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C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede Olivier_D » 21/01/2024 17:33

Message précédent :
tzynn a écrit:des auteurs me disant que leur éditeur commençait à gagner de l’argent avec 50 exemplaires vendus (en direct, sans distribution et libraire).


C'est quand même peu probable. Ces 50 exemplaires à 15 euros font 750 euros. Je ne vois pas comment on peut imprimer 3000 ou 5000 livres pour 750 euros (à supposer que tous les sous aillent à l'éditeur, ce qui n'est bien sûr pas le cas).
Sans compter la maquette, payée par l'éditeur...

D'après un éditeur avec qui j'ai discuté, ils commencent à gagner de l'argent autour de 4500 exemplaires (en comptant cette fois maquette, impression, distribution, gestion, ce qui est bien, parce que sinon autant s'auto-éditer).
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede tzynn » 21/01/2024 18:00

Olivier_D a écrit:
tzynn a écrit:des auteurs me disant que leur éditeur commençait à gagner de l’argent avec 50 exemplaires vendus (en direct, sans distribution et libraire).


C'est quand même peu probable. Ces 50 exemplaires à 15 euros font 750 euros. Je ne vois pas comment on peut imprimer 3000 ou 5000 livres pour 750 euros (à supposer que tous les sous aillent à l'éditeur, ce qui n'est bien sûr pas le cas).
Sans compter la maquette, payée par l'éditeur...

D'après un éditeur avec qui j'ai discuté, ils commencent à gagner de l'argent autour de 4500 exemplaires (en comptant cette fois maquette, impression, distribution, gestion, ce qui est bien, parce que sinon autant s'auto-éditer).


Pas en imprimant 3000 ou 5000 exemplaires, ça c’est évident, mais en imprimant par 10 ou 50, ce qui n’était pas possible par le passé. Mais c’est pas avec ça que l’éditeur ou l’auteur vont vivre, on est bien d’accord. Et c’est sans toute la chaîne de distribution vente. Il me semblait d’ailleurs que le seuil de rentabilité était plutôt du côté de 10 000 par le passé. Ca a baissé?

Ou bien ce sont les éditeurs qui font de la distribution qui margent bien mieux ? Chez Paquet vous n’avez jamais eu le choix de distribuer vous mêmes ?
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede fanche » 21/01/2024 19:31

han_solo a écrit:
fanche a écrit:Et malgré la plus grosse évolution des prix il n'arrivent pas à se sucrer

Parce que les coûts d'édition ont bien augmenté.
Et que la plupart des auteurs ne perçoivent qu'une partie minime du prix de vente (même pas sûr qu'ils bénéficient de l'augmentation des prix)

Il faut prendre en compte les autres domaines je le remet là pour le confort. Je ne parlais pas des auteurs sinon.

nexus4 a écrit:Un peu de kerozen pour la discussion. :P

Le bilan 2023 des ventes de livres en France pour les librairies
:arrow: https://actualitte.com/article/115304/l ... librairies

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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede Olivier_D » 21/01/2024 20:45

tzynn a écrit:Pas en imprimant 3000 ou 5000 exemplaires, ça c’est évident, mais en imprimant par 10 ou 50, ce qui n’était pas possible par le passé. Mais c’est pas avec ça que l’éditeur ou l’auteur vont vivre, on est bien d’accord. Et c’est sans toute la chaîne de distribution vente. Il me semblait d’ailleurs que le seuil de rentabilité était plutôt du côté de 10 000 par le passé. Ca a baissé?


Le seuil de rentabilité doit dépendre de la pagination, du format et surtout du prix de vente, ça doit donc être variable, mais je ne suis pas assez documenté pour te donner des chiffres.
Je n'ai jamais entendu parler de tirages par 10 ou 50, ça me semble là aussi peu probable, les imprimeurs qui font de la BD semblent avoir l'habitude de plus gros volumes.
Peut-être que j'ai mal interprété tes posts, et dans ce cas je m'en excuse, mais tu sembles charger la barque du côté de l'éditeur. Or des éditeurs qui ont coulé par suite de mauvaises ventes, ça s'est déjà vu dans la BD.
Comme l'explique Pol, il lui faut des bons vendeurs pour compenser les risques de ceux qui vendent moins.

