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C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition - 2010-2021

Pour discuter de tous les sujets généraux autour de la bande dessinée, des libraires, des éditeurs et des auteurs

Re: C'est la crise ?

Messagede yannzeman » 03/06/2018 14:39

Message précédent :
Nirm a écrit:
yannzeman a écrit:Je vais poser une question con, mais tant pis :

Est-ce que la solution, pour les auteurs, ne serait pas de devenir salariés des maisons d'édition ?
Bien sur, ne seraient salariés que les auteurs rentables, mais ce serait, au moins pour cette catégorie là, l'assurance d'un salaire fixe minimum décent et pérenne.

Donc en gros... Pour que les auteurs gagnent mieux leur vie, tu proposes qu'ils deviennent salariés des maisons d'éditions à la condition qu'ils vendent bien et gagnent donc déjà bien leurs vies.

Et pour les autres, ben qu'ils se débrouillent...

Avec pour principe :
- que les éditeurs ne proposent que de la qualité.
- que les auteurs abandonnent leurs droits d'auteurs parce que les séries à 20 tomes n'existent plus.

Du coup ta "solution" :
- elle résout quel problème ?
- c'est quoi un auteur "rentable" ? Rentable pour qui ?
- "meilleur" c'est quoi ?


Petite précision, d'abord :
quand j'ai écrit "droits d'auteur", je ne pensais pas à la définition traditionnelle des droits d'auteur, mais à la liberté des auteurs d'écrire/dessiner ce qu'ils veulent ; quand j'ai validé mon poste, j'ai hésité à modifier ce passage, pour éviter toute confusion, mais j'ai renoncé.
Parce que cela pourrait aussi être une possibilité :
Que les auteurs désirant gagner en sécurité financière renoncent aux droits d'auteurs à condition de pouvoir signer un CDI classique, avec tous les avantages du salariat (pour emprunter, louer un logement, congés payés,...). Après tout, des millions de salariés sont dans ce cas, même ceux produisant des oeuvres de l'esprit.

Donc ma proposition résoudrait le problème de bon nombres d'auteurs, même gagnant correctement leur vie, qui ont du mal à obtenir un prêt pour acheter un bien immobilier, par exemple. Ce n'est pas un détail, le salariat confère des avantages, des vrais.
Et pouvoir oeuvrer dans un certain confort matériel et de l'esprit (sans la peur du lendemain) est tout de même un plus, dans la vie d'un auteur. J'ai eu l'occasion d'écrire qu'un auteur doit avoir faim pour être créatif, mais dans la durée, il faut aussi qu'il puisse se sentir en sécurité, sinon il finira par arrêter la BD.

Un auteur rentable ?
Mais c'est à chaque maison d'édition de le définir.
Une grosse structure souhaitera des scenaristes qui vendent beaucoup avec des dessinateurs gros vendeurs aussi. Ils sont bien payés, mais rapportent gros à la maison d'édition.
Une petite structure pourra salarier des auteurs peut-être moins vendeurs, mais moins chers aussi, débutants d'avenir.

Donc en gros... Pour que les auteurs gagnent mieux leur vie, tu proposes qu'ils deviennent salariés des maisons d'éditions à la condition qu'ils vendent bien et gagnent donc déjà bien leurs vies.
Et pour les autres, ben qu'ils se débrouillent..


A en croire les auteurs qui s'expriment, même les gros vendeurs ont du mal à s'y retrouver, dans la BD d'aujourd'hui, victime de surproduction. La surproduction noie leurs oeuvres dans un océan de médiocrité, et diminue leurs revenus.
Séparer le bon grain de l'ivraie, en salariant les meilleurs (vendeurs) et en laissant aux autres la possibilité de l'édition amateur/à compte d'auteur, ça ne semble une possibilité intéressante (pour les auteurs et les lecteurs).

