Prisoners (Denis Villeneuve, 2013)Très bon polar de série B qui cependant déçoit un peu au final car longtemps j'ai cru visionner un film explorant un drame humain. Quand dans le derniers tiers, on vire dans le polar avec ces rebondissements qui s'enchainent, j'ai été déçu par ce tournant ressemblant à une facilité scénaristique.
Cela reste un bon film. Des excellents acteurs. Une photo splendide. Un film d'une noirceur rare dans le cinéma US. Le film prend son temps pour installer les personnages, l'intrigue. L'étude des répercussions du drame est bien faite. Le choix du personnage de Jackman est ambigu. Doit on l'approuver ou le condamner? J'apprécie que jamais le film ne donne clairement la réponse. Le film évite aussi la facilité du plaidoyer à la figure du vigilante. Le film nous interroge durablement : en tant que père que serais je capable de faire dans un cas similaire?
Tout cet aspect du film est réussi. On cite souvent Zodiac comme inspiration du film alors que moi j'ai beaucoup plus pensé à Memories of murders ou encore à The pledge .
Le défaut du film vient de son côté polar qui dans sa résolution et facilités n'est pas sans rappeler un épisode d’esprits criminels. Il y a a trop de deux ex machina. Les pièces de l'intrigue s'emboitent trop facilement de telle sorte que le spectateur à dans la dernière partie toujours 10 minutes d'avances sur ce qui va se passer. De plus si la temporalité est bien exploitée dans le film, je trouve que ce n'est pas le cas de la spatialité. ON a l'impression que tout se passe dans le même bled et là cela fait vraiment trop. Il y a tellement de dégénérés dans ce coin qu'on pourrait se croire dans massacre à la tronçonneuse. Parce que si on résume, on a dans ce coin de paradis des USA:
- un couple de dégénérés qui kidnappent les enfants depuis des années pour lutter contre Dieu
- un curé délinquant sexuel repenti qui garde dans sa cave de manière quasi fétichiste le cadavre d'un pédophile pire que lui
- Un ancien kidnappé fétichiste de vêtements et de mannequins de gamins qu'il enferme dans des boites en les maculant de sang de porcs et de serpent. Ce sociopathe vit comme un clodo dans une maison qu'il tapisse de dessin de labyrinthe..........
- Un jeune adulte à la tête de psychopathe et au QI de gamin qui se promène partout dans la ville avec un camping car pourri pour mâter les gamins.
Tout cet aspect ne me dérange pas dans un film qui assume son côté série B mais dans un film qui mise tout au départ sur son aspect réaliste, cela me chagrine.
J'ai longtemps aussi tiqué sur la médiocrité apparente des flics du coin :
- Ils ne surveillent pas un suspect qui vient d'être relâché
- Ils ne fouillent même pas la maison de ce suspect.
- Quand ce suspect disparait, ils ne lancent pas de recherche, ils n'interrogent pas plus que cela le père qui l'a frappé auparavant.
- Ils ne remarquent même pas une trappe sous une voiture abandonnée alors que le même flic a trouvé une porte cachée derrière un frigo.
- La police scientifique ne vaut guère mieux, etc
- La police interroge tous les délinquants sexuels mais ne pense pas à aller voir une victime passée d'un rap finalement très similaire.
- Depuis 20 ans, des disparitions d'enfants ont lieux dans le coin mais cela n' a pas l'air de gêner grand monde
- Un enfant a l'air de pouvoir être adopté facilement aux USA. Un kidnappé est adopté par ses ravisseurs sous le prétexte qu'il s'agit du fils du frère décédé. Il y a aucune vérification....
- La mère qui semble vivre à deux coins de rue n' a jamais reconnu son fils qu'elle a du pourtant croiser souvent
Et puis je me suis rappelé que finalement l'intrigue a lieu sur 7 jours et que l'enquête est résolu dans ce délai. C'est en fait formidable. De même, je me suis rappelé que dans l'affaire Dutroux des flics avaient fouillé la cave ou étaient retenues les petites sans rien voir ni rien entendre.
Malgré tous ses défauts, le film marque et indispose durablement. J' y réfléchis depuis hier. Je le trouve moins bon car plus le cul entre deux chaises que The pledge 4 à 4.5/6