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C'est la crise ? Auteurs et monde de l'édition - 2010-2021

Pour discuter de tous les sujets généraux autour de la bande dessinée, des libraires, des éditeurs et des auteurs

Re: C'est la crise ?

Messagede JDMorvan » 27/06/2010 12:01

Message précédent :
SOL : Désolé, mais penser ça, c'est presupposer que le lecteur est un bénêt...

Sinon, c'est une chimère de croire que des albums souples et moins chers se vendraient plus. Pour le lecteur "classique", le prix ne compte finalement pas vraiment... Moins que la forme, en fait. Voire même, un livre souple et pas vher peut rebuter le lecteur, lui faire penser qu'il y a un piège. Et il preferera acheter une enière reedition d une serie, avec une nouvelle couv ou un coffret collector.
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Re: C'est la crise ?

Messagede stephane crety » 27/06/2010 12:05

ce n'est pas encore systématique et heureusement !!!pour prendre mon cas (sans égocentrisme, mais parce que c'est un cas que je connais bien :D .), on a signé le t3 d'une série qui est un gauffrage quasi biblique.aucune raison économique ne peut justifier une telle décision, qui d'ailleurs, nous a laissé pantois; nous faisons du mainstream, et nous en acceptons les règles..un mainstream qui ne se vend pas n'a pas de raison d'etre..pour etre lu par papa -maman, je n'ai pas besoin des éditeurs.....
alors plusieurs raisons peuvent expliquer de telles décisions: le fait du prince (il se trouve que souvent, les éditeurs aiment cela, la bd, que ce sont des passionnés...), la volonté de garder sous la main des auteurs ,et pour qu'ils ne frétillent pas avec d'autres éditeurs.(les tuyaux sont vitaux, mais il faut de la matiere pour les remplir...)....etc..

l'évolution numérique ? j'y mise plein d'espoir, et dans mes journées les plus nihilistes, je me dis que l'on va se débarrasser de tous les intermédiaires, et que les auteurs vont etre face à face avec les lecteurs..et puis, quand je redeviens lucide, je me dis que l'éditeur est essentiel dans le cheminement créatif, par son regard extérieur, par plein de choses qui font qu'ils sont, selon moi , stratégiques et importants.
l'evolution numérique est déstabilisant pour tous, et aussi pour les éditeurs( il n'y a qu'a voir comment ils sont tétanisés par ce sujet, a la fois bouée de sauvetage en court terme , mais potentiellement dangereux pour leur survie en tant qu'intermédiaire incontournable.en moyen et long terme...), ne parlons pas des auteurs, qui achoppent sur la rémunération et la forme qu'elle devra prendre.
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Re: C'est la crise ?

Messagede azertyuiop1 » 27/06/2010 12:28

Crise de surproduction, crise économique, crise de création ( mais ne comparez pas aux comics mainstream que je trouve de plus en plus illisibles) quand même essentiellement car quels sont les bandes dessinées qui sortent du lot en cette année 2010 ? En dehors de superbes rééditions du patrimoine ( intégrales Dupuis essentiellement) qu'est-ce que j'ai lu de marquant depuis janvier ? Sur environ 150 bouquins, je reste encore un gros acheteur, je peux faire émerger Gaza 1956 de Sacco, , Essex County,le Clowes, Hair Shirt de McEown,Inside Moebius, j'ai pas tué De Gaulle de Heitz, Logicomix, Lulu femme nu de Davodeau, Quai D'Orsay de Blain et surtout les Collines rouges de Dodo et ben radis qui n'est qu'à 20% une bande dessinée. Ca ne fait pas beaucoup de blockbusters ni de bandes dessinées françaises et encore moins tout public ( tout public ce n'est pas jeunesse c'est pour les petits et les grands , seul Emile Bravo semble dans ce créneau aujourd'hui). Ce que je note depuis des années chez les jeunes scénaristes franco-belges, c'est une qualité d'écriture vraiment très faible, écrit dans un français lourd et pauvre à la fois, sans parler d'une orthographe hallucinante, comme si leur baggage culturel était d'une indigence rare.
Il y a quelques exceptions notables mais avant de trouver des sujets malins apprenez à écrire, la bande dessinée ce n'est pas le cinéma et la qualité linguistique est primordiale, ça me semble la base.
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Re: C'est la crise ?