A mon sens, le vrai souci c'est la quantité de titres avec la volonté de vivre de son art. C'est inconciliable, malgré un marché en bon état, le lectorat ne peut pas suffire à faire vivre autant de gens.
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede zourbi le grec » 21/01/2024 22:09

Question vraiment naive. Est-ce que le prix payé au dessinateur, et pour l'avance et pour chaque album vendu dépend de la difficulté et de la qualité du dessin ?
Par exemple, j'imagine qu'un dessinateur réaliste au dessin très fouillé ne doit pas être payé comme un dessinateur au style plus sommaire et qui peut produire trois fois plus que le premier ?

Je pose la question car j'ai constaté que depuis quelques années, la qualité graphique moyenne a baissé (surtout dans les romans graphiques) et je me demande si c'est lié à la crise actuelle et à la nécessité de produire plus.
Il existe bien sûr toujours des virtuoses du dessin mais je parle de la moyenne.
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede fanche » 21/01/2024 22:25

Je trouve pif et Hercule ou Placid et Muzo atrocement moches et je découvre que c'est du roman graphique pour expliquer la médiocrité :shock:
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede HervB » 21/01/2024 22:45

zourbi le grec a écrit:Question vraiment naive. Est-ce que le prix payé au dessinateur, et pour l'avance et pour chaque album vendu dépend de la difficulté et de la qualité du dessin ?
Par exemple, j'imagine qu'un dessinateur réaliste au dessin très fouillé ne doit pas être payé comme un dessinateur au style plus sommaire et qui peut produire trois fois plus que le premier ?

Non, puisque dans tous les cas, nous sommes sur des droits d'auteur qui sont calculés sur le prix de vente du livre et le nombre d'exemplaires vendus (au moins des ventes estimées / espérées).

zourbi le grec a écrit:Je pose la question car j'ai constaté que depuis quelques années, la qualité graphique moyenne a baissé (surtout dans les romans graphiques) et je me demande si c'est lié à la crise actuelle et à la nécessité de produire plus.
Il existe bien sûr toujours des virtuoses du dessin mais je parle de la moyenne.

Du point de vue de certains (auteurs), c'est la nécessité de produire plus qui amène cette évolution. J'ajouterai que le roman graphique, tout comme les mangas, est un "genre" qui s'attache moins au dessin, et plus au contenu, au message. L'influence de la production américaine "indé" et les mangas ont donc, de mon point de vue, plus influencé les autrices et auteurs actuels que les générations précédentes d'auteurs qui placent le dessin au dessus du reste (l'intérêt du récit, par exemple).
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede zxcvbnm » 21/01/2024 23:44

HervB a écrit:
zourbi le grec a écrit:Question vraiment naive. Est-ce que le prix payé au dessinateur, et pour l'avance et pour chaque album vendu dépend de la difficulté et de la qualité du dessin ?
Par exemple, j'imagine qu'un dessinateur réaliste au dessin très fouillé ne doit pas être payé comme un dessinateur au style plus sommaire et qui peut produire trois fois plus que le premier ?


Non, puisque dans tous les cas, nous sommes sur des droits d'auteur qui sont calculés sur le prix de vente du livre et le nombre d'exemplaires vendus (au moins des ventes estimées / espérées).


C'est très réducteur comme réponse. Dans la réalité c'est plus compliqué. Le "prix payé au dessinateur", c'est grosso modo, son à-valoir et le taux de son % sur le prix de la BD. Donc oui bien sûr, il est différent pour chaque dessinateur. On ne va pas filer le même à-valoir à un mec qui fait du Schtroumpf qu'à Alexis Nesme par exemple. Parce que dans le deuxième cas, il aura besoin de plus de temps pour réaliser son album. La hauteur de l'à-valoir est donc là pour permettre (en théorie) à l'auteur de pouvoir mener à bien la réalisation de sa BD sans trop de stress d'argent. Donc plus c'est compliqué et long, mieux vaut savoir négocier son à-valoir.