Que les moins bons se débrouillent ?
Oui, la BD n'est pas une oeuvre caritative, c'est un commerce (ça a déjà été débattu sur ce site, on peut y revenir...).
Les emplois que ce milieu génère ne sont pas plus importants que ceux des autres milieux (la sécurité, la santé, l'alimentation, les transports, les télécommunications,...), qui sont contraints par les lois du marché.
Personne n'a mis un pistolet sur la tempe des auteurs de BD pour les obliger à produire de la BD.

J'essaye juste de proposer des solutions, pour stabiliser un milieu qui me semble bien malmené.
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Re: C'est la crise ?

Messagede nexus4 » 03/06/2018 16:12

thyuig a écrit:C'est surtout marrant de voir que certains préconisent une solution que les Maisons d'édition n'auraient aucun intérêt à accepter : payer plus cher un auteur pour le même boulot alors même que toute leur économie repose sur un produit qu'elle achètent très peu chers et pour lequel elles ne sont pas obligé d'investir énormément ! Sûr que c'est une solution qu'elles vont s'empresser d'accepter ! :fant2:

Moi, moi ! Si on paye bien les auteurs, on est obligé de choisir les projets, on vire 80% des daubes inutiles qui encombrent les étals et les lecteurs, vache à lait, se reporteront sur la production existante, de qualité. On s'en tire par le haut. On éduque le bon peuple, on résorbe la surproduction, et on paye les auteurs décemment. :bravo:

Ben quoi, c'est imparable. J'aime quand un plan se déroule sans accrocs.
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Re: C'est la crise ?

Messagede LeMoineFou » 03/06/2018 16:20

Ou alors, on accroche un enfant en haut d'un immeuble, et l'auteur qui le sauve est publié. :D
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Re: C'est la crise ?

Messagede Lapin Moutarde » 03/06/2018 18:06

nexus4 a écrit: Si on paye bien les auteurs, on est obligé de choisir les projets, on vire 80% des daubes inutiles qui encombrent les étals et les lecteurs, vache à lait, se reporteront sur la production existante, de qualité. On s'en tire par le haut. On éduque le bon peuple, on résorbe la surproduction, et on paye les auteurs décemment. :bravo:

Et qui décidera ce qui est de la daube ou pas? qui décidera ce qui doit partir au broyeur?
Je pense que la seule solution pour que les auteurs gagnent bien leur vie est de s'affranchir des éditeurs qui leur font signer des contrats qui sont largement défavorable.
Aujourd'hui, les éditeurs paient 4000€ pour faire un album qui va prendre 1 an à leurs auteurs.
Qui réussi à vivre avec 4000€/an? j'aimerais bien le savoir ! j'ai juste envie de rigoler ! [:my name snake:2]
L'avenir passera forcement par le financement participatif de type ULULE ou SANDAWE.
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Re: C'est la crise ?

Messagede nexus4 » 03/06/2018 19:08

Lapin Moutarde a écrit:Et qui décidera ce qui est de la daube ou pas? qui décidera ce qui doit partir au broyeur?

Ben moi pourquoi ? :D

On a déjà deux fois la discussion, trois ce serait de la gourmandise.

Plus sérieusesment, à un moment donné il faut réduire la voilure et recommencer a faire correctement son travail.

Le lombard l'a fait, Ankama l'a fait.

(*) ou alors c'est l'ingénieur systèmes qui fait régner la terreur pour faire croire qu'il est indispensable, ça s'est vu. :D
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Re: C'est la crise ?

Messagede Olaf Le Bou » 03/06/2018 19:22

réduire la voilure est malheureusement beaucoup plus facile que d'acquérir le discernement nécessaire pour sélectionner les projets en amont... j'ai bien peur qu'une diminution des sorties ne s'accompagne pas nécessairement d'une augmentation de la qualité.
Prenez un cercle, caressez-le, il deviendra vicieux

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Re: C'est la crise ?