Messagede el lobo loco » 27/06/2010 12:29

stephane crety a écrit:...et puis, quand je redeviens lucide, je me dis que l'éditeur est essentiel dans le cheminement créatif, par son regard extérieur, par plein de choses qui font qu'ils sont, selon moi , stratégiques et importants...

J'entends souvent ça : un éditeur est indispensable. Outre le fait qu'ils vous rémunèrent en avance (et ce faisant, s'enrichissant eux-mêmes semble-t-il exponentiellement...), que fait-il cet éditeur pour être à ce point nécessaire ?
L'accompagnement créatif ? Vous évoquez la mise en place d'équipe d'auteurs dans la réalisation d'albums. Justement, ce système d'équipe ne permettrait-il pas de ne plus se retrouver seul face à la page blanche, permettant ainsi la discussion, de choisir les meilleures options, ou simplement de prendre du recul ? En gros de vous accompagner entre vous ?
Si les éditeurs avaient la vista sur ce qui marche ou ne marchent pas, ça se saurait, non ? Ils font du marché d'échelle, suiviste avec les succédanés (succès damnés ? :-D ) dont vous parliez. J'ai l'impression qu'un auteur a autant de chance qu'un éditeur de savoir si un bouquin "original" - c'est-à-dire pas une commande - marchera convenablement.
La coopérations entre auteurs, ne serait-ce pas la solution ?
D'ailleurs, la révolution numérique semble pousser les éditeurs à vouloir mordre sur vos revenus, alors, que feront-ils encore pour... vous ? :?:
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Re: C'est la crise ?

Messagede ALCANTE » 27/06/2010 12:46

luc Brunschwig a écrit:A titre personnel (et je pense que c'est assez sain) je n'ai rien contre les locomotives quelqu'en soit la qualité, du moment qu'elles trouvent un lectorat (et qu'elles le satisfassent) tant que ces locomotives permettent de générer l'argent qui permettra de "tenter" des choses plus culottées. Le problème depuis quelques années, c'est que ça ne se passe plus comme ça. Je pense à un éditeur comme Dupuis qui fonctionnait intégralement sur le principe gros auteurs qui permettent le financement de choses plus fragiles. Or, on est passé à des comptes de gestions individualisés pour chaque série. Si une série n'est pas rentable, elle gicle, quelque soit ses qualités. On n'est plus dans un principe global où c'est la moyenne des ventes qui est jugé. Aujourd'hui, tout doit être rentable immédiatement.


Je suis assez d'accord avec ça, à ceci près que c'est encore plus grave: ce n'est pas (plus) la série en elle-même qui doit être rentable, mais bien chaque album de la série !
(et ça ne se limite pas à Dupuis, loin de là).
Et le problème, c'est que les premiers albums qui sont directement rentables, il n'y en a vraiment plus beaucoup. Et qu'un album soit rentable pour l'éditeur n'implique pas qu'il le soit pour les auteurs...
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Re: C'est la crise ?

Messagede JDMorvan » 27/06/2010 13:01

Hmm, sinon, le manga comme les comics sont en crise. Il ne faut pas se leurrer.
Il n'y a pas de pays meilleur que l'autre.

Nos conccurents ne sont pas d'autres éditeurs, ou des BD venues d'autres pays, mais les autres médias de divertissement. Il nous faut TOUS (éditeurs et auteurs) trouver le moyen de lutter contre eux. C'est possible.
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Re: C'est la crise ?

Messagede yodada » 27/06/2010 13:07

Ah non le numérique je n'adhère pas, je suis peut-être une vieille conne mais si c'est ça l'avenir de la BD ça sera sans moi, je l'avais d'ailleurs déjà dit sur un autre topic !
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Re: C'est la crise ?

