Frannck a écrit:Il y a urgence.
Il y a toujours urgence pour prendre de mauvaises décisions, on peut prendre un peu de temps pour essayer de prendre les bonnes, non ?
Un très bon article de Romaric Godin sur Mediapart.
Quelques extraits pour avoir l'essentiel :
Le gouvernement a en fait validé un recul massif du niveau de vie des fonctionnaires. En prenant en compte le seul pouvoir d’achat du point d’indice, c’est la baisse de la rémunération des agents qui sera un record jamais atteint.
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Concernant les loyers, le choix du gouvernement n’est satisfaisant à aucun égard. La hausse consentie des loyers de 3,5 % revient à faire porter aux locataires, en grande majorité salariés, une partie importante de la charge de l’inflation au bénéfice des propriétaires. C’est donc un transfert volontaire du coût de l’inflation, du travail vers la rente.
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[en réalité sur les retraites] une perte sèche de 1,88 point de pouvoir d’achat. Là encore, on est au-dessus de la moyenne des pertes attendues par l’Insee pour l’ensemble des Français. La même remarque est valable sur les autres prestations sociales, qui avaient bénéficié d’une meilleure revalorisation en janvier (1,8 %). Dans ce cas, la hausse moyenne serait de 3,84 %, soit 1,66 point de perte de pouvoir d’achat moyen.
(...)
Et ce n’est pas un détail. Depuis quelques jours, l’exécutif ressort les bonnes vieilles ficelles du chantage à la dette.(...) Tout cela ressemble à une mise en scène pour préparer l’opinion à un tour de vis budgétaire. Dès lors, ce « paquet pouvoir d’achat », déjà largement insuffisant, pourrait bien être le dernier.
Et donc
Il faut alors en conclure que la politique menée est bien une politique d’inspiration néoclassique : le gouvernement entend briser la demande par un tour de vis budgétaire, un refus de tout retour à l’indexation salariale et une sous-indexation générale des prestations sociales. Le but, non avoué, est de faire baisser l’inflation par un ralentissement économique. Lequel permettra, d’ailleurs, de justifier les réformes et « efforts » futurs.
Il n’y a là aucun complot : c’est l’application simple, voire simpliste, des théories dominantes et de la fameuse courbe de Phillips : pour casser l’inflation, il s’agit de réduire l’excès de demande, et revenir à un taux de chômage d’équilibre, qui ne peut être abaissé que par des réformes structurelles. D’ailleurs, Larry Summers, l’économiste néokeynésien de référence aux États-Unis, a, le 27 juin, demandé explicitement une hausse du chômage pour faire baisser l’inflation.
Comme toujours, priorité est donc donnée au capital sur le travail.
Ce qu'il faut faire
La seule réponse censée serait en fait la réindexation immédiate sur l’inflation des salaires et des prestations sociales. En arrimant les salaires à la hausse des prix, on assurerait une croissance plus dynamique, et on garantirait les niveaux de vie.
En parallèle, l’inflation permettrait à la fois de faire reculer mécaniquement le ratio dette publique vis-à-vis du PIB (puisque la dette est calculée en euros de la date d’émission, et le PIB en euros actuels) et, via des recettes de TVA en hausse, de renforcer les finances publiques. Ces hausses pourraient couvrir le modeste renchérissement pour le pays de la charge de la dette, qui a été contractée à des taux très bas.
La meilleure politique de réduction de la dette repose donc aujourd’hui sur la relance, et sur l’acceptation d’un régime plus inflationniste – même si cette vision présente des limites dans le capitalisme actuel. Au contraire, les effets de manche de la communication gouvernementale cachent des choix économiques dangereux, qui risquent de rajouter une politique récessive à un contexte déjà dégradé.