Non, je pense qu'elle a été composée spécialement pour la circonstance. Il s'agissait tout de même pour partie de rendre hommage à son maître et ami Joseph Gillain. La rédaction, en prévenant Franquin suffisamment tôt, savait pouvoir compter sur un chouette dessin.
Après, sur les méthodes de travail et d'archivage de Franquin, je n'ai pas d'infos particulières concernant sa réactivité face à ce type de commande, sachant qu'en 1985, Franquin avait quarante ans de boutique. Il savait à peu près tout faire, même sans filet. Mais, consciencieux et éternel insatisfait, on peut d'ores et déjà prétendre qu'il a dû faire plusieurs crobards de travail pour parvenir à ce résultat.
Un virtuose comme Franquin faisait beaucoup de travaux et d'esquisses préparatoires en marge ou en sus de sa fournitures de planches. Il devait conserver (découper ?) et annoter ou répertorier quelques spécimens qui se dégageaient et lui plaisaient le plus, et sur lesquels il pourrait compter le moment venu pour s'en inspirer et les décliner en fonction des besoins.
Ainsi du cow-boy à pied ou à cheval, au bar, galopant, du motard, du cycliste, du trapéziste, du patineur, du tromboniste ou trompettiste, guitariste, du militaire (qu'il abhorrait) en tenue d'apparat ou de combat, passant la troupe ou le matériel en revue ou en pleine action meurtrière, etc...
Que pour ce numéro spécial Western Franquin ait rouvert une boîte à archives ou une farde pour en extraire un modèle plus ancien afin de gagner du temps, c'est une possibilité. Sans être non plus un impératif absolu, car il aurait tout aussi bien partir de zéro, avec son niveau de compétences.
Une chose est certaine : ce genre de cow-boy, dans une attitude proche et avec ce style graphique (car le style de Franquin a tellement évolué dans le temps qu'il faut aussi en tenir compte), il avait un petit air de déjà vu, en effet, chez Franquin.
En 1979, six ans plus tôt, il avait livré son fameux gag du Marshall pour un Tintin trimestriel spécial western.
Et comme le souligne Vainsy, dans les marges et bas de pages des années 70, il me semble avoir déjà vu un cow-boy franquinien d'une allure pouvant rappeler ce bel édenté souriant. Mais la présence du trombone à coulisse, en revanche, me paraît nouvelle.