Messagede stephane crety » 27/06/2010 13:11

le role d'éditeur;
pour etre plus clair et pour éviter les ambiguités, je prendrais comme référence l'édition dite classique.

un éditeur dans l'idéal, c'est un michel laffon, un London, l'editeur de kérouac(dont le nom m'échappe.), de salinger..;un amoureux des livres, un accompagnateur, un homme qui suit , soutient, conseille, etc..gentillement, et parfois brusquement.
je ne suis pas sur (et je pense meme le contraire...) qu'un auteur soit des plus lucides pour juger de son travail. le travail d'auteur est un travail de rencontre, de coordination, d'alliance, d'accompagnement et de parcours.
Si je prends mes distances avec mon éditeur de coeur (alors que j'ai une fidélité de caniche par nature...), c'est parce que , structurellement, ce suivis n'est plus possible, quand le directeur éditorial se doit de gérer 80 auteurs.....
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Re: C'est la crise ?

Messagede el lobo loco » 27/06/2010 13:22

ben je parlais - pour éviter la solitude et le manque de recul - de coopération entre auteurs. ;)
Manifestement même l'éditeur ne fait plus ce boulot-là. Alors, si on exclut le côté financier de la chose (comme ce qui semble se profiler avec le numérique), en quoi reste-t-il -aujourd'hui et pas en "théorie" -indispensable ?
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Re: C'est la crise ?

Messagede stephane crety » 27/06/2010 13:32

el lobo loco a écrit:ben je parlais - pour éviter la solitude et le manque de recul - de coopération entre auteurs. ;)
Manifestement même l'éditeur ne fait plus ce boulot-là. Alors, si on exclut le côté financier de la chose (comme ce qui semble se profiler avec le numérique), en quoi reste-t-il -aujourd'hui et pas en "théorie" -indispensable ?

ben, si je passe mon dimanche devant l'ordinateur aulieu de profiter du temps bestialement beau aujourd'hui, c'est que je me pose la question..;que j'en sois à songer à prendre un agent itou....ca me désespère de voir les éditeurs se réduirent à la portion congrue, à des gestionnaires de flux et de reflux....
je m'accroche à un idéal qui est bien écorné, il faut bien l'avouer....
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Re: C'est la crise ?

Messagede Yoda33 » 27/06/2010 13:33

luc Brunschwig a écrit:Je réponds (avec un peu d'insistance) au lecteur qui disait que le problème est le prix des BD... c'est vrai et c'est faux... je pense personnellement que c'est surtout le rapport qualité/prix qui est problématique, la satisfaction qu'on a retiré de l'album acheté et lu... si tous les albums nous plaçaient sur orbite de plaisir, personne ne se plaindrait du prix...
à part pour en avoir encore une ou plusieurs doses supplémentaires :lol:


D'accord avec toi ! Si à chaque fois qu'on paie 13 euros, l'album est bon, ça les vaut ... c'est 2,5 paquets de clopes :D je dis ça, je ne fume pas :lol: mais bon ...
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Re: C'est la crise ?

Messagede luc Brunschwig » 27/06/2010 13:59

Pour ne parler que de mon exemple (qui comme le disait Stéphane est celui qu'on connait le mieux), j'ai la chance depuis 15 ans de travailler avec le même éditeur dans le regard duquel je me bats pour offrir le meilleur, parce que son exigence à lui me commande d'être au top de ce que moi, je peux faire (ce que j'aurai tendance à faire naturellement, mais croyez-moi, quand vous vous retrouvez face à un éditeur dont l'exigence se limite à être content de vous avoir signé, pour mieux ensuite vous annoncer que vos résultats exigent l'arrêt de votre série qu'il aimait tant, votre exigence à tendance à s'écorner et un dégoût du métier à vous envahir).
Curieusement, mon éditeur est autant là pour me dire ce qui va mal dans ce que je fais, que ce qui va bien (pour à la fois partager un même enthousiasme, savoir qu'il apprécie réellement et toujours la qualité et les subtilités de mon travail et parfois parce qu'en disant ce qu'il a ressenti, mon éditeur me permet de me rendre compte que le message que j'ai envoyé n'est pas exactement celui que je voulais envoyer, même si sur le papier ça avait l'air sympa comme tout).
J'ai aussi eu la chance terrible d'être directeur de collection. J'ai tenté une idée folle qui s'est vautré dans le mur (la collection 32 chez Futuropolis); J'ai eu à cette occasion la chance de bosser de façon parfois un peu rude avec des gens excellents mais que je voulais pousser dans leurs retranchements. Avec l'arrêt de la collection, je me suis senti vraiment merdeux, au point de penser que toutes ces excellentes personnes m'en voulaient de les avoir envoyé dans le mur. J'ai été vraiment agréablement étonné au fil des mois de découvrir que ce qu'ils avaient retenu de notre collaboration auteur-éditeur, c'était justement ce travail d'accompagnement... et qu'ils le regrettaient vraiment pour la plupart... Alors, je pense que c'est de ça dont Stéphane nous parle quand il dit rechercher le regard de son éditeur.
Chose qu'on ne trouve plus guère dans les maisons d'éditions qui sont essentiellement à la recherche de matière pour alimenter le "tuyau" comme il dit, et peu importe la qualité de ce qu'il y a dans le dit "tuyau"...
Et quand le tuyau n'aura plus besoin d'imprimeur (car beaucoup de maison d'édition ne sont plus que ça, des imprimeurs de planches et des gestionnaires)... ben, oui, on pourra se poser la question de l'intérêt de travailler avec ce type d'éditeur.
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Re: C'est la crise ?

