Hugui a écrit:Je trouve l'oncle Hermes sévère avec Yann.
Ah oui mais j'avais prévenu
j'ai quand même, pas toujours, mais assez souvent des "problèmes" avec les scénarios de Yann, ceux que j'ai lus en tout cas (c'est-à-dire évidemment pas toute sa production, mais à vu de nez pas loin d'une trentaine d'albums), et j'ai l'impression que ça ne tend pas à s'arranger ces dernières années.
Dans G.L., Franquin est certes "décrit comme un dépressif velléitaire" mais après tout la dépression du personnage est la plus célèbre de toute la petite histoire de la bédé. Et la façon dont ce trait de caractère est présenté, associée à cette connaissance que le lecteur a probablement de l'évolution ultérieure du personnage, m'apparaît plus touchante que comique. Qu'il soit "porté à bout de bras par Jijé", ça me semble carrément contestable : quand Franquin lui demande de l'aide parce qu'il a inconsidérément envoyé un télégramme de démission à Dupuis, Jijé, en guise de "solution", réagit en... essayant de lui piquer
Spirou, et le lui présente en sus comme une faveur qu'il lui fait !
Surtout, il me semble qu'il ressort de la lecture l'impression générale (peut-être fausse dans le détail, mais c'est l'impression dominante que j'ai eu) que Franquin est quasiment le seul de la bande, dans l'album, que l'on voit travailler. Morris fait des croquis de temps en temps dans un coin de case quand il croise quelque chose d'intéressant, et lorsque lui et Franquin ont besoin d'argent il produit, presque "magiquement", des planches de
Lucky Luke à envoyer à Bruxelles. On ne voit jamais ce qu'il dessine. Franquin est en permanence celui qui prend l'initiative d'
aller chercher de quoi dessiner, que ce soit en poursuivant un colibri, en se rendant le premier en ville à l'occasion d'une fête ou en trouvant un moyen d'attirer des vautours. Et ce qu'il dessine - même s'il s'agit de l'imagination de Yann et non de sa production "réelle" de l'époque - est largement montré.
Joseph Gillain me semble, lui, présenté presque exclusivement sous l'angle de l'anecdote, et si dans un premier temps, sur la route, c'est la débrouillardise et l'allant du personnage qui dominent, une fois la famille "installée", dans la partie mexicaine de l'histoire (la seconde moitié), ces anecdotes deviennent majoritairement négatives : il loge le duo dans des conditions peu salubres, établit un tarif pour leurs repas, ou, comme dit plus haut, essaie de reprendre à Franquin son seul gagne-pain. Je ne doute pas qu'il y ait un fond de vérité derrière la majorité (au moins) de ces épisodes, mais il y a l'art et la manière de les raconter... Et surtout, à côté de ça,
quid de Jijé, le géant de la bande dessinée ? Pas un mot sur ce que l'importance de ce voyage dans la genèse de
Jerry Spring, et quand on le voit réfléchir sur
Spirou, son inspiration est présentée comme intrinsèquement inférieure à celle de Franquin : il ne "parvient" pas à créer le Marsupilami, ses planches sont refusées par Dupuis...
Je ne prétends pas que cette vision "disqualifierait" l'album de Yann et Schwartz (qui, encore une fois, m'a plutôt bien plu dans l'ensemble, même si ce n'est "l'album de l'année"), mais il me semble qu'elle en minore la réussite. Et qu'accessoirement je comprends un peu mieux - en partie - et même si je la trouve toujours exagérée - la réaction négative des héritiers Gillain...