Messagede Lapin Moutarde » 03/06/2018 22:36

Olaf Le Bou a écrit: j'ai bien peur qu'une diminution des sorties ne s'accompagne pas nécessairement d'une augmentation de la qualité.

pas faux, et en plus , il en faut pour tous les goûts, donc, dire qu'il faut réduire la production n'a pas vraiment de sens ! ça correspond à une volonté des auteurs de s'exprimer et de raconter des histoires qui leurs tiennent à coeur.
De toutes les façons, malgré la surproduction, on voit bien que les éditeurs signent beaucoup moins de projets qu'avant.
C'est ce qui explique le succès de plateforme comme SANDAWE.
Il suffit d'avoir un projet Bd, qui selon les éditeurs n'est plus vraiment dans l'air du temps, on vous envoie bouler.
ils ne veulent plus prendre de risques, c'est pour ça qu'aujourd'hui, il est si difficile de sortir de la masse.
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Re: C'est la crise ?

Messagede tzynn » 04/06/2018 06:51

Lapin Moutarde a écrit:
Olaf Le Bou a écrit: j'ai bien peur qu'une diminution des sorties ne s'accompagne pas nécessairement d'une augmentation de la qualité.

pas faux, et en plus , il en faut pour tous les goûts, donc, dire qu'il faut réduire la production n'a pas vraiment de sens ! ça correspond à une volonté des auteurs de s'exprimer et de raconter des histoires qui leurs tiennent à coeur.
De toutes les façons, malgré la surproduction, on voit bien que les éditeurs signent beaucoup moins de projets qu'avant.
C'est ce qui explique le succès de plateforme comme SANDAWE.
Il suffit d'avoir un projet Bd, qui selon les éditeurs n'est plus vraiment dans l'air du temps, on vous envoie bouler.
ils ne veulent plus prendre de risques, c'est pour ça qu'aujourd'hui, il est si difficile de sortir de la masse.


Mouais. Il n’y a pas eu 25 tops projets chez Sandawe. Même pas sur qu’il y en ai eu 5. Et pour les quelques bons, comme pour Sara Lone, les auteurs préfèrent ne pas continuer par là. Le souci de Sandawe, c’est qu’ils jouent avec l’argent des backers mais se gardent tous les droits si ça fonctionne. Dès lors ils ne sélectionnent rien, et à la limite n’ont pas besoin d’essayer de vendre la bd une fois éditée. Si c’était si bien, tous les auteurs iraient là, mais ce n’est pas le cas.

Je ne vois pas un grand avenir à Sandawe s’ils ne changent pas certains fondamentaux dans leurs principes, et finiront comme MyMajorCompany.
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Re: C'est la crise ?

Messagede pabelbaba » 04/06/2018 07:26

Et encore, Mymajorcompany a eu un succès. :D

Sinon on ne parle pas de Dargaud, mais étonnamment, c'est le seul éditeur à donner l'impression de suivre ses BD, d'en faire la promo et de leur donner de la visibilitè. Résultats, se sont les seuls à nous sortir des BD, hors reprises, qu'ils tirent à 100.000ex ou presque (Vieux Fourneaux, Undertaker, Thomas Pesquet).

Ce que Glénat, Delcourt ou Soleil ne font plus et préfèrent sortir une BD par jour dans l'anonymat le plus total.
Mais à devoir choisir entre la peur du vide et la nausée des trottoirs... j'aurais sans doute fait comme eux.

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Re: C'est la crise ?

Messagede yannzeman » 04/06/2018 13:46

Lapin Moutarde a écrit:
Olaf Le Bou a écrit: j'ai bien peur qu'une diminution des sorties ne s'accompagne pas nécessairement d'une augmentation de la qualité.

pas faux, et en plus , il en faut pour tous les goûts, donc, dire qu'il faut réduire la production n'a pas vraiment de sens ! ça correspond à une volonté des auteurs de s'exprimer et de raconter des histoires qui leurs tiennent à coeur.


Si ça a du sens, car la prolifération des projets sans avenir, c'est mortifère pour les auteurs qui, du coup, n'arrivent pas à vivre de leur art.