Ensuite, l'à-valoir comme le fameux % sur lequel vous vous focalisez tous, est négociable aussi en fonction de la notoriété de l'auteur, etc...

Et enfin (et surtout) le tirage

Donc dire que tous les auteurs sont logés à la même enseigne est faux. Ceux qui s'en sortent le mieux, sont au final les plus productifs. Si Bruno Maïorana a lâché la BD, pour ne citer que lui, c'est justement parce que ce ratio temps passé à la réalisation/à-valoir et % (et éventuellement tirage) n'étaient plus en sa faveur par rapport à sa manière de travailler. La négociation ayant ses limites, même l'éditeur le plus sympa du monde, ne peut pas non plus proposer des à-valoir et un % trop important parce que le mec met 2 ans à pondre une BD. Il faut trouver un compromis qui semble juste aux deux parties (même si le rapport de force est largement déséquilibré).

Aujourd'hui, pour la grande majorité des auteurs c'est de se dire "je fais avec parce que j'ai envie de faire de la BD et qui sait, un succès?" tout en ayant un job alimentaire à côté. Et même les auteurs à succès, vivent de plus en plus des "à côtés" que de leur BD propres. Suffit de voir Marini, pour ne citer que lui, qui pond aquarelle sur aquarelle et expos sur expos sachant qu'il se fera plus de fric, plus vite, en vendant ses originaux pondus spécifiquement pour ça, qu'avec ses BD. C'est un peu le même problème des auteurs qui font des interventions dans les écoles parce que c'est plus rentable. Mais au final, ils passent plus de temps à parler de leur métier qu'à le pratiquer.

Je pose la question car j'ai constaté que depuis quelques années, la qualité graphique moyenne a baissé (surtout dans les romans graphiques) et je me demande si c'est lié à la crise actuelle et à la nécessité de produire plus.
Il existe bien sûr toujours des virtuoses du dessin mais je parle de la moyenne.


Le calcul est simple. Comme cela a été dit plus haut « 4,7 % des ouvrages se sont écoulés à plus de 10.000 exemplaires. Les titres représentant « 100 à 10.000 exemplaires représentent les trois quarts des volumes vendus », note le syndicat. »

Soyons optimiste, partons du principe que l’album d’un auteur X est tiré à 10 000 exemplaires et que tout soit vendu. Disons que cet auteur touche 10% sur le prix de vente et que le prix moyen d’une BD tout public c’est 12 euros. Le mec va toucher environ 12 000 euros. Soit moins qu’un Smic s’il a mis 1 an pour réaliser cette BD.

On comprend donc que pour être rentable, il vaut mieux pouvoir produire vite. Si pour la même BD tu mets 4 à 5 mois, ça devient déjà plus intéressant sans être génial non plus. Donc, les dessinateurs qui peuvent produire vite et bien peuvent espérer en vivre. Les autres, à moins d’un franc succès, ça va être compliqué. Ce ratio « temps passé à la réalisation/ce que je gagne » explique aussi en effet la baisse générale de la qualité de la BD parce que tu dois produire vite si tu veux espérer en vivre. Sans parler des « forfaits » qui tirent aussi vers le bas le ratio du prix à la page. Donc quand tu te rends compte qu’au bout du compte t’es payé 40 euros la page, t’as pas envie de te faire chier. (sans parler aussi qu'on publie de toute façon, de plus en plus de gens sans talent mais c'est un autre sujet). D’où le nombre croissant de bouses estampillées « roman graphique » qu’on peut trouver.

