Et si tout le monde avait (un peu) raison?
La crise d'abord elle touche qui?Pas les éditeurs, on le sait ils se portent, pour les gros, plutôt bien.
Elles touchent les acheteurs et les auteurs.
Les éditeurs se servent de ce point là pour ne pas prendre de risque (lancer des trucs qu'ils jugent "casse gueule", s'engager sur des séries plus longues que 2 tomes, payer mieux les auteurs).
Évidemment que
la crise est une histoire de priorités et ce même si l'exemple du smartphone chez les lycéens est mal choisi au possible (je n'en connais pas beaucoup des élèves de 1ère qui peuvent payer seuls leurs forfaits à 30€ mensuels, ceux sont les parents qui casquent, juste après avoir claqué 150€ à Noël pour le dit smartphone).
Et si on parle de priorité, le choix est simple à poser:
Si je veux me faire plaisir (ou faire plaisir à mes enfants/amis/proches)
est-ce que je me dirige vers la BD?À ce niveau,
le "soucis" du prix peut entrer en compte.
15€, oui c'est 2 repas au Fast food du coin, oui c'est 2 tickets de ciné, oui c'est 2 paquets de clopes.
Mais le choix est propre à chacun, critiquable ou pas, il est fait.
De plus oui, 15€ ça reste cher. Car on le sait, quand les finances vont mal ou que l'on pense qu'elles vont mal on rogne d'abord sur ces petits plaisirs.
Bien, mais une fois que la décision "j'achète une BD" est prise, on fait quoi?
On choisit.
Et la l'abondance de titres entre en jeu:
- Je vais dans le truc super connu (Fnac/Cultura/Espace Culutrel du Leclerc/Carrefour du coin) je n'aurai certainement pas le conseil adéquat, j'aurai sous les yeux les "tubes", les valeurs sûres, les "poids lourds" et donc plus de probabilités de l'acheter.
- Je vais dans un librairie spécialisée pour avoir un conseil personnalisé et/ou plus pointu.
Ben faut que les libraires ait pu lire tout ce qu'ils proposent.
Ou au moins une bonne partie pour me conseiller au mieux en fonction de mes goûts, mes envies, mes demandes, ma recherche.
Sauf qu'à moins d'être un habitué (et donc de savoir déjà ce que l'on veut) il ne nous connait pas.
On se heurte donc à un
soucis de mise en avant des produits.
5000 titres par an, c'est 100 titres par semaine... dont 80 de nouveautés...
La cause première de cette mauvaise/défaillante/difficile mise en avant est donc bien pour majorité l'abondance de titres!Mais pourquoi cette abondance?
Parce que les éditeurs sortent plus de choses et que le nombre d'auteurs a explosé aussi. On l'a dit, chiffres et rapports à l'appui, en 8 ans, le nombre titres mis sur le marché a été multiplié par 3,5 (à la louche).
Est-ce que le nombre d'acheteurs (on s'en fout s'ils lisent, ici ce qui intéresse c'est les sous)
a suivi cette courbe?Non. Mais il a quand même augmenté. En tout cas c'est mon point de vue.
Il a dû augmenté, mais comme xof le notait, le lectorat a changé.
Le nouveau lectorat se dirige vers les Mangas, les Comics.
Et les "anciens" sont devenus méfiants, les posts ici le confirment ("j’achète plus de nouvelles séries", "je sélectionne plus", "j'ai plus de place", etc...).
Donc on produit trop? Trop de merde?
Peut être, mais si on dépassait ça pour se demander pourquoi?
Pourquoi les éditeurs produisent autant?Côté éditeurs, la réponse est clair: plus de titres, plus de ventes, plus de ronds (on doit "occuper le terrain" comme c'est souvent dit ici ou ailleurs).
Mais côté auteurs pourquoi assiste-t-on à autant de titres de mecs "qui marchent" sur une courte période?
Pour moi, là encore, la réponse est la même: les ronds.
On le sait, les auteurs ne gagnent pas assez sur
une BD. Autant proposer/accepter des choses tant que les éditeurs ouvrent les vannes, on ne sait pas si demain ça marchera encore (de plus, comme ils ont de longues période sans être édités, ils ont le temps d'avancer sur plusieurs projets).
Alors, et je parle notamment pour les scénaristes, ils multiplient les projets, encore et encore.
Les dessinateurs malgré tout leurs talents doivent avoir des choses à raconter pour vendre.
Donc au final, j'apporte quoi à cette histoire?
Euh, rien, mais en mieux.
Allez, je rêve un peu. demain je gagne le méga truc à l'€milllion, j'achète une imprimerie en France et je monte ma boîte d'édition/distribution.
J'offre des contrats plus lucratifs aux auteurs.
Je vire les conseillers qui "sentent que ça va être la mode cette année faut investir".
Mais en échange je prends moins de projets.
Pas que "des chefs d’œuvre", je sais que mes goûts ne sont pas ceux de tout le monde, je sais aussi qu'ils peuvent être mauvais.
Je choisis des projets sincères, portés par des gens motivés, avec une vraie envie.
J'indexe une part des revenus sur les ventes aussi.
Avec ça, mes auteurs vivent mieux et en gagnant mieux leur vies ont moins besoin de projets.
Parallèlement, je vends moins cher et je sors moins de nouveautés que mes concurrents.
Au final, les libraires ont le temps de lire et parler de mes BD.
Mes BD sont plus vues, donc mieux vendues et donc mes auteurs mieux rémunérées.
Moi, je m'en fous, je ne suis pas là pour contenter des actionnaires et écraser la concurrence, non je suis là pour proposer au public un choix varié, sur des produits bien faits (qu'ils plaisent ou pas) qui donnent envie d'être lus et partagés.
En fait, je rêve que le marché se régule:
Permettre aux créateurs de gagner plus, aux payeurs de payer le "prix juste" et aux vendeurs de proposer des choses qu'ils ont choisi de proposer.
Bon je vais faire ma grille, à plus.