Dans un tout autre milieu, celui de l'élevage de mouton, la Nouvelle-Zélande a connu une crise il y a quelques années ; la corporation a perdu énormément d'éleveurs, mais ceux qui sont restés se sont organisés en une sorte de coopérative très puissante, gérée comme une entreprise du CAC40, et depuis, les éleveurs gagnent très bien leur vie, proposent des produits de qualité (pas d'élevage de masse, dans des hangars, des moutons dans les prairies) et dominent le marché mondial en imposant leur prix.

je sais que l'image va faire hurler (ou amuser), mais quand on maitrise la production, en proposant des produits de qualité répondant aux besoins de la demande, on peut s'en sortir.

la BD ne propose plus une offre "à bas cout" populaire, mais noie le marché de BD moyennes ou élitistes à prix très élevé, rédibitoire pour les plus jeunes.
La seule solution, pour ce marché de niche du divertissement, c'est :
- soit développer à nouveau une offre à bas cout (couverture souple) produite rapidement (pas d'attente de 2 ans entre 2 albums) pour retrouver un lectorat de masse,
- soit proposer une offre top qualité, resserrée (en volume) pour justifier le prix exorbitant d'une BD actuelle.
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Re: C'est la crise ?

Messagede Thierry_2 » 04/06/2018 14:00

tzynn a écrit:
Lapin Moutarde a écrit:
Olaf Le Bou a écrit: j'ai bien peur qu'une diminution des sorties ne s'accompagne pas nécessairement d'une augmentation de la qualité.

pas faux, et en plus , il en faut pour tous les goûts, donc, dire qu'il faut réduire la production n'a pas vraiment de sens ! ça correspond à une volonté des auteurs de s'exprimer et de raconter des histoires qui leurs tiennent à coeur.
De toutes les façons, malgré la surproduction, on voit bien que les éditeurs signent beaucoup moins de projets qu'avant.
C'est ce qui explique le succès de plateforme comme SANDAWE.
Il suffit d'avoir un projet Bd, qui selon les éditeurs n'est plus vraiment dans l'air du temps, on vous envoie bouler.
ils ne veulent plus prendre de risques, c'est pour ça qu'aujourd'hui, il est si difficile de sortir de la masse.


Mouais. Il n’y a pas eu 25 tops projets chez Sandawe. Même pas sur qu’il y en ai eu 5. Et pour les quelques bons, comme pour Sara Lone, les auteurs préfèrent ne pas continuer par là. Le souci de Sandawe, c’est qu’ils jouent avec l’argent des backers mais se gardent tous les droits si ça fonctionne. Dès lors ils ne sélectionnent rien, et à la limite n’ont pas besoin d’essayer de vendre la bd une fois éditée. Si c’était si bien, tous les auteurs iraient là, mais ce n’est pas le cas.

Je ne vois pas un grand avenir à Sandawe s’ils ne changent pas certains fondamentaux dans leurs principes, et finiront comme MyMajorCompany.

en passant, j'ai vu plusieurs sandawe en solderie à 2.5 EUR dans la superette de mon quartier.
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Re: C'est la crise ?

Messagede Thierry_2 » 04/06/2018 14:13

yannzeman a écrit:
Lapin Moutarde a écrit:
Olaf Le Bou a écrit: j'ai bien peur qu'une diminution des sorties ne s'accompagne pas nécessairement d'une augmentation de la qualité.

pas faux, et en plus , il en faut pour tous les goûts, donc, dire qu'il faut réduire la production n'a pas vraiment de sens ! ça correspond à une volonté des auteurs de s'exprimer et de raconter des histoires qui leurs tiennent à coeur.


Si ça a du sens, car la prolifération des projets sans avenir, c'est mortifère pour les auteurs qui, du coup, n'arrivent pas à vivre de leur art.