Ce système s’inverse quand tu as du succès car ton à valoir est plus important, ton % sur les ventes certainement ainsi que le tirage. Donc à la limite, même en considérant que tu restes dans les standards et que ni l’à valoir ni le % ne soient terribles, si ton tirage est à 1 millions de BD, même si tu n’en vends que la moitié, tu peux te permettre de mettre 3 ans pour faire ta BD (c’est le cas de Delaf pour Gaston par exemple) parce qu’au final, mécaniquement, par le ratio tirage/ventes, ça reste rentable. Mais ça s’applique au 5% de chanceux, « stars de la BD » qui peuvent se permettre de prendre du temps parce qu’ils savent qu’ils vont vendre dans tous les cas, suffisamment pour en vivre même si les conditions de départ de l’à valoir et du % sont dans la norme.

Il y a quand même pas mal de paramètres intrinsèques à l'auteur (sa vitesse d'exécution, sa notoriété, etc...) et aussi extérieurs (tirage, négociation avec l'éditeur, etc...) qui rentrent en ligne de compte pour définir de "combien gagne un auteur". C'est bien pour ça que c'est un sujet tabou et que les rares auteurs et éditeurs présents sur le forum bottent en touche quand on aborde ce sujet...

Mais en gros, pour vivre de la BD, soit tu dessines vite (et si possible bien) pour produire un max dans un temps court, soit tu deviens un auteur à succès. Si tu cumules les deux, alors c’est Jackpot.
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede HervB » 22/01/2024 08:23

zxcvbnm a écrit:C'est très réducteur comme réponse.

Tout à fait. Mais je n'avais pas le courage de pondre un pavé expliquant en détail le système de rémunération. Tu l'as fait, et je suis d'accord avec toi. Après, tu ne réponds pas exactement à la question posée, tu élargis la discussion à la rémunération des auteurs.

Ma réponse reste : La qualité du dessin n'entre pas en ligne de compte dans la rémunération du dessinateur ou de la dessinatrice.

Par contre, effectivement, la "productivité", la notoriété (ce qui se répercutera normalement sur le volume des ventes) qui permet de passer de 8% à 10% de droits, sont des éléments qui vont jouer sur la rémunération globale. D'ailleurs, une façon d'augmenter l'à-valoir est de gonfler le tirage (en espérant que les retours ne seront pas trop nombreux, au point de ne pas réussir à passer le point mort). Rappelons que l'à-valoir n'est jamais remboursable, et heureusement vu les ventes moyennes de la plupart des sorties.

Autre point sur lequel il faudrait attirer l'attention, c'est la répartition de ces droits entre scénariste, dessinateur ou dessinatrice, coloriste... Car c'est cet ensemble qu'il faut aussi considérer : on va être mieux rémunéré·e quand on fait tout (par contre, ça va représenter beaucoup plus de travail). Privilégier le N&B à la couleur (ou au lavis) est aussi une façon de travailler plus vite, de baisser les prix de production et donc d'être mieux rémunéré·e à l'arrivée.

Dans la rémunération du dessinateur ou de la dessinatrice, il faudrait aussi considérer la vente des planches originales, des travaux d'illustrations, les interventions en festival, médiathèque ou CDI, etc.

Tout ceci est donc un sujet complexe.
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede tzynn » 22/01/2024 09:54

Olivier_D a écrit:Peut-être que j'ai mal interprété tes posts, et dans ce cas je m'en excuse, mais tu sembles charger la barque du côté de l'éditeur. Or des éditeurs qui ont coulé par suite de mauvaises ventes, ça s'est déjà vu dans la BD.
Comme l'explique Pol, il lui faut des bons vendeurs pour compenser les risques de ceux qui vendent moins.

A mon sens, le vrai souci c'est la quantité de titres avec la volonté de vivre de son art. C'est inconciliable, malgré un marché en bon état, le lectorat ne peut pas suffire à faire vivre autant de gens.