Messagede nexus4 » 27/06/2010 14:45

Deux petits graphismes que j'ai fait à partir des données de la base sur l'évolution de la pagination des albums entre 1995 et 2009 (j'ai fait 2007-2008 puis, me lassant, j'ai fait des tranches de 5 ans :P ). J'ai fait des tranches pour que ce soit un peu lisible, regoupant les 44 et 48 pages par exemples, les gens qui rentrent les données dans la bases mélangeant souvent nombre de pages et nombre de planches.
Ne sont comptés que les BD francobelges (sont donc exclus les traduction manga et recueils comics la courbe montant copieusement avec l'arrivée du manga.)

M'enfin grosso modo ca donne une idée de l'évolution à defaut d'être parfaitement exacte.

Evolution du marché en nombre de planches par albums :
Image

Pourcentage par années de chaque tranches :
Image

On voit qd meme que la part >49 pages grandi chaque année pour atteindre presque 50%.
Il y a bien diversification de ce qui est proposé au lecteur. A lui de suivre. :P
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Re: C'est la crise ?

Messagede toine74 » 27/06/2010 14:57

Merci nexus pour ces graphiques. Est-ce que tu as exclu/inclu les intégrales ? Sur les 4-5 dernières années, avec leur multiplication, elles doivent bien tirer la tendance...

Avant 92 (l'Association en gros), la majorité des grosses paginations c'était Casterman avec (A SUIVRE) non ?
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Re: C'est la crise ?

Messagede vacom » 27/06/2010 14:58

azertyuiop1 a écrit:Ce que je note depuis des années chez les jeunes scénaristes franco-belges, c'est une qualité d'écriture vraiment très faible, écrit dans un français lourd et pauvre à la fois, sans parler d'une orthographe hallucinante, comme si leur baggage culturel était d'une indigence rare.
Il y a quelques exceptions notables mais avant de trouver des sujets malins apprenez à écrire, la bande dessinée ce n'est pas le cinéma et la qualité linguistique est primordiale, ça me semble la base.


Je voudrais réagir à ceci. Constatation assez crue mais qui ne manque pas de réalisme.

Il existe aujourd'hui un trop grand décalage entre la quantité produite et le nombre d'acheteurs potentiels. La solution peut être d'une part de réduire la production - proposer moins d'albums mais accorder plus d'attention à chacun, que ce soit pendant la création ou lors de la commercialisation. C'est à mon avis souhaitable mais on peut aussi chercher à accroître le nombre de clients potentiels. Or, qu'est-ce qui empêche de très nombreux amateurs de littérature - j'en ai beaucoup dans mon entourage privé et professionnel dont c'est le cas - à se pencher plus avant sur la bande dessinée ? Tout simplement le fait de ne pas retrouver dans les textes et dialogues la qualité littéraire qu'ils s'estiment - à raison - en droit d'attendre de toute production littéraire. Combien de fautes d'orthographe et autres coquilles dans des titres pourtant de qualité ? Combien de traductions foireuses pour des œuvres étrangères pourtant de qualité ? Bien sûr, il y a des exceptions, des auteurs qui manient très bien la plume. Mais les dénicher demande un effort que l'amateur occasionnel n'est pas disposé à fournir.

