de MRANN » 20/05/2023 21:30
David Amram a sorti le premier numéro de son fanzine Anti-Reflux il y a cinq ans, seul un autre a vu le jour, et des récits sont apparus dans Nicole, revue de Cornélius, laissant espérer que cet auteur frappant par son mélange de toon et de mélancolie puisse y être publié.
C'est avec un comix, le format culte des années 90 ui fut le coeur battant de la maison d'édition, que ce souhait est exaucé. Dans la nouvelle collection KIM, l'éditeur mêle Burns, Micol et un jeune auteur, belle occasion de mettre en lumière son travail, alors qu'il est si dur de se frayer un chemin en librairie (surtout avec des livres fins).
Les 32 pages du comix sont toutes des perles, des gardes laissant la parole aux complaintes d'un distributeur de savon dépressif à la quatrième de couverture, magnifique dessin assurément lunaire, où un animal anthropomorphe fou fait rouler un astre dubitatif au dessus d'une citation toute aussi chancelante que notre Sisyphe.
Le reste est à l'avenant : trois courts récits (de une, deux et trois pages, comme ça tout le monde est content) encadrent "Pan Pan", morceau central de la livraison. Dans cette histoire, un jeune homme aux longues oreilles tombantes (mais à la face assez humaine, c'est la seule histoire où les personnages ne sont pas clairement animaliers) va rendre visite à sa mère (clairement humaine, elle), après un longue route muette - mais aux roues de valisettes bruyante - dans une ville délabrée. Désespérée par son environnement - de la saleté aux coups de feu - il tente de la convaincre de déménager, que ce soit par la douceur ou la menace, et affronte un mur désarçonnant de déni ou de délire. De quoi faire ressentir un assez profond malaise, alors que le dessin pouvait presque paraître jovial (mais nous ne sommes pas trompé longtemps).
A la fin de l'histoire, une petite page sur un escargot se remémorant ses doux souvenir. Une de mes pages préférées ou, après une séquence qui est quasi classable dans le réalisme social (malgré le dessin), on croit un instant aller ailleurs. Et on y va un peu, mais toujours bien ancré dans cette vague doucereuse.
Une vraie réussite, on espère qu'il y aura un numéro deux, quelques autres, pourquoi pas un gros livres ? Mais peut-être l'auteur a-t-il besoin de ces mini séquences pour rythmer sa création, c'est en tous cas tout l'intérêt de cette collection qui peut donner un espaces ni trop ambitieux, ni noyé dans un collectif, à des jeunes créateurs.
Il a fallu attendre cinq ans pour voir enfin ce fanzineux dans les bacs des libraires, une grosse pression, et il s'avère que ça valait le coup.