Non je ne charge pas la barque côté éditeurs. Ils font leur job. Parfois ils gagnent, parfois ils perdent, ça fait partie de leur business model. Pour certains le business model se résume maintenant d'ailleurs à inonder le marché grâce à des couts de fabrication qui se sont drastiquement réduit ces 15 dernières années, sans sélection en amont. Si un titre passe, tant mieux, s'il ne passe pas ça n'aura quasi rien couté (un peu de cash aux auteurs à récupérer en droits par la suite et quasi rien en fabrication, ce qui fait un investissement qui est insignifiant par rapport au chiffre d'affaire de l'institution). D'autres font une sélection et taffent sur les livres (et je remercie Paquet par exemple d'éditer Pau qui ne doit pas être un carton absolu).

A côté de cela les éditeurs sont très très bien représentés auprès des gouvernements, il suffit de suivre les posts des auteurs pour s'en rendre compte - je vous renvoie au dernier post de Bajram par exemple. Quant aux éditeurs qui ont pu intégrer leur chaine de distribution, ils touchent sur tous les tableaux et ont une trésorerie gratuite fournie par les libraires. Je ne suis pas du tout inquiet pour eux, il faut aller voir les comptes de Media Participation ou de Glénat par exemple pour s'en rendre compte. Note: les vendeurs qui vont dans les librairies dépendent surtout des distributeurs et bcp moins des éditeurs (et si le distributeur est intégré avec certains éditeurs, le vendeur poussera plus ces livres là).

Je ne suis donc pas dans un mood "éditeurs victimes". Le business peut être très rentable, et je vois de tous petits éditeurs que je connais très bien et qui en vivent d'ailleurs très très confortablement. Il y en a aussi des plus gros qui vont au mur, mais ça ça dépend aussi de leur stratégie business, de leurs réserves de cash et d'un peu de chance.

J'ai bcp discuté avec un auteur qui me disait que son éditrice ne voulait pas travailler avec des distributeurs ni faire elle même de la distribution auprès des libraires, et qu'elle préférait vendait elle-même dans des festivals. Quel salaire va percevoir l'auteur à la fin? c'est faire mourir d'emblée les albums.

Pour ma part, je pense que les éditeurs prennent la place que devraient avoir des coopératives d'auteurs, auteurs qui sous-traiteraient ainsi une partie de leur job à une entité commune. Sauf que les auteurs ne sont pas coordonnés, trop indépendants et pas nécessairement bons gestionnaires pour s'organiser ainsi. Quand ils n'arrivent même pas à coordonner 2 groupes qui doivent les représenter aux réunions au gouvernement, je me demande s'il faut en rire ou en pleurer. Donc l'éditeur est quelque part devenu la partie business qui manque aux auteurs.

Je vous mets une image de Xavier Gorce sur les libraires, parce que je pense qu'elle peut aussi s'appliquer à certains éditeurs :-D

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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede pol » 22/01/2024 10:54

Je vais me permettre une précision.
Distributeur - structure qui gère les flux physiques des livres. conditionnement, expédition, retours, stockage...
Diffuseur - structure qui gère la partie commerciale des livres. représentants, enregistrement des références, diffusion des informations, négociations des conditions auprès des points de ventes...

Il y a souvent confusion entre des deux entités.
Un éditeur possède parfois sa structure de diffusion, plus rarement (en tout cas chez les gros) celle de distribution, car plus lourde en logistique. Posséder la première, c'est avoir une équipe commerciale totalement dédiée à son catalogue, une force de vente qui cible exactement ce qui est décidé, sans intermédiaire. Et une charge financière moins lourde, mais encore faut-il générer suffisamment de CA pour pouvoir assumer les frais, car malgré tout, il y a des frais à engager en amont.
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede zxcvbnm » 22/01/2024 12:11

Autre point sur lequel il faudrait attirer l'attention, c'est la répartition de ces droits entre scénariste, dessinateur ou dessinatrice, coloriste... Car c'est cet ensemble qu'il faut aussi considérer


Tout à fait. Ce qui fait encore baisser la rémunération individuelle.

Dans la rémunération du dessinateur ou de la dessinatrice, il faudrait aussi considérer la vente des planches originales, des travaux d'illustrations, les interventions en festival, médiathèque ou CDI, etc.


