Vu sur Facebook (FB de Mathieu Jiro) : tout le monde ne sera certainement pas d'accord !
L'art, ce n'est pas fait pour faire plaisir à une minorité ni une majorité. Il a ses propres règles///
En 2015, une affaire similaire à celle que subit aujourd'hui l'auteur de BD Bastien Vivès (accusé, entre autre, de "promouvoir la pédocriminilaté"!), excitait les "ligues de vertus" contre les artistes du "Dernier Cri", à Marseille... Nous avions alors affaire à des bigots intégristes, des droitards haineux et incultes. Aujourd'hui, ce sont de petits Mao 2.0 issus pour beaucoup du monde de l'art (!) qui semblent saper ce qui fonde l'art lui-même: la liberté de conscience absolue, le droit à la création, à l'expression et à la diffusion d'une œuvre. Et je pense qu'il y a là de quoi nourrir de fortes inquiétudes.
Ci-dessous, un extrait de la pétition de 2015 en soutien aux artistes incriminés, qui aborde clairement le fond du problème et qui résonne encore aujourd'hui.
"[...] Ceci est de la peinture, ou de l'illustration, du dessin, de l'art. Il est du droit de chacun d'aimer ou ne pas aimer. En outre, il est du devoir de chacun de se rappeler la liberté d'expression régulièrement mise à mal, qu'on aime ou non les œuvres, que ce soit de McCarthy, d'Anish Kapoor, de Balthus, de Klossowski ou de Bellmer. Mais il est surtout du devoir de chacun, respectant cette liberté, de comprendre que ce qui se présente comme art n'est pas et ne sera jamais la réalité mais de la FICTION, aussi réalistes soient les représentations, images, peintures, sculptures, films ou pièces de théâtre présentées au public.
Aucune fiction ne peut se prévaloir ainsi de faire l'"éloge" de quoi que ce soit, et surtout pas des crimes et délits ici pointés du doigt ("pédopornographique", "zoophile", "satanisme"). Jamais. Les "personnages", figures d'une représentation peuvent, eux, elles, faire l'éloge de ce qu'ils veulent, ce sont des figures de papier, de toile, de plâtre, de marbre ou de bronze mais l'œuvre qui les met en scène et l'artiste qui a choisi son médium ne peuvent être accusés des paroles ou des actes prononcées ou réalisés par ces figures de fiction.
L'art est fiction.
L'art est fictionalisation.
Encore. Toujours et à jamais.
Les œuvres de Stu Mead ou Reinhard Scheibner ne sont ni des reportages ni des documentaires ni des témoignages d'aucune réalité, hormis, peut-être, et le peut-être est fondamental, d'une réalité mentale, fantasmée, voire de rêves ou de cauchemars. C'est leur droit le plus strict. Mieux encore, c'est le seul endroit de toutes les activités humaines où l'on peut exprimer des choses qui, ailleurs, dans la réalité, pourraient être jugées sous le régime de la morale ou de la Loi. L'art n'est simplement PAS la réalité. Partant de là, il n'y a ni offense ni délit ni crime d'aucune sorte. Prêter aux artistes ou aux œuvres le premier degré des mises en scènes fictives qu'ils présentent c'est, au mieux, faire un contresens et, au pire, faire dans la diffamation, la calomnie voire l'atteinte à la vie privée.
Dans les accusations qui sont faites des artistes en question, de la structure qui les exposa et de leur responsable, il y a calomnie, diffamation, atteinte à la vie et à la liberté d'expression, droit fondamental.
Les œuvres ont le droit de plaire ou non. Les artistes ont le droit de nous paraître aimables ou non. Nous avons le droit d'être enthousiasmés ou choqués. Mais nous n'avons pas le droit d'interdire leur expression, leur diffusion, leur exposition, pas le droit de les censurer.
L'art, ce n'est pas fait pour faire plaisir à une minorité ni une majorité. Il a ses propres règles."
Trois avis récents, lus sur les FB des intéressés :
Jean-Marc Rochette :
Je m'étais pourtant juré de me tenir à l'écart de toute ça, qu'est-ce que j'en ai à foutre d'un lynchage médiatique de plus ou de moins? Mais la meute qui s'en prend à Bastien Vivès m'a fait sortir de ma réserve. Ces gens le collent au pilori sans autre forme de procès, et quiconque ose prendre sa défense, même pour des raisons de présomption d'innocence, a droit lui aussi à son infamant procès en pédophilie. Ainsi va la justice de la foule. Qui a sonné l'hallali?
Henri Garric :
Quand, il y a une dizaine d'années, sur les conseils d'une étudiante, j'ai lu Polina de Bastien Vives, j'ai été ébloui. Ça a longtemps été mon conseil presque automatique quand quelqu'un qui ne connaissait rien à la bande dessinée contemporaine me demandait ce qu'il devait lire... Il y avait certes des ambiguïtés dans la représentation des corps des enfants - mais c'était ce qu'on appelle des ambiguïtés.
