Nocturne indien ( Alain Corneau, 1989 )Un jeune homme débarque à Bombay, à la recherche d'un ami disparu ; il n'a que peu d'indices. D'un hôtel louche à une salle d'hôpital, d'un couvent portugais à une société théosophique, de Bombay à Goa en passant par Madras, il tente de reconstituer son itinéraire. La recherche de son ami se transforme peu à peu en quête de sa propre identité.Étrange filmographie que celle d'Alain Corneau, réalisateur capable d'alterner entre blockbuster à gros budget ( Fort Saganne); polar ( série noire , le cousin, police python), adaptation de succès littéraire ( stupeur et tremblements ), film musical en costumes ( tous les matins du monde), navet ( prince du pacifique) et ce road-trip existentiel !
J'ai été attiré vers ce film par une critique disant que c'était le meilleur film de Corneau mais aussi par mon ensorcellement pour l'Inde, pays que j'ai visité 3 fois. Ce pays, quasi un continent, passionne autant qu'il révulse. Il laisse le voyageur dans un état de sidération pouvant même dans des cas extrêmes aboutir au syndrome de l'Inde. On sent clairement que Corneau est tombé amoureux de l'Inde et des sensations que provoque le pays. A un moment un natif dit au héros :""On se perd facilement en Inde, pays fait exprès pour ça !". Cette formule résume parfaitement le film et le parcours désorientant du personnage principal. Il erre dans le pays, allant à la rencontre de divers individus à la recherche d'un ami disparu mais en fait il découvrira qu'il se cherche surtout lui même. C'est le côté le plus réussi du film : cette traversée initiatique dans une Inde criante de vérité. Après est ce que le film n' a pas déjà trop vieilli et n'est plus que l'image d'une Inde passée n'ayant plus rien à voir avec le pays actuel ? Je ne peux le dire car mon dernier voyage dans le pays remonte à plus de 20 ans. La description du pays reste du moins étonnement concordante avec mon initiation à l'Inde faite à 8 ans exactement à la même époque que le film soit 1989. Le tout magnifié par une superbe photo.
Une des plus belles scènes du long métrage est celle de voyance quasi fantastique avec la jeune aveugle polyhandicapée (
). C'est criant de vérité. J'ai quasi vécu la même aventure mais avec un massage ( le meilleur de ma vie) débuté avec ce sentiment de répulsion-compassion et la même interrogation " mais ou suis je donc tombé" .
Je peux parler de même avec la nuit passée à même le sol avec tous les autres Indiens au sein de l'immense gare de Bombay. (
).
Anglade est parfait dans ce rôle de quidam perdu en Inde. L'acteur semble autant découvrir le pays que son personnage. Il est littéralement liquéfié comme tout touriste à l'époque. On image d'ailleurs ( peut être à tort ) le tournage comme quasi improvisé au fil des rencontres et de la découverte des lieux.
Il faut accepter de se laisser porter par le rythme indolent du long métrage qui devient vite lancinant avec l'usage de la musique de Schubert souligne fort à propos les fortes rencontres. ( superbe scène de la visite de l’hôpital ).
Il est dommage que le film ne se tienne pas jusqu'au bout dans son coté "Lost in India" et que les 10 dernières minutes soient de trop. Déjà il y a l'apparition de Clémentine Célarié qui en quelques minutes de présence rappelle à quel point elle est mauvaise actrice. De plus, alors que le film était jusque là plutôt évasif, à la limite du trip planant, il devient sur dialogué et explicatif sur l'aspect " je me suis trouvé. Comme si le spectateur n'avait pas compris par lui même !
Le film ne plaira pas à tous mais une belle découverte me concernant et je regrette qu'une édition blu ray rendant hommage à la beauté picturale du long méétrage n'existe pas.