Sur ce point je ne parlerai pas de "rémunération" car en théorie, l'auteur n'a pas à aller mendier des interventions dans les écoles ou vendre ses planches originales pour vivre. Cela devrait être un choix, un bonus en quelque sorte si le desssinateur veut mettre du beurre dans ses épinards. Tu me diras que c'est toujours un choix, certes mais un peu (beaucoup) contraint à l'heure actuelle. En théorie, l'auteur devrait pouvoir vivre de son seul travail éditorial, sans dilapider son temps ailleurs et à vendre ses originaux.

C'est donc bien pour pallier à une certaine défaillance du système et des contrats scandaleux que proposent les éditeurs que les auteurs en sont réduits à celà. Ce n'est pas normal à mon sens. (par contre cela reste un choix initial de l'auteur d'accepter des conditions de merde dans son contrat qui l'oblige à tout ça ensuite, tant pis pour lui)

Tout ceci est donc un sujet complexe.


Tout à fait

tzynn à écrit: Pour certains le business model se résume maintenant d'ailleurs à inonder le marché grâce à des couts de fabrication qui se sont drastiquement réduit ces 15 dernières années, sans sélection en amont. Si un titre passe, tant mieux, s'il ne passe pas ça n'aura quasi rien couté (un peu de cash aux auteurs à récupérer en droits par la suite et quasi rien en fabrication, ce qui fait un investissement qui est insignifiant par rapport au chiffre d'affaire de l'institution).

(...)

les auteurs ne sont pas coordonnés, trop indépendants et pas nécessairement bons gestionnaires pour s'organiser ainsi. Quand ils n'arrivent même pas à coordonner 2 groupes qui doivent les représenter aux réunions au gouvernement, je me demande s'il faut en rire ou en pleurer.


Tout à fait. Je n'arrête pas de le dire mais visiblement ça passe mieux quand c'est toi.
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede HervB » 22/01/2024 19:09

zxcvbnm a écrit:Sur ce point je ne parlerai pas de "rémunération" car en théorie, l'auteur n'a pas à aller mendier des interventions dans les écoles ou vendre ses planches originales pour vivre. Cela devrait être un choix, un bonus en quelque sorte si le desssinateur veut mettre du beurre dans ses épinards. Tu me diras que c'est toujours un choix, certes mais un peu (beaucoup) contraint à l'heure actuelle. En théorie, l'auteur devrait pouvoir vivre de son seul travail éditorial, sans dilapider son temps ailleurs et à vendre ses originaux.


C'est un point qui peut se discuter. Que doit-on inclure dans les montants gagnés pour pouvoir vivre de son art ?

Après, cette histoire de planches originales, ça ne représente de belles sommes que pour les personnes les plus connues, pas les autres, justement celles qui ont le plus de mal à vivre de la BD. Et avec le numérique qui s'impose de plus en plus à toutes les étapes de la création, tout le monde n'a pas de belles planches papier à vendre (d'où l'arnaque des NFT).
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede zxcvbnm » 22/01/2024 19:46

C'est un point qui peut se discuter. Que doit-on inclure dans les montants gagnés pour pouvoir vivre de son art ?


En fait, comme je l'ai expliqué, je fais le distingo entre toutes les activités que peut faire un auteur en dehors de la réalisation de ses BD et son travail éditorial (donc la création de ses BD)

Quand bien même les auteurs pourraient vivre de leur art, rien qu'en produisant des BD, rien ne les a jamais empêché d'aller monnayer leurs talents ailleurs (en intervention, en pub, conférence, etc...). Là dessus on est d'accord, tout ce qui est bon à prendre doit être pris. Le souci selon moi, c'est que ces activités hors réalisation BD devraient rester marginales. Or, c'est l'inverse qui se produit aujourd'hui. Et cela créé un déséquilibre dans le travail initial qui est, en théorie de pondre des BD.

