de zanzibar » 09/11/2006 17:56
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La Fable fut, est , et sera toujours un excellent moyen pour aborder la nature humaine. ( à ce sujet je conseille le « labyrinthe de Pan » de Guillermo del toro.)
J’avais laché un Guts en pleine rage et défiant la fatalité, c’est pourtant l’acceptation de son apanage que l’auteur nous conte durant ce « cycle des enfants perdus. »
Il faut remarquer que cette acceptation se fait par la seule prise de distance existante : « le rire ».
Un paradoxe brillant quand on connaît le nombre de destinée que l’on nous colle dans les albums qui devienne chiante à souhait.
L’ambiance, elle, a bien changé par rapport à la période précédente. On pourrait dire d ‘une manière bateau que c’est l’apocalypse, au vu des massacres, des épidémies, des mauvais présages, et des superstitions, mais ce Dieu, qui de nos jours est appelé : « dessein intelligent » prend la place de la théorie de Darwin, a tout planifié.
A partir de là, le merveilleux cotoie l’horreur.
C’est en suivant cette optique que l’auteur narre le récit de Jill et de Rosine.
Il débute, d’ailleurs, par le merveilleux : « le fait de voler, de voir de bien plus haut son village natal, de pouvoir jouer, et s’amuser sans se soucier des adultes. »
Sauf qu’ils en viennent à jouer à la guerre. Instantanément, l’ambiance change, ils s’entre tuent ( oui, les enfants sont cruels ! Rien de nouveau, c’est pourtant facilement oublié) et s’entre violent. ( oui, les enfants sont aussi sexués ! là, c’est pas une zone d’ombre c’est un abysse.)
( il faudrait tout de meme pas se leurrer, si l’enfant ne se tourne pas vers l’adulte, on pourra utiliser tous les éducateurs de la terre ça marchera que dalle.)
Et là vous me direz : « et alors ? »
Et bien, cela n’irait pas sans cette façon que nous avons de légitimer nos actes et nos pensées après coup par la parole. Le discours que tiens Rosine est du meme acabit que les apologies sur l’épanouissement personnel.
Que, de nos jours, pour sa propre plénitude il faut avoir un travail , quelques siècles tantot, on nous aurait affirmé que c’était d’etre dans la voie de Dieu.
Guts l’athée est, lui, dans une position ambiguë, grace notamment à la haine et à la colère,
Il franchit la frontière de l’humain plusieurs fois.
Mais mieux, il n’entre pas dans l’art martial total, pas plus que dans le fusionnel, il ne tient aucun discours moral, il n’éduque pas, ne tombe pas dans le comptage des morts ( meme si la question du combien fait son apparition !), et continue à semer la mort à tout va.
Mais mieux encore il ne nous fait pas le coup de la crise identitaire, ou de la quete de la vérité. ( il s’en cogne et moi aussi !)
En ce sens, c’est un adulte. ( rien à voir avec notre forme de maturité paresseuse, mollassonne, et notre rationalisme bienveillant !)
Et Puck dans tout ça, et bien il sert à contrebalancer la sécheresse de Guts jusqu’à ce que le petit elfe pique une colère…et on se dit qu’il n’est, finalement, pas si éloigné de Guts que ça.
Le travail graphique est quand à lui toujours aussi réussi dont certaines doubles pages tome 14, ou la dernière image du tome 15, mais surtout le tome 16 augure une forme d’amplitude exceptionnelle.( J’y reviendrais si cela se confirme !)
Meme si sur ces 3 tomes tout y est, le début a du mal à se mettre en place. Le tome 16, quand à lui, clos brillamment le cycle des enfants perdus, mais on se rend compte que l’œuvre aborde une aube nouvelle, qu’elle est gratinée, qu’elle pétille dans tous les sens.
A quand l’amplitude ! ! ! !
Mais là, ou l’auteur est brillant c’est lorsqu’il nous délivre son message.
Jill se tourne vers le « seul adulte », en l’occurrence Guts, et lui plutot que de lui donner une réponse toute faite lui montre son combat…
Elle en tirera une leçon : « celui de mener sa propre bataille dont elle n’est meme pas sure de changer quoi que ce soit ! »
Un réel pied de nez à toute ses réflexions pseudo-métaphysique sur le sens de la vie qui pullulent dans nos ouvrages.
L’auteur continue ( lentement !) sans effet de mode, sans concessions, donc intemporel, par là meme l’album en est incontournable.
Et moi qui ait toujours considéré l’héroic fantasy comme un genre neu-neu, et franchement pas aidé.
Comme quoi il y a que les cons qui change pas d’avis !
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Mieux vaut être un crétin qui baise qu'un génie qui se masturbe.--Jean Yanne