Dans un tout autre milieu, celui de l'élevage de mouton, la Nouvelle-Zélande a connu une crise il y a quelques années ; la corporation a perdu énormément d'éleveurs, mais ceux qui sont restés se sont organisés en une sorte de coopérative très puissante, gérée comme une entreprise du CAC40, et depuis, les éleveurs gagnent très bien leur vie, proposent des produits de qualité (pas d'élevage de masse, dans des hangars, des moutons dans les prairies) et dominent le marché mondial en imposant leur prix.

je sais que l'image va faire hurler (ou amuser), mais quand on maitrise la production, en proposant des produits de qualité répondant aux besoins de la demande, on peut s'en sortir.

la BD ne propose plus une offre "à bas cout" populaire, mais noie le marché de BD moyennes ou élitistes à prix très élevé, rédibitoire pour les plus jeunes.
La seule solution, pour ce marché de niche du divertissement, c'est :
- soit développer à nouveau une offre à bas cout (couverture souple) produite rapidement (pas d'attente de 2 ans entre 2 albums) pour retrouver un lectorat de masse,
- soit proposer une offre top qualité, resserrée (en volume) pour justifier le prix exorbitant d'une BD actuelle.

le problème est que l'équation qui fait qu'une nouveauté fonctionne (ou pas) est loin d'être évidente.
Parmi les grands succès actuels, nombreux n'ont pas connu le succès directement, mais il s'est construit au fur et à mesure.
XIII n'a pas décollé avant le tome 5.
Les débuts de Titeuf ont été laborieux. Lanfeust n'a pas été un triomphe immédiat. Il a fallu plusieurs tomes pour que cela marche vraiment. Et la multiplication des séries dérivées n'a pas été une garantie de succès. Il me semble que Delcourt avait envisagé d'arrêter DCDC après quelques tomes pour cause de mévente.
Un succès comme Les Vieux Fourneaux relève de l'anomalie absolue. Mais jusqu'à quel point le succès n'est-il pas une anomalie ? Sur le papier, une série avec des vieux anarchistes râleurs n'a rien d'un triomphe assuré.
En fait, il est plus facile de vendre une bouse ultra-calibrée à la durée de vie limitée (au mieux) à quelques années (je doute qu'on ait un jour droit à une intégrale patrimoniale des Blondes ou des Lapins Crétins) que d'investir sur une oeuvre sur le long terme. La qualité est une caractéristique secondaire si on considère que le but premier de l'éditeur est commercial.
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Re: C'est la crise ?

Messagede yannzeman » 04/06/2018 14:24

Thierry_2 a écrit:le problème est que l'équation qui fait qu'une nouveauté fonctionne (ou pas) est loin d'être évidente.
Parmi les grands succès actuels, nombreux n'ont pas connu le succès directement, mais il s'est construit au fur et à mesure.
XIII n'a pas décollé avant le tome 5.
Les débuts de Titeuf ont été laborieux. Lanfeust n'a pas été un triomphe immédiat. Il a fallu plusieurs tomes pour que cela marche vraiment. Et la multiplication des séries dérivées n'a pas été une garantie de succès. Il me semble que Delcourt avait envisagé d'arrêter DCDC après quelques tomes pour cause de mévente.
Un succès comme Les Vieux Fourneaux relève de l'anomalie absolue. Mais jusqu'à quel point le succès n'est-il pas une anomalie ? Sur le papier, une série avec des vieux anarchistes râleurs n'a rien d'un triomphe assuré.
En fait, il est plus facile de vendre une bouse ultra-calibrée à la durée de vie limitée (au mieux) à quelques années (je doute qu'on ait un jour droit à une intégrale patrimoniale des Blondes ou des Lapins Crétins) que d'investir sur une oeuvre sur le long terme. La qualité est une caractéristique secondaire si on considère que le but premier de l'éditeur est commercial.


Oui oui, bien sur, la spécificité de la BD (et des arts en général), c'est la dimension artistique des oeuvres, qui fait qu'on aura beau choisir le meilleur scenariste, le faire travailler avec le meilleur dessinateur, on n'aura pas l'assurance d'un succès.

