toque a écrit:...
La suisse possède plus d'outil démocratique que la France. c'est un fait.
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Ça fait plusieurs fois que je vois la Suisse prise comme un exemple de démocratie. Quelques précisions sur ce paradis
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Le système suisse de démocratie directe n'est qu'une petite partie de la gouvernance helvétique.
Le principe principal est lui appelé le consensus. Le Conseil fédéral (le gouvernement formé de 7 conseillers (ministres) élus par le parlement dans une mascarade de vote) parle d'une seule voix, quel que soit son parti d'origine. Si un socialiste sort une proposition de loi, un conseiller issu de l'UDC (la droite dure tendance FN) est obligé de la soutenir (et vice et versa, évidemment). La proposition de loi va ensuite au parlement qui l'amende ici et là avant de la voter ou pas. 99% des lois sont passées comme ça. Des fois, ça coince, une loi qui va trop à droite ou à gauche et un groupe (parti, syndicat, association faîtière, etc.) décide de lancer un référendum pour virer le texte. La démocratie directe rentre en action (il faut des signatures, une campagne, des relais dans la population, etc.) et, peut-être il y aura un vote 18-24 mois plus tard (je simplifie, car, souvent, le Conseil Fédéral propose un contre-projet "adouci" et les référendaire abandonnent s'il estime qu'il est acceptable ou alors il y a double vote).
Un groupe peut aussi proposer une initiative populaire sur n'importe quoi (il y a un contrôle constitutionnel qui juge la proposition avant d'aller plus loin) et s'il arrive à obtenir le bon nombre de signatures, il y a vote (il faut une double majorité du peuple et des cantons) pour accepter le texte. Le vote des minarets vient de là. A noter que ce type d'initiative ne réussit que très rarement (genre 5-6 durant le XXe siècle). On peut aussi soumettre une nouvelle constitution comme ça.
Dans les faits, le conseil fédéral fait extrêmement attention de proposer des lois acceptables par tous les partis, car la case referendum est coûteuse et fait perdre un temps énorme.
Comme la Suisse est un pays ultra-conservateur (le droit de vote des femmes date 72), cette menace de vote sert de garde-fou et de progrès surtout utilisée par la gauche (même si la droite populiste ne s'en prive pas ces dernières années).
Le système est coûteux et très lent (une réforme peut prendre dix, quinze ans à être mise en action) et repose, il ne faut pas l'oublier, sur une culture citoyenne totalement différente que la française : pas de chef charismatique, pas de débats enflammés et pas d'alternance. A la place, de la discussion, du raisonnement et un espèce de bon sens paysan assez irritant pas moments. Ce que je veux dire, c'est que ce n'est pas un outil de pouvoir (pour le peuple, les lobbies, etc.), mais un moyen très exigeant (pour les référendaires, les partis, les citoyens) de pouvoir peser sur le paysage politique. Le vrai pouvoir, comme partout, se joue en coulisses dans les allées du parlement et les conseils d'administration des grosses entreprises.