Lu ce 1er tome des
Lumières de la France et.... je ne saurais trop quoi en dire. À titre personnel j'ai bien aimé, mais j'hésiterais à le conseiller, c'est un peu bizarre comme impression. Cela fait un moment que je n'avais plus acheté une BD de Sfar (bon, en même temps, il produit moins en ce moment... de BD en tout cas), je pense que la dernière fois c'était
L'Ancien Temps qui m'avait d'ailleurs fortement déçu aussi bien graphiquement que scénaristiquement, je crois même que je ne suis pas parvenu à aller jusqu'au bout...
M'intéressant beaucoup au XVIIIe siècle tant pour des raisons personnelles que professionnelles (pour le dire vite), c'est donc un peu beaucoup le sujet de ces
Lumières... qui m'a poussé à re-sauter le pas et à acheter l'album les yeux fermés, curieux de voir ce que Sfar en ferait.
Le sujet donc... amha... eh bieeen... oulah... vous avez vu passer un sujet ?
Disons qu'au centre il y a un comte "philosophe" qui veut écrire un pamphlet contre l'esclavage des nègres, sans pour autant renoncer à sa participation au fructueux commerce triangulaire
(souvenir de la vieille rengaine -diffamatoire- contre Voltaire?) ; et il y a sa femme, qui pendant ce temps préfère s'envoyer en l'air avec tout ce qui bouge, même si elle a, elle aussi, quelques velléités d'écriture (d'un traité sur la sodomie). Il y a la chienne de sa femme, un petit Africain, un cuisinier italien, un prêtre, deux bandits qui passent dans le coin... Tout cela n'a ni queue ni tête (enfin... surtout ni tête), les saynètes s'enchaînent dans un délire joyeux ou en tout cas total, on suit tel personnage puis tel autre puis tel autre qui sort de nulle part à un moment et y retourne trois pages plus loin - j'avoue que je serais assez curieux de voir le résultat en film, mais là, tout de suite, j'ai du mal à imaginer...
Le XVIIIe siècle présenté est bien entendu totalement fantasmé, réinventé et revisité à l'aune des obsessions sfariennes habituelles [1], et de ce point de vue, c'est plutôt réussi - cela rappelle un peu
Le Minuscule Mousquetaire, dont on recroise d'ailleurs brièvement le héros. Sauf que le MM est un modèle de rigueur narrative (limite austère) à côté de ces
Lumières de la France... vous voilà prévenus...
Donc si vous êtes fan hardcore de Sfar, que vous n'êtes dérangé ni par l'évolution de son style graphique ces dernières années, ni par la non-évolution de ses marottes
, et de façon générale client de son style dans ce qu'il peut avoir de plus "totalement libre" ou "complètement foutraque" (formulation au choix), cet album est fait pour vous, mais vous n'avez probablement pas besoin de que je vous le dise. Sinon, eh bien... à vous de voir.
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[1] ... mais je trouve quand même un peu dommage que la seule fois ou presque où Sfar se risque à une allusion "historique" directe, il se plante en beauté : lorsqu'il évoque la circulation des ouvrages du marquis de Sade (p.11), ce qui paraît... un tantinet problématique, avant la période révolutionnaire. Mais bon, il se rattrape en reprenant à sa sauce tout plein de tableaux de Fragonard, alors...