Et le vrai succès prend souvent du temps pour se construire.
Mais ça, c'est justement le rôle des éditeurs, de porter des talents en devenir quand ils sentent que ça le mérite.

si ces éditeurs choisissent la rentabilité à court terme, tant pis pour eux (et pour nous), mais il ne faut pas qu'ils s'étonnent si leur catalogue ne dure pas dans le temps et qu'ils mettent la clé sous la porte.
Comme dans tous les milieux, il y a des chefs d'entreprises qui choisissent le long terme, parce que c'est leur entreprise et qu'ils y tiennent, et des dirigeants d'entreprise dont ils n'ont que faire et qui veulent une rentabilité à court terme.

Il manque des Dupuis, aujourd'hui...
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Re: C'est la crise ?

Messagede thyuig » 04/06/2018 15:58

La vérité c'est que certains éditeurs se fichent pas mal que leur catalogue ne dure pas, ce qui importe c'est la régularité du flux d'oseille pour un investissement zéro. Quand il y a un succès c'est tout bénéf - quoique je me demande si finalement ça ne les embarrasse pas un peu de devoir ensuite travailler avec une "pointure" - et si ça n'est pas le cas, la somme dérisoire dépensée en amont ne justifie pas qu'on change de modèle.
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Re: C'est la crise ?

Messagede Thierry_2 » 04/06/2018 16:06

yannzeman a écrit:
Thierry_2 a écrit:le problème est que l'équation qui fait qu'une nouveauté fonctionne (ou pas) est loin d'être évidente.
Parmi les grands succès actuels, nombreux n'ont pas connu le succès directement, mais il s'est construit au fur et à mesure.
XIII n'a pas décollé avant le tome 5.
Les débuts de Titeuf ont été laborieux. Lanfeust n'a pas été un triomphe immédiat. Il a fallu plusieurs tomes pour que cela marche vraiment. Et la multiplication des séries dérivées n'a pas été une garantie de succès. Il me semble que Delcourt avait envisagé d'arrêter DCDC après quelques tomes pour cause de mévente.
Un succès comme Les Vieux Fourneaux relève de l'anomalie absolue. Mais jusqu'à quel point le succès n'est-il pas une anomalie ? Sur le papier, une série avec des vieux anarchistes râleurs n'a rien d'un triomphe assuré.
En fait, il est plus facile de vendre une bouse ultra-calibrée à la durée de vie limitée (au mieux) à quelques années (je doute qu'on ait un jour droit à une intégrale patrimoniale des Blondes ou des Lapins Crétins) que d'investir sur une oeuvre sur le long terme. La qualité est une caractéristique secondaire si on considère que le but premier de l'éditeur est commercial.


Oui oui, bien sur, la spécificité de la BD (et des arts en général), c'est la dimension artistique des oeuvres, qui fait qu'on aura beau choisir le meilleur scenariste, le faire travailler avec le meilleur dessinateur, on n'aura pas l'assurance d'un succès.

Et le vrai succès prend souvent du temps pour se construire.
Mais ça, c'est justement le rôle des éditeurs, de porter des talents en devenir quand ils sentent que ça le mérite.

si ces éditeurs choisissent la rentabilité à court terme, tant pis pour eux (et pour nous), mais il ne faut pas qu'ils s'étonnent si leur catalogue ne dure pas dans le temps et qu'ils mettent la clé sous la porte.
Comme dans tous les milieux, il y a des chefs d'entreprises qui choisissent le long terme, parce que c'est leur entreprise et qu'ils y tiennent, et des dirigeants d'entreprise dont ils n'ont que faire et qui veulent une rentabilité à court terme.

Il manque des Dupuis, aujourd'hui...