On parle ici du rôle de l'éditeur. Oublions le côté gestionnaire et imaginons qu'il continue à faire son travail d'accompagnement des auteurs et de soin apporté à la réalisation du livre. J'ai souvent l'impression qu'il a tendance à se concentrer sur l'aspect visuel - qualité d'impression notamment - de l'album et moins de sa qualité littéraire. Ne se doit-il pas - moralement, s'entend - de payer des relecteurs/traducteurs de talent pour assurer des textes de qualité, de veiller à ce que le côté purement littéraire des livres soit lui aussi irréprochable ? Tant que la BD n'aura pas ce même niveau d'exigence, elle ne pourra jamais prétendre à être reconnue et traitée d'égale à égale avec la littérature. Enfin, c'est mon avis et je le partage.
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Re: C'est la crise ?

Messagede toine74 » 27/06/2010 15:05

Tu résumes bien la situation ;). Stephane crety, dans un post précédant, avait déjà très bien synthétisé le noeud du problème, trop de BD et moins en moins de travail d'édition (qui ne se résume pas qu'à l'impression). L'abandon du modèle classique d'édition (politique/direction générale, constitution d'un catalogue, accompagnement des auteurs) pour la chasse au bestseller (merci les diplômés des HEC) est en train de ravager le 9e art.
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Re: C'est la crise ?

Messagede yugen » 27/06/2010 16:33

JDMorvan a écrit:Hmm, sinon, le manga comme les comics sont en crise. Il ne faut pas se leurrer.
Il n'y a pas de pays meilleur que l'autre.

Nos conccurents ne sont pas d'autres éditeurs, ou des BD venues d'autres pays, mais les autres médias de divertissement. Il nous faut TOUS (éditeurs et auteurs) trouver le moyen de lutter contre eux. C'est possible.


Ce que fait, au hasard, Ankama avec Wakfu ;)
Un univers intégré, qui se décline en série télé, en jeu vidéo, en jeu de cartes, en magazine, en goodies, en artbook, en manga, en BD...
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Re: C'est la crise ?

Messagede azertyuiop1 » 27/06/2010 17:07

JDMorvan a écrit:
Nos conccurents ne sont pas d'autres éditeurs, ou des BD venues d'autres pays, mais les autres médias de divertissement. Il nous faut TOUS (éditeurs et auteurs) trouver le moyen de lutter contre eux. C'est possible.


Le problème est peut-être là, si vous considérez la bande dessinée comme un simple media de divertissement vous êtes morts et archi morts, pas au niveau pour lutter, et vous risquez de ne plus être qu'un sous produit, moins cher que le cinéma ou les jeux videos mais moins bien aussi. En revanche si vous considérez que c'est bien plus un art ( même si la frontière est poreuse je pense qu'on se comprend) , de la littérature dessinée, et que vous faites de bons livres bien écrits, à tous les sens du terme, il n'y aucune raison de désespérer.
Il faudrait aussi que les éditeurs fassent eux-mêmes leur boulot de sélection, celui qui n'est plus fait par les journaux, ce n'est pas à l'acheteur de faire entièrement le tri. Ne aps le faire ne peut que désespérer le lecteur potentiel qui va se planter une fois, deux fois, dix fois, puis va lacher l'affaire.
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Re: C'est la crise ?

Messagede Bedlam » 27/06/2010 18:44

J'arrive un peu tard mais j'en reviens au "modèle" américain et japonais.
Il y a quand même une certaine différence dans l'aspect culturel de la chose, on ne peut pas encore nier que le "culte du livre" à l'européenne est encore vivace.
Si on se place sur le plan éditorial, Japon comme Etats-Unis fonctionne selon un principe assez similaire de parution en kiosque puis d'une première compilation en histoire complète et enfin d'une version plus luxueuse/collector.
C'est un peu l'inverse par chez nous où la prépublication dans les magazines est devenue quasiment inexistante et où l'on propose d'abord une version "onéreuse" de l'oeuvre puis une version "jetable", le principe du Grand Format et puis Poche dans la littérature qui pourrait se retrouver dans la BD avec le syndrome des petites intégrales récemment.
D'autre part, je pense qu'il réside encore une vision indépendante et culturelle dans l'édition européenne qui la met encore à part du circuit industriel classique là où pour japonais et américain, c'est presque exclusivement du travail du commande, une réponse aux désirs des lecteurs si l'on se place dans le cadre du comics/manga populaire, mainstream.

