'est mieux
Je l'ai lu il y a peu de temps, j'ai trouvé ça très bien
Il faut dire que j'aime beaucoup les uchronies
toine74 a écrit:On se demande néanmoins qu'est-ce que ce bouquin peut bien faire dans la collection blanche de Gallimard.
Thierry_2 a écrit:MLH a écrit:Coldo3895 a écrit:J'ai aussi acheté Le Complot ( ) contre l'Amérique.
J'espère que c'est mieux
Je l'ai lu il y a peu de temps, j'ai trouvé ça très bien
Il faut dire que j'aime beaucoup les uchronies
j'ai dû lire le complot contre l'Amérique et J'ai épousé un communistee n'ai jamais compris ce qu'on trouvait à Philip Roth. J'avais trouvé tout ça passablement ennuyeux et surfait. Comme Don deLillo, d'ailleurs.
Peut-être qu'à force d'entendre chaque année ses groupies hurler à la mort parce qu'il avait une fois de plus été snobé par le prix Nobel m'a fait miroiter un truc vraiment exceptionnel et que j'en attendais trop.
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