Tu raisonnes comme si les éditeurs étaient maîtres de leur destin alors que de plus en plus ils ne sont que des rouages de plus grand groupe au sein desquels ils ne représentent pas toujours grand chose. D'autant que beaucoup de titres qui leur servent de vache à lait sont malmenés.
Media Participation multiplie les fours avec les films dérivés de son catalogue BD, il va y avoir un retour de baton dont on ne sera peut-être pas conscient directement. Heureusement que les mangas rapportent mais Naruto et Death Note sont terminés. Les produits calibrés que sont B&M fonctionnent mais ce n'est que de l'exploitation de license. Le parc Spirou ressemble à un quitte ou double (Eurodisney a été un gouffre pendant des années, le Parc Astérix a eu du mal à trouver son point de rentabilité). S'il se plante, ils le recycleront peut-être en parc Blake et Mortimer, mais sans sensations fortes pour ménager les pace makers des lecteurs de B&M.
Delcourt doit une grande partie de son cash à Walking Dead, qui ne durera pas éternellement. Et après ? Le cinéma n'a pas été la manna annoncée.
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Re: C'est la crise ?

Messagede Xavier Guilbert » 04/06/2018 16:14

Il faut relire L'édition sans éditeurs, d'André Schiffrin.
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Re: C'est la crise ?

Messagede tzynn » 04/06/2018 16:15

thyuig a écrit:La vérité c'est que certains éditeurs se fichent pas mal que leur catalogue ne dure pas, ce qui importe c'est la régularité du flux d'oseille pour un investissement zéro. Quand il y a un succès c'est tout bénéf - quoique je me demande si finalement ça ne les embarrasse pas un peu de devoir ensuite travailler avec une "pointure" - et si ça n'est pas le cas, la somme dérisoire dépensée en amont ne justifie pas qu'on change de modèle.


C'est évident. Quand je vois qu'un éditeur de bouquins disait récemment qu'il commençait à faire du bénéfice à 50 exemplaires vendus, le business model n'est pas près de changer.
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Re: C'est la crise ?

Messagede Olaf Le Bou » 04/06/2018 16:16

Thierry_2 a écrit: ils le recycleront peut-être en parc Blake et Mortimer, mais sans sensations fortes pour ménager les pace makers des lecteurs de B&M.


[:kusanagui:6] [:kusanagui:6] :ok:
Prenez un cercle, caressez-le, il deviendra vicieux

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Re: C'est la crise ?

Messagede Thierry_2 » 04/06/2018 16:19

thyuig a écrit:La vérité c'est que certains éditeurs se fichent pas mal que leur catalogue ne dure pas, ce qui importe c'est la régularité du flux d'oseille pour un investissement zéro. Quand il y a un succès c'est tout bénéf - quoique je me demande si finalement ça ne les embarrasse pas un peu de devoir ensuite travailler avec une "pointure" - et si ça n'est pas le cas, la somme dérisoire dépensée en amont ne justifie pas qu'on change de modèle.

ça dépend. Si tu peux travailler avec un Tardi ou un Bilal, tu le laisses faire ce qu'il veut et ça se vend tout seul, avec en deuxième cadeau bonus le prestige de la signature. S'il veut faire tout un livre en gribouillant sur des photos de toiles célèbres, tu t'en fous. Il sera invité par tous les médias, surtout ceux qui ne connaissent rien à la BD, et il y aura bien assez de gogos pour acheter en trouvant soit que c'est brillant, soitque c'est limite du foutage de gueuele, mais c'est quand même de lui.
l'important n'est pas que le livre soit bon, c'est que l'acheteur fasse ce qu'on attend de lui: acheter. Son avis, on s'en tape tant qu'il achète Même si'il pose un signal fort en mettant seulement 4 étoiles sur babelio et un avis très sévère sur le site dédié sur bdgest. Même les 45 pages de critiques sur le dernier bidule, on s'en fout tant que ça vend.
Le mécanisme des séries, qui s'est étendu aux auteurs-marques, c'est qu'on se fout que ce soit bon. On achète le nouveau parce qu'on a acheté les autres. Qui a vendu vendra. Et il faut au moins 5 daubes cosmiques pour permettre une remise en cause du réflexe d'achat.
L'acheteur malin, il n'achète plus de tome 1 parce qu'il attend l'intégrale qui ne manquera pas de sortir que la série sera finie, et il continue les séries qu'il n'aime plus pour compléter le collec'. la preuve qu'il est malin, la série dont il n'a pas acheté le tome 1 alors que le buzz était là, elle est arrêtée faute de ventes.
CQFD
moi, j'achète plus rien, c'est mieux :D
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Thierry_2
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Re: C'est la crise ?