Personnellement, je n'espère pas retrouver le même portrait de l'industrie du livre en France, en tant que libraire, ça me chagrinerait un peu.
Je crois que les éditeurs du coin, bien qu'ayant tous les défauts du monde (c'est pour en rajouter une couche), apportent toujours un peu de soin à leur production. Ce que beaucoup semble critiquer justement, c'est ce conservatisme du format cartonné avec ces limites. J'avoue que quitte à acheter une bd plus d'une dizaine d'euros, je préfère un beau rendu qu'une impression façon tabloïd.
Alors en tant qu'ouvrage culturel, le contenu prime plus que le contenant certes, l'argument peut tenir la route pour du roman, dans le cas de la bd, ça peut se discuter, il n'est pas rare de croiser quelques productions pas très lisible du fait de la qualité.

Quant au reproche du classicisme et du carcan de la bd franco-belge où l'on ne retrouve que du pur divertissement navigant entre le thriller moderne et l'héroïc-fantasy coloré, il faut quand même ouvrir les yeux, sur les 4000 sorties annuelles, vous en avez à foison. Simplement, c'est bien sur ce qui n'est pas au devant de la scène. Et difficile aussi d'affirmer qu'il n'y a pas de renouvellement dans le franco-belge, que dire de " l'avant-garde " Sfar, Larcenet et consors ? On aime ou on n'aime pas, mais cela apporte un peu de sang neuf dans le milieu de la bd avec à boire et à manger.
D'autre part, il existe bel et bien des œuvres intelligentes, bien écrites, innovantes dans cette même production. Et depuis belle lurette me semble-t-il, c'est un peu le fond de commerce des collections comme Aire Libre, Long Courrier, Poisson Pilote, Mirages, Shampoing pour parler des plus gros poissons.

De mon point de vue de libraire, c'est sur que la surproduction est effrayante, qu'il est impossible d'avoir une vision globale des sorties (comme la grande surprise de découvrir que cet album est sorti lorsqu'on prépare nos retours) et on a parfois l'impression d'étouffer.
La faute à un peu tout le monde au final. Aux gros groupes d'éditions qui se tirent la bourre entre eux et veulent avoir autant de visibilité que le voisin et qu'il faut bazarder de la nouveauté en nombre entre deux grosses locomotives. C'est un peu une guerre de présence dans les rayonnages qui est à l'origine de cette surproduction. Et dès que l'un constate qu'une niche fonctionne, il l'exploite et le voisin fait de même.
La faute aussi aux jeunes et pimpantes maison d'édition qui se lancent dans l'aventure et tentent par leur moyen de publier des auteurs débutants et qui font ça bien souvent par passion uniquement et qui sortent parfois des bouquins très chouettes mais malheureusement souvent très (trop) proche de la bd voisine. Mais peut-on leur jeter la pierre ?
La faute aux distributeurs et diffuseurs qui ne veulent surtout pas que ça s'arrête justement, du flux et encore du flux, il faut leur dose.
La faute aux libraires qui veut autant présenter les grands classiques mais qui râlent parce qu'il veut du neuf aussi et du différent ... ah mais aussi des trucs plus classiques parce que ça se vend et qu'il faut bien vivre.
la faute aux auteurs parce qu'ils sont plein d'idées et qu'ils ont des projets et qu'ils tentent de les concrétiser et c'est bien normal.
Et puis c'est aussi la faute aux lecteurs/consommateurs (normalement, je ne devrais pas dire ça vu mon métier :)) qui veut ça tout de suite, on est dans un monde où tout doit être immédiat, de consommation instantané. Et le lecteur devrait quand même réfléchir un peu de temps en temps. Un livre, c'est une oeuvre de l'esprit, ça demande du temps de réalisation, de création. Même si c'est de la bd mainstream, du boulot de commande, faut pas croire, les auteurs s'appliquent quand même alors tu les laisses respirer et tu reviens dans un an.
En attendant il y a de quoi se mettre autre chose sous la dent qui y ressemble ou justement, il est temps de s'ouvrir à autre chose aussi peut-être ?
Le problème c'est que nous sommes mal éduqués et que les désirs du client entrainent la machine. Jusqu'à saturation.