Les moins connus vont courrir le cachet à droite à gauche pour compenser ce qu'ils ne gagnent pas avec leur BD. Les plus connus, vont exploiter leur notoriété pour vendre des tas de produits dérivés parce qu'au final ça va plus vite de faire rentrer du cash que par la réalisation d'un album. (Exemple, Marini, Walthéry, etc...)

Résultat? On a de plus en plus d'auteurs qui font autre chose que de réaliser des BD parce que l'activité BD seule n'est plus rentable (ou quand elle l'est, c'est que l'auteur peut prendre le temps de réaliser ses BD ET de faire des trucs à côté qui lui rapportent vite fait bien fait du pognon. Voir mon exemple avec Marini). C'est quand même un comble.

C'est comme si on demandait au garagiste du village de s'occuper aussi de la réparation des vélos et qu'en même temps il fasse taxi à l'occasion. Sans vouloir enfermer les gens dans des cases, soit tu es garagiste, soit tu es réparateur de vélos, soit tu es taxi. Pour les dessinateurs de BD c'est pareil. A trop se disperser pour pouvoir bouffer, au final ils n'arrivent pas à se construire une "carrière" comme avant parce qu'ils ne sont pas assez productifs, pris par des trucs à court terme pour ramener du cash, mais activités chronophages au détriment de leur travail premier: faire de la BD.

Comme je le disais aussi, faire une intervention dans une école, vendre une planche originale, etc... Cela devrait être occasionnel pour sortir de sa routine, voir du monde ou compenser un coup dur de la vie. Mais là c'est devenu quasi la norme. C'est "fais ta BD avec les clopinettes qu'on te donne et croise les doigts qu'elle soit un succès, sinon démmerde toi autrement". Les éditeurs se reposent trop, pour ne pas dire profitent de cette servitude mentale volontaire quasi masochiste des auteurs d'aujourd'hui prêts à tous ces sacrifices pour se faire publier. C'est dingue à mes yeux. Ce pourquoi j'ai peu d'empathie pour les auteurs qui créent eux mêmes les conditions de leur malheur.

Comme le disait Tzyn, ça ne marche pas, l'éditeur s'en fout un peu, ça ne lui a pas coûté cher d'essayer. (D'où la surpoduction). Si ça cartonne, il a alors de toute façon assez de fric pour bien payer l'auteur qui a ramené ce fric par son propre travail. Donc on est aujourd'hui dans un système qui fait peser tous les risques sur l'auteur. Ca marche pas, c'est de ta faute. Ca marche, ben avec le fric que tu m'as ramené, je vais te payer correctement. Facile! Même logique qu'un patron qui engage un commercial en lui disant tu as 500 euros de fixe et 10% sur les ventes que tu rapportes, sachant que tu dois rapporter au minimum 15 000 euros/mois sinon je te vire. En fait, le patron ne prend aucun risque et c'est le commercial qui finance son propre salaire annuel dès le premier mois! Autant dire que le commercial ne coûte rien à l'entreprise. C'est la même chose en édition.

Et comme dit plus haut, les 3/4 des BD ne s'écoulent pas à plus de 10 000 exemplaires, ça veut dire que les auteurs ont plus souvent des clopinettes comme résultat que le best seller attendu. Et donc ils sont obligés d'aller faire des activités annexes pour vivre. Et on rentre dans un cercle vicieux où l'on passe plus de temps à s'occuper de ces annexes, qu'on soit auteur connu ou non, qu'à faire son métier de base. Pas normal.