Messagede thyuig » 04/06/2018 16:30

Thierry_2 a écrit:
thyuig a écrit:La vérité c'est que certains éditeurs se fichent pas mal que leur catalogue ne dure pas, ce qui importe c'est la régularité du flux d'oseille pour un investissement zéro. Quand il y a un succès c'est tout bénéf - quoique je me demande si finalement ça ne les embarrasse pas un peu de devoir ensuite travailler avec une "pointure" - et si ça n'est pas le cas, la somme dérisoire dépensée en amont ne justifie pas qu'on change de modèle.

ça dépend. Si tu peux travailler avec un Tardi ou un Bilal, tu le laisses faire ce qu'il veut et ça se vend tout seul, avec en deuxième cadeau bonus le prestige de la signature. S'il veut faire tout un livre en gribouillant sur des photos de toiles célèbres, tu t'en fous. Il sera invité par tous les médias, surtout ceux qui ne connaissent rien à la BD, et il y aura bien assez de gogos pour acheter en trouvant soit que c'est brillant, soitque c'est limite du foutage de gueuele, mais c'est quand même de lui.
l'important n'est pas que le livre soit bon, c'est que l'acheteur fasse ce qu'on attend de lui: acheter. Son avis, on s'en tape tant qu'il achète Même si'il pose un signal fort en mettant seulement 4 étoiles sur babelio et un avis très sévère sur le site dédié sur bdgest. Même les 45 pages de critiques sur le dernier bidule, on s'en fout tant que ça vend.
Le mécanisme des séries, qui s'est étendu aux auteurs-marques, c'est qu'on se fout que ce soit bon. On achète le nouveau parce qu'on a acheté les autres. Qui a vendu vendra. Et il faut au moins 5 daubes cosmiques pour permettre une remise en cause du réflexe d'achat.
L'acheteur malin, il n'achète plus de tome 1 parce qu'il attend l'intégrale qui ne manquera pas de sortir que la série sera finie, et il continue les séries qu'il n'aime plus pour compléter le collec'. la preuve qu'il est malin, la série dont il n'a pas acheté le tome 1 alors que le buzz était là, elle est arrêtée faute de ventes.
CQFD
moi, j'achète plus rien, c'est mieux :D


Ce que je note aussi c'est que ces grands auteurs sont chez Casterman, à la limite chez Dargaud et le reste s'éparpille un peu partout. Ça doit vouloir dire que le business model n'est pas le même pour tous les éditeurs (heureusement !) et qu'il en est aussi qui font pousser leurs poulains chez les autres pour en tirer le fruit une fois bien mûrs. Ils achètent ce que le grand public identifie tout de suite comme de la BD, de la bonne. Pas celle des fans, mais celle qui fait les plateaux TV.
Pour tous les autres, malheureusement, je ne vois pas de solutions autre que, comme le disait justement Nexus, tomber sur Ankama ou un autre que j'ignore pour effectuer à petite échelle un vrai boulot d'auteur dans une relation avec un éditeur. Est-ce suffisant pour vivre ? :?
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Re: C'est la crise ?

Messagede Lapin Moutarde » 04/06/2018 20:04

J'ai l'impression que tout le monde s’accommode du modèle actuel ici , qui comme chacun sait produit de la misère à tour de bras chez ceux qui sont à la base de la création : nos amis les auteurs ! [:bru:3]

Je me demande bien combien de temps encore les auteurs vont accepter ces contrats, si on peut les appeler ainsi..
En plus les leviers de pression sont minces, ils ne peuvent pas faire pression sur les éditeurs puisqu'ils ne sont pas salariés.

L'esclavage moderne, 10/12hjour devant une table à dessin (ou sa tablette Wacom Cyntic,) pour gagner ..le droit de demander à leur conjoint de faire bouillir la marmite.
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