À partir de là, j'ai décidé de suivre ses publications. J'ai tout de suite été déçu ; la série Lastman, c'était juste mauvais. Mal dessiné, histoire très faible ; et puis, s'appuyant pratiquement uniquement sur le dessin de femmes à gros seins. Les Melons de la colère, j'ai trouvé ça affligeant : histoire sans aucun intérêt, c'était clairement le simple exposé de fantasmes malsains. Mais je dois l'admettre, à l'époque, je me suis dit que c'était du second degré un peu manqué. Et j'attendais la suite avec espoir.
Quand Une Sœur est sorti, j'ai attendu avec impatience de le lire. Un grand spécialiste de la bande dessinée avait posté son enthousiasme, y voyant la meilleure bande dessinée de Vives. Paradoxalement, c'est ma fille cadette qui me l'a offert, pour Noël, connaissant mon intérêt pour Vives (elle avait 15 ans à l'époque). Quand elle me l'a offert, elle était très ennuyée parce qu'elle venait de la lire ; elle a simplement commenté : "j'ai offert une bande dessinée pédophile à mon père". Elle avait tout compris. Avant Petit Paul et La Décharge mentale, que je me suis refusé à ouvrir, il y avait tout le pire dans cet album : outre la laideur du dessin, outre la faiblesse de la narration (sans grâce, sans ellipse, sans mystère), c'était juste une apologie de l'accès libre de la pornographie aux enfants et aux adolescents et de la pédophilie... Je ne connais pas bien la législation en la matière, mais je comprends mal qu'on puisse donner libre accès (sans restriction d'âge) à une telle bande dessinée.
Bien sûr, je n'appelle pas à un quelconque boycott ; mais, personnellement, je ne lis plus ces bandes dessinées. Je ne veux pas nourrir un mec pervers qui utilise sa position de célébrité pour vendre des saloperies.
Que le Festival de la bande dessinée d'Angoulême n'ait pas conscience des problèmes que pose l’œuvre actuelle de Vives, cela montre qu'hélas nous n'avons pas beaucoup avancé. Que tant de gens gueulent, en revanche, ça prouve qu'il y a un peu de progrès.
Alexis Bacci :
Aux vues de l'ampleur que prends cette polémique-lynchage, je reposte un com' laissé en réponse à un post de Jérôme Dubois avant hier (que je ne connaissais pas jusqu'a il y a deux jours).
J'ai enlevé les fautes dans la mesure de mes capacités.
"Gotlib est-il pédopornographe avec rhaaa lovely? Je demande parce que je vois un de mes meilleurs amis se faire insulter et diffamer depuis des années par une cabale qui me rappelerait le maccartisme si il y avait un gramme de raison de le soupçonner de quoi que ce soit.
Là on traine un type dans la boue de la façon la plus dégueu. Un mari père de famille. Il faut vraiment rien avoir a faire de sa vie de mieux.
Dessiner une grosse bite a toujours été potache. Je connais bien Bastien pour avoir partager son atelier pendant des années.
D'ailleurs beaucoup de gens qui supportent ce lynchage dégueulasse ont profité de sa gentillesse ou de son hospitalité et retourne gentiment leurs vestes pour se placer.
Que deux ou trois dessins soient maladroits sur les centaines qu'il fournit chaque mois ça ne sert que de prétexte pour se faire le premier de la classe.
Quiconque le connait un peu sait qu'il est branché gros seins et qu'il est tout sauf toutes les horreurs que vous lui faites porter...
Cette chasse aux sorcières a pour le moins le mérite de reveler la betise et les jalousies du milieu. Personne n'est obligé de le lire ou d'apprécier le bonhomme. Perso, outre l'affection que je lui porte, je l'ai vu aider bien des gens, c est un des gars les plus génereux que je connaisse.
Ha ouais, il n' est pas pédophile, ni pedomescouilles. Trois articles d accusations ne valide pas un fait. Par contre diffamer, insulter publiquement, outre être un délit ça relève d'une belle fils de puterie.
Bastien est mon ami, il l'était hier, il l'est aujourd'hui et j'espère qu'il le sera longtemps. Je n'ai pas d'amis pédophile et je ne pourrais pas en avoir.
A bon entendeur."
Je ne pense pas que l'on puisse expliquer à des gens qui n'ont pas cette culture fluide glacial (ou plutôt ce qu'était fluide glacial), hara kiri etc...
il y aurait un pavé à écrire ou une thèse a faire sur le sujet. Je ne suis personne pour m'y coller et je voulais juste apporter mon soutien à mon pote.
Je regrette que les gens avec qui il a évolué et qui le connaissent suivent à coup de like et de petits coups bas ce triste cortège. Pour certains je ne suis pas étonné...
Et ceux qui se taisent ont surement leurs raisons...
Ces lynchages médiatiques derrière des pseudos pétés me font penser à cette France ou l'on tondait les femmes à la libération.
C'est un peu grave...