Thierry_2 a écrit:en fait, en étant très cynique, l'idée qu'il n'y ait pas de crise n'est pas si stupide
le marché évolue, le réseau de vente change (concurrence d'enseignes comme la Fnac et internet en tête), modifiant la position du libraire, qui doivent soit s'adapter, soit disparaîre Car si des librairies ferment, d'autres survivent et se développent. Libraire n'est sans doute pas le métier qui permettra de faire fortune, mais il semble être possible de survivre.
Ce qui me gène dans cette discussion, c'est que l'on parle de "la crise" comme si c'était quelque chose de bien identifié. Hors, ce que j'essaie de mettre en avant dans mes propres analyses, c'est qu'il y a "des" crises qui sont très différentes.
Il y a à mon sens une crise d'un certain modèle (le modèle du gros blockbuster populaire) qui est celui qui touche les gros éditeurs (et sur ce plan, 12 bis est gros éditeur, victime de la faillite de ce modèle). La course en avant de la surproduction, ainsi que la paupérisation des auteurs en sont les conséquences directes.
La crise du manga rejoint cette première crise, dans une exploitation à outrance qui ne se pose pas la question de construire son avenir, et qui tient essentiellement avec une poignée de blockbusters, et une dynamique générationnelle dont on ne sait si elle va perdurer. On peut d'ailleurs s'interroger déjà sur la question du segment des comics, qui semble promis à une approche similaire.
Il y a par ailleurs une situation pas terrible du côté des indépendants (proche de la crise), avec l'investissement des gros éditeurs sur le segment, et une forme de perte de la singularité qui leur permettait de bien exister jusqu'ici.
Il y a tout autour de cela une crise de la librairie et de la remise en question des canaux de distribution, face à Amazon en particulier, mais également face à la gestion d'une production sans cesse croissante et des changements dans les modes de consommation et de prescription.
Il y a enfin, pour la bande dessinée, une crise d'identité ou d'image, au choix, du fait de n'avoir pas su faire grandir avec elle un discours qui lui soit adapté, et qui lui permette de regagner des lecteurs. La bande dessinée est quelque part populaire (on a autour de 80% de lecteurs ou anciens lecteurs chez les 15-50 ans, pour toutes les classes d'âge) mais est clairement une pratique de moins en moins investie (avec un taux de lecteur en chute depuis trente ans).
Bref, ce n'est pas "la crise", mais ce sont "les crises" -- sachant qu'à mon sens, une crise est une phase de transition entre deux modèles, et que celle-ci peut être aussi longue que douloureuse.