C'est en conscience que j'ai attaqué Mankell et sa série concernant Kurt Wallander par le milieu. Après tout, quand on apporte le gâteau à table, difficile de situer la première part. Mon gros gâteau Mankell, je me le réservais pour cet été, tout penaud d'arriver au bout de mon voyage en compagnie d'Arnaldur Indridason et bien décidé à rester les pieds au froid. Eh oui, y'en a pour qui la chaleur estivale attise des velléités glaciaires.
Le Guerrier solitaire est donc arrivé par hasard comme le premier des Mankell que je lirai. le roman ouvre son intrigue après deux détours assez flous, l'un moite comme le tropique, l'autre sauvage comme un Indien sur le sentier de la guerre.
Kurt Wallander apparaît alors. L'homme est complexe. Peu disert, visiblement peu aimable mais pourtant civilisé, attentif à l'ordre des choses. En un mot c'est un conservateur. Commissaire à la police d'Ystad, en Suède. le suicide d'une jeune femme dans un champ de colza va précipiter son été. Plus tard, la traque d'un détraqué le conditionnera, sans air, dans un irrespirable suspens où les cadavres s'accumuleront comme autant de prises de guerre.
Mankell est juste dans son écriture. Il ne rechigne pas à être pénible quand il remet chapitre après chapitre toujours le même couvert (..."Wallander laissa échapper une image... qu'il n'arrivait pas à se remémorer") comme un leitmotiv. Il illustre bien le train-train de la procédure policière et le nuage brouillardeux qui flotte et entoure le travail de police. A l'époque pas de GPS pour se repérer et trouver une adresse, pas de téléphone portable pour être repéré par satellite, pas d'internet pour tout connaître d'un individu avant même de l'avoir rencontré. Wallander travaille à l'ancienne, à l'instinct, à la sensation et se débat parmi ses contemporains. Paradoxalement, comme Erlendur chez Indridason, c'est un iconoclaste qui jure dans le décors. Ses précédentes affaires l'ont usé, peut-être pas au point d'en faire un paria, seulement un flic original.
Concernant la vie de la brigade, les description de Mankell rejoignent un peu celles de Vargas, l'humour en moins. La précision est là, rigoureuse, à chaque coin de page.
Le Guerrier solitaire est une réussite qui m'a offert une voie royale vers l'univers d'Henning Mankell. Peut-être devrais-je reprendre la série depuis le début ? Ou bien, une fois de plus en référerai-je au sort et à la disponibilité de tel ou tel roman chez le libraire.