Après se pose une autre question qui déchaine les passions aussi qui est de se demander, pourquoi les auteurs acceptent de telles conditions de merde, de faire un boulot qui ne les fait pas vivre, etc? A mon avis, il y a une grosse part d'égo là dedans, de "passion" et aussi d'espoirs (d'être le prochain "best seller") dont profitent les éditeurs au détriment des auteurs en jouant simultanément sur leur égo et leur naïveté. Parce que si je tire à boulets rouges sur les éditeurs, il y a aussi beaucoup à dire sur les auteurs...
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede HervB » 22/01/2024 23:18

On est tout à fait d'accord. Ce soucis n'est d'ailleurs pas que francophone. Dans la BD asiatique, ce problème de vivre de ses BD se pose un peu dans les mêmes conditions (hors Japon qui a son propre système bien rodé et qui réussi plus ou moins à évoluer avec le développement du numérique).
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede zxcvbnm » 25/01/2024 08:46

J'avoue que je ne sais pas trop comment ça se passe pour les auteurss asiatiques, mais je te crois bien volontiers. Et à vrai dire, je ne suis hélas, pas étonné. :|
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede nexus4 » 04/02/2024 15:00

Question existentielle.
Dans les spin-of (dans l'univers de) type Incal ou Thorgal par exemple, les créateurs originaux qui ne sont pas du tout intervenus sur l'album ou la série touchent quel pourcentage ? Et surtout, sur la part de qui ? :D Les auteurs ou les éditeurs ? (j'ai ma petite idée :siffle: )

Donc exemple concret, quand Frissen et Sécher font un Méta-Baron, quel % touchent Jodo et madame Giraud ?
(et donc, sur la part de qui ?)
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede fanche » 04/02/2024 19:33

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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede klorophylle 34 » 06/02/2024 13:36

La bd explose niveau prix, il faut l'admettre et les chiffres ont leurs fait dire ce qu'on veux bien qu'ils disent ( coût du papier, transport, ect....).
Je rejoins Tzyn, beaucoup d'excuses bidons pour justifier les hausses, c'est un peu le syndrome Ukraine ( ou on tout à coup vu que le pays était le supermarché du monde et que vu la guerre ben tout allait augmenter!).

ça me fait penser à Semic qui vers la fin augmentait tous les six mois ces prix avec l'excuse du coup du papier et comme le dit si bien Tzyn un petit mot pour t'expliquer que dans leurs grande bonté, eux augmentait moins que la logique ( tirer des larmes au lecteur devant ce si beau geste).

A un moment faut rester réaliste, quand le prix de la bd augmente, tout le monde en tire profit ( hormis les auteurs), arrêtez la fausse philantropie et de nous faire croire que vous vous sacrifiez, c'est la loi du commerce, point barre.

Quand tout arrivera au max, beaucoup vont vite se rendre compte que la vache à lait ( le lecteur) sera vide et pleureront sur la triste descente aux enfers du monde de la bd.
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede zxcvbnm » 06/02/2024 13:47

Et encore, une BD c'est quand même du beau papier, de la couleur, un grand format, une couverture cartonnée, etc... Ca peut se comprendre dira t-on.

Je te laisse donc imaginer les marges énormes pour tout ce qui est littérature pure (roman, roman jeunesse, etc...). Format plus petit, papier pas extra, que du noir et blanc et du texte, couverture souple, etc.. (parfois il y a des illus, mais c'est du monochrome). L'auteur lui, par contre, est aussi mal payé qu'en BD mais le prix de revient du bouquin c'est que dalle.

Et pourtant, si tu regardes bien, les romans jeunesse par exemple, se vendent souvent à minima aussi chers, voire plus chers qu'une BD! Pas étonnant que ça se développe à vitesse grand V, c'est bien plus rentable que la BD. (en plus les dernières études montrent qu'en général, c'est majoritairement un public féminin qui, une fois avoir lu des BD jusqu'à leur 8-10 ans, passe directement aux romans jeunesse, quand les garçons eux, ont plutôt tendance à continuer sur de la BD pendant leur adolescence et vie de jeunes adultes)
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Re: C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition

Messagede toine74 » 06/02/2024 14:20

Juste un rappel : la rémunération des auteurs étant un pourcentage (hors-taxe) du prix de vente, leur revenu (théorique, il faut que le livre se vende évidemment) augmente mécaniquement avec l'augmentation de ce dernier. Idem avec les avances, qui sont calculées, entre autre, en fonction des ventes futures/potententielles.
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