Les traductions comme les phylactères ont été faites, refaites et re-refaites. Il n'est pas si facile de trancher pour déterminer quelle est la meilleure traduction. Parfois on améliore un dialogue ou un texte narratif mais simultanément un autre va perdre en qualité.
Dans la plus récente édition de
Sous le signe du Capricorne, on peut noter une petite amélioration de certains textes par rapport à la traduction établie du vivant même d'Hugo Pratt. Dans le récit intitulé "A cause d'une mouette", Corto blessé par Soledad Lokäarth devient amnésique. Il délire et alors qu'il est entre la vie et la mort, il revoit en pensées des moments vécus dans "La ballade de la mer salée" : la nouvelle traduction fait référence à Pandora et Crânio (que nous connaissons sous ces noms depuis 1975) alors que dans la traduction des années 1990, le traducteur avait cru bon de franciser les noms de Pandora et Cranio qui devenaient alors Pandore et Crâne, ce qui n'était franchement pas terrible (sans être rédhibitoire).
Il y aurait aussi beaucoup à dire sur la forme des "fumées" (bulles, phylactères) : l'édition de 2015 a le mérite de reprendre la forme des bulles adoptées dans les années 1990, du vivant de Pratt.
A l'origine, en France dans Pif Gadget, dans les albums Publicness et les premiers albums cartonnés de Casterman (ceux du début des années 70), on ne trouvait pas de véritables bulles à proprement parler. Un simple trait soulignait la dernière ligne d'un dialogue. Une pointe de ce trait était dirigée vers le personnage. Le texte n'était donc pas circonscrit dans une bulle. L'arrivée de celles-ci avec les rééditions a posé le problème de certains phylactères qui se sont superposés à des éléments de décor, jusque là visibles. Et ces bulles ont par la suite été modifiées, puis retouchées, pas toujours judicieusement.
Pour ce qui est de la couleur, on pourrait considérer que les épisodes antérieurs à
Fable de Venise ont en effet été pensés pour être lus en noir et blanc et qu'on peut se dispenser de la couleur.
Cependant, Pratt, très vite, a fait coloriser certains récits. Et les couleurs ont été modifiées à plusieurs reprises, dans le temps, au gré des éditions.
En juin 1977,
Fiaba di Venezia (
Fable de Venise) fut prépubliée à l'origine en couleur dans le magazine L'Européo. Pratt disait de
Fiaba di Venezia que c'était un rêve et que les rêves sont en couleur ! L'édition originale italienne retitrée
Sirat al-Bunduqiyyah (Sourate vénitienne) paraîtra initialement en couleur. A l'inverse, dans l'hexagone l'histoire paraîtra d'abord en noir et blanc parce que la revue (A Suivre) était en noir et blanc.
Certains, sur le forum, ont dit que pour bien faire, il faudrait posséder dans sa bibliothèque la collection complète en noir et blanc mais aussi les versions en couleur (un peu comme pour Tintin). Je me range assez volontiers à cet avis, même si la formule est rude pour les économies. Cela ne se conçoit, à l'évidence, que pour les inconditionnels.
Pour le reste, je partage ton point de vue, Jr, à propos de
Sous le soleil de Minuit, dispensable. Je trouve aussi de mauvais goût les couvertures de la collection en noir et blanc des années 2000 ainsi que l'actuelle.
L'édition couleur de 2015 est en revanche assez proche (ce qui est un plus), mais pour certains titres seulement, de l'édition couleur des années 1990 (commencée du vivant de Pratt mais achevée après son décès). Les bulles de texte ont la même disposition que celles des années 90, abandonnant celle de la collection des années 2000.
Pour se lancer dans la lecture de Corto Maltese, je suis totalement d'accord avec Jr :
La ballade de la mer salée ou à la rigueur, mais dans l'ordre, les récits de Pif qui installent assez vite le personnage. L'ordre à respecter étant :
Sous le signe du Capricorne,
Corto toujours un peu plus loin,
Les Celtiques et
Les Ethiopiques. Comme certains de ces récits font référence à des épisodes antérieurs et en particulier à
La ballade de la mer salée, autant respecter l'ordre chronologique et commencer avec
La ballade, non ? Cela rendra la lecture des épisodes postérieurs plus aisée, en raison notamment de la présence de personnages récurrents et de l'évocation assez fréquente de faits plus anciens.
Un avantage non signalé à lire les albums souples (ceux des années 80, avec aquarelle en couverture) est la taille des dessins. Ils ont pas mal rétréci dans les éditions actuelles, je me suis amusé à mesurer.
On pourrait également citer la qualité d'impression. Les films d'imprimerie ont été réalisés à l'époque à partir des originaux alors que dans certaines éditions contemporaines, ça "sent" parfois le scan, la numérisation et la pixellisation à plein nez.