Et je trouve la nomination du sujet très juste avec ce point d'interrogation. Je n'ai pas l'impression que le milieu du livre traverse une réelle crise là en ce moment même. Tout le monde a pris peur lors de l'annonce avec fracas de celle-ci et pour ce qui est du problème de surproduction il est évoqué déjà depuis plusieurs années me semble-t-il.
Par contre, l'avènement du livre numérique a des raisons de faire peur à certains acteurs. Même si je ne crois vraiment pas qu'il prenne le pas sur la version papier, il reste que des librairies vont fermer, des éditeurs vont se casser la gueule et que pour les auteurs, s'ils ne s'organisent pas pour défendre leurs droits d'auteurs à ce niveau là, ils risquent d'en pâtir dangereusement, ça a beau permettre une plus large diffusion et visibilité ainsi qu'une rémunération directe de l'auteur (pourquoi pas, c'est son boulot après tout), internet, c'est un peu le domaine où la gratuité est reine en toute illégalité. Il suffit de voir les récents débats entre les feuilletons bds numériques où l'on paient un abonnement et les réactions du public qui a du mal à comprendre comment un "blog bd" peut être payant.

Excusez, c'est un peu une tartine en vrac et qui fait redite avec d'autres propos mais je vais pas tout effacer maintenant.
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Re: C'est la crise ?

Messagede fleur » 27/06/2010 19:38

Chercher des coupables, c'est stérile à mon avis. Nous sommes tous coupables!

stephane crety a écrit:De plus, je persiste à penser que la crise n'est pas une crise du dispositif créatif(1 auteur sur un ouvrage, 10 auteurs,100 auteurs, on s'en bat les couilles.), mais bien une crise d'un systeme économique, d'une structure qui a toujours fonctionné dans le déséquilibre, et de fait , a toujours été fragile, et les coups de boutoir récent ne fond qu'apurer ce chateau de carte, cette bulle spéculative.


ben voilà... :ok:
et encore, le livre bénéficie de la loi Lang qui limite les dégats!

luc Brunschwig a écrit: Le problème depuis quelques années, c'est que ça ne se passe plus comme ça. Je pense à un éditeur comme Dupuis qui fonctionnait intégralement sur le principe gros auteurs qui permettent le financement de choses plus fragiles. Or, on est passé à des comptes de gestions individualisés pour chaque série. Si une série n'est pas rentable, elle gicle, quelque soit ses qualités. On n'est plus dans un principe global où c'est la moyenne des ventes qui est jugé. Aujourd'hui, tout doit être rentable immédiatement.


On est dans une logique économique qui abandonne toutes les solidarités, services publics, retraites...

Et c'est vrai que les auteurs ont des soucis à se faire avec le numérique. Certains se sont groupés d'ailleurs il me semble, pour exercer une vigilance concernant la préservation de leurs droits. Je crois qu'on ne peut survivre seul dans ce contexte...
Faudra que la solidarité se reconstruise par le bas, comme ailleurs...
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Re: C'est la crise ?

Messagede Cubitus » 27/06/2010 20:26

J'aimerais qu'on m'explique en quoi le manga et le comic US sont en crise ? La crise c'était fin des années 90, quand Marvel a déclaré faillite, et début des années 2000. Mais depuis le milieu années 2000. tout va mieux... grâce à la percée d'un nouveau format, le TPB... certaines séries ont été à elles seules sauvées par ce nouveau format... Oui les ventes ne sont pas au niveau des années 80, mais ce n'est pas la crise... D'autant que de nos jours jamais les persos de comics US n'ont été autant connus... Donc moi je m'en fais pas trop pour le comic US.
Quant au manga au Japon, oui il a perdu 50% sur 10 ans... au Japon. En Europe et Amérique du Nord, le manga ne cesse de propogresser année après année.
Quant à la France, plus une crise de chiffres moi je trouve que c'est une crise culturelle, on en a déjà suffisamment parlé. Et la solution tout le monde est d'accord c'est l'ouverture à de nouveaux formats, stop au 48 pages cartonné systématique.
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