Tireg a écrit:Oui, au temps pour moi, je vais préciser ma pensée : j'entendais par là qu'au niveau d'une narration moderne, ça ne peut pas tenir.
Jusque dans les années 70 (environ), l'objet principal des histoires racontées était d'avoir une histoire (rien de redondant là dessus
). Par la suite, progressivement, on s'est plus installé du côté de la caractérisation des personnages, l'histoire n'étant que le prétexte à approfondir les personnages.
Mmm. Je n'ai sans doute pas toute la culture et la réactivité intellectuelle là maintenant tout de suite pour bâtir un contre-argumentaire (c'est vraiment dommage que J.M. Lainé ait déserté ce forum), mais je t'avoue que je ne me sens pas
entièrement convaincu par ça.
J'ai du mal avec toute définition qui prétend dire "c'est comme ça que {telle forme d'art} doit être dans son ensemble et pas autrement", et je trouve ta séparation entre
plot-driven et
character-driven (si je comprends bien de quoi il s'agit) un brin essentialiste : personnellement (et que ce soit un avis
personnel n'en fait pas un avis
original...), il me semble que l'idéal est dans un équilibre des deux, non ?
Et même en ayant dit ça, je ne vois pas pourquoi on s'interdirait le plaisir d'un récit qui fait pencher la balance un peu plus d'un côté ou d'un autre, tant que c'est bien fait. Ensuite, l'appréciation de ce qui est "bien fait" ou non relève évidemment beaucoup de la question de goût. (Bon, personne
ici n'a prétendu que ce que faisait Layman était absolument génial, non plus.)
Tireg a écrit:Le problème de Layman (contrairement à Dini, qui est un excellent exemple) est qu'il essaye de tenir trop de choses en peu de pages. [...] Ca me donnait plus l'impression qu'il était en intérim sur le titre, et que DiDio aurait pu le virer du jour au lendemain : on se retrouve avec des pitchs super intéressants, mais exécutés à la va-vite.
Mais peut-être que j'ai loupé quelque chose de sous-jacent, et qu'il faudrait que je relise tout le run (de l'inconvénient d'une lecture en kiosque...).
Non, de ce point de vue là, je ne suis pas sûr qu'il y ait des masses de choses "sous-jacentes". Mais par exemple : l'idée de gangs de jeunes qui s'inspirent du Joker, on la retrouve dans la fin de
We Are Robin de Bermejo (actuellement en kiosque dans
Batman Univers HS#04)
qui nous étale ça sur quatre numéros pleins. Avec plein de pages et de récitatifs et de dialogues et de saynètes diverses pour nous présenter le jeune qui monte ça, sa
backstory familiale, son culte pour le Joker, ses discours nihilistes pour montrer que ouuuuh il est malsain dans sa tête... Bon. Bah avec tout ça, j'ai pas l'impression d'avoir quelque chose de
vraiment plus approfondi, et encore moins de plus intéressant, que ce que Layman fait en deux numéros -- et en plus, maintenant que je sais que c'est là que Bermejo a piqué l'idée (à supposer que Layman lui-même ne l'ait pas prise encore ailleurs), il n'a même plus le mérite de l'originalité.
Je trouve Layman plus efficace à tout point de vue : il présente la même idée en deux fois moins de temps, je m'ennuie moins
, ses pseudo-Jokers ne sont certainement pas moins flippants que ceux de Bermejo, et son approche est même un peu plus subtile (notamment avec le perso du jeune qui tourne casaque quand il se rend compte que fantasme et réalité, c'est pas la même).
En revanche, la faiblesse de ces épisodes de Layman, à côté de ça, pour moi, c'est le faux mystère autour de l'identité de celui qui tire les ficelles derrière le gang, que le lecteur soupçonne tout de suite (en tout cas, c'était mon cas) alors que Batman,
le "Détective" par excellence, ne comprend qu'à la fin. Mais ça n'a rien à voir avec des questions de longueur du récit.
PS : lire la fin de
We Are Robin et se dire que c'était une des meilleures séries estampillées DCYOU montre quand même le niveau et donne une idée de la purge dont DC est revenu depuis
Rebirth (... et je dis pas ça que pour embêter Alacoume.
)