de Cooltrane » 26/12/2018 11:56
Bon, continuons dans l'oisiveté noëllienne pour rattraper mon "retard".
Une vraiment très bonne pêche il y a une semaine avec la compagne.
Son choix:
Woman At War: (Islande) Une montée en puissance du cinoche volcanique de la mi-atlantique, car après le très remarqué Rams, et le fort cynique Under The Tree, les cousins de Bjork nous reviennent avec le sur-et-très prenant Woman At War, une fable écologiste nous invitant à découvrir et protéger la nature assez singulière de l'ile volcanique. Nature qu'on aurait tendance à croire sous-exploitée, mais la disponibilité (et surtout les couts fort bas) d'énergie attire de vilains pollueurs mondiaux. Une 50-naire en attente d'adoption épouse une cause écolo et pratique un terrorisme bricolo en s'attaquant aux pylônes électrique amenant l'énergie à des industries polluantes comme une fonderie d'aluminium appartenant à des capitaux chinois, attirés par l'énergie trop bon marché. Avec les complicités de sa sœur, d'un fonctionnaire de l'état et un rare fermier bourru du coin, la farouche militante réussit (un moment) à échapper à une traque impitoyable (fort spectaculaire) dans les steppes islandaises, où l'actrice principale a certainement beaucoup payé de sa personne. La combattante (aussi cheffe d'une chorale paroissiale) est d'abord assez insoupçonnable aux yeux des autorités, elle qui a fait demande d'adoption depuis de nombreuses années, mais le dossier longtemps à l'arrêt se réveille en même temps que sa quête écologique.
Outre un bon aperçu des campagnes sauvages de l'ile, on se réjouira de la direction musicale composée de deux trios (un instrumental et l'autre vocal) traditionnels apparaissant à tout bout de champs et rue, provoquant un effet comique allégeant la lourdeur du propos. Un autre aspect déconcertant du film est sa non-fin en queue de poisson dans les campagnes ukrainiennes inondées, renforçant la légende d'étrangeté de ce pays insulaire. Bien que pouvant y trouver autant à dire qu'à redire, ce film très imparfait au scénario pas toujours très linéaire fini par trouver en la sœur jumelle de la militante, une baba-cool hindouiste, sa véritable héroïne. Mais on peut se poser des questions sur le message et les motivations du réalisateur, qui semble aller à l'encontre de l'image reçue de la démocratie presque parfaite qui se dégage habituellement avec les vapeurs géothermiques de l'ile. L'Islande serait-elle acquise à un capitalisme grossier, au point de profiter de l'aide des superpuissances pour mater une militante, aussi déterminée soit-elle? A vérifier, mais en attendant, le film frappe fort les esprit: 8/10
mon choix:
Capharnaüm: Deuxième film libanais de l'année après le fort poignant L'Insulte, dont une partie se passe dans les tribunaux, nous arrive ce Capharnaüm, qui se passe aussi en partie dans les palais de justice, sans pour autant prendre l'ampleur internationale de son prédécesseur. Capharnaüm est un film assez misérabiliste qui prend son temps à se construire sur les affres et les désordres des laissés-pour-contre dans les bidonvilles de Beyrout, remplis de réfugiés légaux (ou pas) et toujours en proie à une violence sous-jacente - voir les jeux des gamins dans les rues. Un jeune garçon s'émancipe de ses parents pauvres suite à sa tentative de soustraire vainement sa sœur (13 ans à tout casser) à un mariage arrangé; mais en fuyant les quartiers modestes, il se retrouve dans les bidonvilles à essayer de survivre en faisant des petits boulots, zonant où il peut. Une réfugiée éthiopienne (nettoyeuse dans un parc d'attraction en ruine) le prend sous son aile dans son poulailler de misère. Mais quand celle-ci est prise dans une rafle, le garçon se retrouve avec son gamin de deux ans sur les bras. Un inventant une charrette pour trainer son attirail (gamin inclus), le jeune héro vague de mésaventure en aventure dans le chaos de l'humanité du Moyen-Orient, le tout sur une musique assez poignante et fort (parfois presque trop) présente. Le puzzle se construit lentement (trop de longueurs dans ses prérégrinations) et l'on comprend comme ce fils (devenu criminel suite à un crime violent) se retourne contre ses parents devant les tribunaux pour lui avoir donné la vie.
Sans pour autant faire trop dans le Dickens-ien, la réalisatrice Nadine Labaki nous expose tous les traitements inhumains que subissent les enfants nés du mauvais coté de la vie, y compris l'esclavage sexuel (via le "mariage"), et la surpopulation galopante chez les pauvres. Le gros hic qui gêne est qu'il est impossible que ce jeune sans la moindre éducation puisse développer le discours qu'il tient dans le film, mais bon, le pathos est un peu l'ADN de ce genre de film, qui parfois frise avec le documentaire. Heureusement, la réalisatrice résiste à l'envie d'en faire un feel-good movie pour le grand public (bobo visés, tout de même) en refusant une fin à la Slumdog Millionaire, mais on ressortira après deux heures de la salle sombre avec un cœur gros comme une pastèque et sous le coup de cette musique un peu trop envoutante pour être totalement honnête. 8/10 tout de même.
Mieux vaut tapis Persan volé que tapis volant percé (Uderzo.... et oui, pas Goscinny)