de anaxarque » 18/02/2014 09:41
Amazon, qu'on le veuille ou pas est devenu le premier marchand de livres au monde. Les conditions de travail y sont éprouvantes (cela ressemble étrangement aux Drives de Carrefour et cie. Aux aux MacDo), la qualité d'envoi laisse souvent perplexe, le fait que Amazon soit domicilié fiscalement au Luxembourg pose des problèmes éthiques, comme leur volonté de proposer des frais de port gratuit pour les livres alors qu'ils ont déjà donné les cinq pour cent permis par la loi Lang...
J'emploie le mot de marchand de livres à dessein, un libraire offre du conseil, permet de manipuler l'ouvrage que l'on désire éventuellement acquérir ; alors qu'Amazon n'offre que des « commentaires clients » rédigés par des anonymes. Amazon vent pareillement que les livres, des vêtements et depuis peu des produits d'entretien. Pourtant, je continue de penser que le livre est un bien à part.
Je n'envisage pourtant pas de boycotter l'enseigne, pas plus que je ne boycotterai les grandes surfaces où les conditions de travail sont aussi lamentables. Ce, pour des raisons économiques, mon porte-monnaie n'est pas pas sans fond...
Je reste néanmoins lucide. Amazon, aux USA, a quasiment annihilé les librairies indépendantes. Comme dit plus haut, de nombreuses zones sont devenues des déserts culturels.
Qui plus-est, Amazon saigne à blanc les éditeurs en leur imposant des remises faramineuses.
Aux USA le prix de la couverture n'est qu'indicatif, le prix de vente est libre, il n'est donc pas rare de trouver des nouveautés avec 40 % de rabais.
Pourtant Amazon engrange des bénéfices.
Certes, ce n'est pas la vente de livres qui rapporte le plus, mais, les agents du marketting d'Amazon le savent, les « gros » lecteurs consomment aussi beaucoup de musique, de DVD, de jeux vidéos, etc., qui eux rapportent beaucoup. C'est cynique à dire, mais pour Amazon, le livre est un simple produit d'appel.
Alors oui, je mentirai en disant que je ne recours jamais aux services d'Amazon. J'habite une petite ville de province et, il m'arrive que, pressé par le temps, je doive me procurer un livre, un CD ou autre chose très vite. Amazon permet également de se faire livrer le jour suivant. Avec Amazon com, on peut facilement acquérir, dans un délai raisonnable, des BD américaines en VO.
Mais, par chance, cependant, ma ville dispose encore, d'une librairie. Celle-ci est spécialisée dans la BD, bien qu'elle vende aussi d'autres livres.
On dira ce que l'on veut, mais, l'atmosphère d'une librairie, l'odeur de ses livres neufs disposés sur des rayonnages, cela est magnifique. Quand on aime le livre, il n'y a rien de plus voluptueux que de saisir l'exemplaire de démonstration, de toucher le grain du papier, de sentir l'odeur de l'encre, de soupeser l'ouvrage, d'observer la tranche et la reliure, etc. Ici, quand un livre arrive avec un accroc, même dérisoire, il est renvoyé sans délai, ni pitié. Le livre est considéré, à raison, comme un objet précieux. On ne verrait pas cela chez Amazon ! Et quel plaisir, doucement coupable, de repartir avec une « cargaison de livre » de l'officine de son libraire, alors qu'on était venu n'en chercher qu'un seul...
La fable de La Fontaine nous enseigne que nous ne devons jamais dire « fontaine, je ne boirai pas de ton eau », Amazon est comme cette fontaine à l'eau peu ragoutante. Si nous, lecteurs passionnés de BD devons soutenir nos librairies indépendantes en y faisant nos achats prioritairement, Amazon s'est imposé comme un partenaire douteux, mais incontournable, hélàs.
"On Friday night, a comedian died in New York. Someone threw him out a window and when he hit the sidewalk his head was driven up into his stomach. Nobody cares. Nobody cares but me. " Roarshach's Journal, 13/10/1985.