52. Omnibus, scénario de Greg Rucka, Geoff Johns, Grant Morrison, Mark Waid, dessins de Keith Giffen, Justiniano, Joe Bennet, etc., DC Comics, 2012.
Voici regroupés, dans un volume extrêmement imposant, les 52 épisodes de la maxi-série 52 publiée entre 2006 et 2007. A raison d’un numéro publié par semaine, la série se voulait être un véritable feuilleton se déroulant dans le monde des héros de la firme.
L’action débute une semaine après Infinite Crisis. Les héros coalisés ont battu Superboy Prime et Alexander Luthor (qui avaient pourtant combattus avec les gentils dans la Crise des Terres Infinies), ils voulaient annihiler notre monde jugé déchu, pour en créer un autre parfait.
Mais les blessures sont profondes. Batman par sa paranoïa a manqué de faire trucider tout les super-héros avec son projet OMAC qui lui fut dérobé par Maxwell Lord. Wonder Woman a mis un terme à ce projet en assassinant Lord. Superman semble avoir perdu ses pouvoirs au terme du terrible combat contre Superboy Prime.
Au bout du rouleau, les trois stars de la DC prennent des vacances forcées. Pendant une année, il faudra compter sans eux, mais heureusement, l’année sera trépidante…
L’action, telle un feuilleton, se focalise autour d’une galerie de personnages divers :
- Renée Montoya, officier de police à Gotham noie sa peine dans l’alcool. Sa famille la rejette parce qu’elle préfère les femmes. Son collègue Crispus Allen a été lâchement abattu par un flic ripoux qu’elle n' a pas eu la force de tuer. Sa copine vient de la plaquer. Elle ne croit plus en rien et traine dans les bars, seul un miracle pourrait la réveiller.
- The Question, héros étrange portant un masque avec un point d’interrogation (il servit de modèle pour Rorschach) enquête à Gotham sur un bien étrange d'armes douteux. Il découvre que des scientifiques de renom ont disparu. Il va bientôt rencontrer Renée.
Ralph Dibny, Elongated Man, toujours marqué par le décès de son épouse est intrigué par un culte célébrant l'alors défunt Superboy et prévoyant sa seconde venue...
- Booster Gold, un footballeur du XVème siècle de seconde zone, arrogant, aussi stupide que prétentieux, est venu à notre époque pour être connu, aimé et se remplir les poches : il a dérobé dans un musée de son temps des artefacts (dont un anneau de la Legion) afin de jouer les super héros, il est secondé par son robot historien Skeets qui connaît les évènements à venir. Il a aidé Batman pendant l’Infinite Crisis pour désamorcer le projet OMAC et il compte bien, maintenant, vendre son image de « héros » et signer de juteux contrats publicitaires.
- Animal Man, Starfire et Captain Strange tentent de revenir sur Terre. Durant la crise ils se sont battus dans l’espace, mais ils sont désormais perdus, ils tombent sur Lobo…
- Black Adam, le premier Captain Marvel de l’histoire, emplis des pouvoirs de dieux égyptiens, règne en despote éclairé sur son état de Khandaq. Il y liquide les terroristes et les fanatiques religieux avec une authentique sauvagerie. Il rencontre par ce biais une de leurs otages, une jeune femme, très jolie, qui lui tient tête, ce qui lui plait énormément, il est même prêt à lui donner des pouvoirs comme les siens...
- Supernova, un mystérieux héros masqué à la force inimaginable et efficace semble remplacer Superman à Metropolis. Il agace énormément Booster Gold qui a le sentiment qu’il lui vole son heure de gloire…
- De son coté, Lex Luthor qui prétend s’être racheté une conduite a mis au point le Projet Everyman, conférant aux humains des pouvoirs considérables, le temps qu’ils suivent le traitement, Hélas, le traitement ne fonctionne pas sur lui. Il a à sa disposition une équipe d'héros, Infinite Inc.
- En Chine, on voit apparaître des Héros nationaux : les Great Ten qui essayent de s'allier aux héros russes et à Black Adam pour contrer les occidentaux.
- La Trinité (Superman, Batman,Wonder Woman) n’apparaitra que par clins d’œil dans ce récit. Et, on fait vite avec leur absence.
La grande force de ce récit de longue haleine (1200 pages !) est de parvenir à nous intéresser aux destinées de ces héros (parfois des anti-héros) de second rang.
Suivant un scénario implacable, toute ses destinées vont se réunir, s’affronter, dans un maelstrom final d’une intensité rarement atteinte.
Des personnages mineurs acquièrent le statut d’icônes comme Booster Gold, Black Adam ou encore Renée Montoya : on se demande même comment ou pourquoi des personnages aussi complexes n’avaient pas crevé l’écran avant.
Il est certain que jamais l’équipe de scénaristes ne perd le fil, que chaque dialogue est raisonné, que chaque scène est pensée, construite. 52 a ainsi parfaitement réussi son objectif d’être un « feuilleton télé sur papier » qu’on dévore et dont on attend fébrilement le prochain épisode…
Même si la multitude de dessinateurs, parfois aux traits perfectibles, peut nuire à la cohérence visuelle de l’ensemble, la profondeur du scénario est telle que l’on oublie bien vite les variations de visages de certains personnages d’un épisode à l’autre.
Le seul regret vient de la qualité de cette édition Omnibus. Certes un Omnibus n’est pas un Collector ou un Absolute, mais quand même ! En dehors des 52 numéros de 52, on ne trouve aucuns suppléments : pas de croquis, pas d’interviews, pas de notes. Qui plus est, le volume ne reprend pas les quatre épisodes spéciaux intitulés World War III, ils n’apportent certes rien à l’intrigue principale, mais quand on sort un livre de 1200 pages, on n’en est plus à 50 pages près… Allons messieurs de la DC, ne soyez pas si radin !
Mais, ce bémol à part, je ne peux que vous encourager à vous procurer ce volume qui fait son poids et son prix (120 euros).
52 fut une expérimentation éditoriale gonflée mais réussie (Countdown sera un ratage complet, lui, hélàs), car réalisée par les meilleurs scénaristes de l’époque qui ont su travailler ensemble pour créer un petit (manière de parler pour un livre de cinq kilos !) chef-d’œuvre.