Cooltrane a écrit:Du coup, ce que j'essaie de faire ici, c'est une remise en perspective de certains faits et de mon vécu. Vécu qui devait être proche du lecteur Nord Am lambda à deux cas près >> contrairement à la norme US/Can, je lisais pas mal de BDFB (abonné à Tintin, (A Suivre) et Circus) et je n'aimais pas les superslipards .
Erm. Je ne suis pas certain que ce soit la meilleure entrée en matière. En gros, tu étais proche du lecteur Nord Am lambda sauf que tu lisais du franco-belge, et que tu n'aimais pas le genre qui représentait alors l'écrasante majorité de l'offre locale. On est mal parti.
C'est comme l'histoire des trois petits cochons, sauf qu'ils n'étaient pas trois et que ce n'étaient pas des cochons...
Cooltrane a écrit:On peut faire le parallèle avec Angougou dans les 70's à leurs débuts et les prix attribués: avaient-ils le même retentissement qu'ajd?? Y avait-il les 95% des medias Frainches ou Gelbes qui savaient ce qu'était les Alph-arts??
Au départ, ce n'étaient pas les Alph-arts. Il y a eu les Alfreds (de 1981 à 1988), les Alph-Arts (de 1989 à 2003 a priori), les Essentiels (2007-2009) et enfin les Fauves (depuis 2011). Le Festival d'Angoulême commence à avoir de l'importance à partir de 1982 (premières visites officielles de ministres) avec dès 1983 les 15 mesures pour la bande dessinée annoncées par Jack Lang (alors ministre de la Culture).
Cooltrane a écrit:Du coup, un grand prix à Angougou en 75 (par ex) ou un prix à San Diego en 87, ce n'est pas du tout la même caisse de resonance qu'ajd. P-ê moins chez les professionels (success d'estime) que chez le grand public (success commercial)...
Mouis, enfin, depuis le début de cet échange (et comme d'autres l'ont noté), tu ne cesses d'osciller entre le succès d'estime et le succès commercial (même si l'on sent bien que c'est ce dernier qui compte avant tout à tes yeux).
Mais juste en faisant deux minutes de recherche ce matin, je trouve deux éléments qui semblent plaider pour une importance forte de Moore au milieu des années 1980 (soit avant qu'il ne claque la porte de DC -- chose qui avait déjà fait pas mal de bruit, signe qu'il était déjà important et reconnu).
1. Moore est recruté par Len Wein en 1983 sur la base de ce qu'il a publié en Angleterre (où il est déjà reconnu -- 2000AD étant une publication iconique sur le marché briton); cf.
Wikipedia. Je cite:
"Moore's run on Swamp Thing was successful both critically and commercially, and inspired DC to recruit European and particularly British writers such as Grant Morrison, Jamie Delano, Peter Milligan, and Neil Gaiman to write comics in a similar vein, often involving radical revamps of obscure characters. These titles laid the foundation of what became the Vertigo line."Ça me semble assez clair -- et s'il fallait encore d'autres preuves, le simple fait que Moore contribue à beaucoup de titres est un autre indice de son succès.
2. Lorsqu'éclate la crise chez DC, qui va amener Moore à claquer la porte, le Comics Journal fait
un entretien avec Moore, et il ressort de cet entretien que Moore et Miller (et dans une moindre mesure Chaykin et Wolfman) font partie des auteurs "qui comptent". Ne serait-ce que dans l'introduction:
"This interview was given in response to a 1987 debate about Marvel and DC rating comics (fueled by a comic shop being closed due to community pressure/the obscenity charges facing Friendly Frank’s, which eventually led to the formation of the CBLDF). DC announced new guidelines, with new ratings — “Universal, Mature Readers, and Adult” — and certain creators, including Frank Miller, Alan Moore, Marv Wolfman, and Howard Chaykin, among others, objected to not having been included in the decision-making process."Cooltrane a écrit:J'irais même jusqu'à imaginer que son premier prix Angougou attibué à Moore a eu plus d'effet sur sa carrière que les prix précédents reçus en Am Du Nord.
A mon avis, les prix n'ont pas eu plus d'impact que ça sur sa carrière: en 1989, la "légende" d'Alan Moore (l'image d'un auteur si intransigeant qu'il refuse de travailler pour DC et qu'il interdit que son nom soit listé au générique des adaptations cinéma) est déjà établie, et fonctionne à plein.
From Hell,
Big Numbers et
Lost Girls viennent confirmer cette aura, chacun dans leur genre, mais tous s'inscrivant dans le mythe d'une œuvre réalisée envers et contre tout (durée de la gestation, publication contrariée, sujets difficiles/polémiques). Mais pour moi, dès 1988, Moore est reconnu comme un grand auteur.