A propos des propos de la malheureuse veuve, voici une réaction que je trouve intéressante à lire, parce qu'elle vient d'une autrice BD, historienne, féministe, anticarcérale et abolitionniste.
Marie Bardiaux-Vaïente a écrit:Qu’une victime endeuillée, une victime qui plus est endeuillée de manière abrupte et très récente, tienne des propos qui disent son désarroi et sa colère, je ne lui en ferai jamais reproche.
Il y a des personnes aptes à ne jamais souhaiter la vengeance, à ne pas même l’éprouver. J’ai compris au fil des années à quel point nous sommes rares, mais j’en ai pris acte : ce n’est pas la norme.
En revanche, que des partis politiques sautent sur l’occasion pour tenir des propos sécuritaires, racistes, ça c’est dégueulasse.
La récupération politique des drames pour nourrir une soi-disant démonstration du laxisme ou que sais-je de la justice (alors que jamais nous n’avons autant incarcéré ni jamais nous n’avons autant mis sous écrou des personnes non détenues en établissement mais sous le coup d’obligations judiciaires lourdes {contrôle judiciaire, assignation à résidence, etc} => 1/4 de million de personnes dans ce pays (oui oui … vous avez bien lu) => le milieu ouvert de type sursis probatoire ainsi que ceux cités avant c’est quasi 200 000 personnes auxquelles nous devons rajouter plus de 75 000 personnes enfermées), est éhontément fausse, relève du pur mensonge et de la pulsion malsaine du tout carcéral dont la société est profondément malade.
Ça ne sert à rien, c’est même totalement contre-productif (si la prison était utile ça se saurait depuis 2 siècles d’usage d’un système carcéral massif), il y a même un glissement des pratiques d’enfermement dans la « société libre » qui devrait à tout le moins être interrogées.
Que personne ne s’imagine à l’abri.
Alors bien sûr, entendre « 1981 n’aurait pas dû exister » avec tout ce que cette phrase induit ne me laisse pas indifférente.
Malgré tout, mon problème aujourd’hui n’est pas le propos d’une personne victime qui sous le coup des colères et émotions (et je n’irai pas interroger son idéologie profonde, cela ne me concerne pas), se laisse publiquement aller à souhaiter la mort d’Autrui.
Non. Ce qui me glace aujourd’hui, c’est la façon dont ce sujet, est systématiquement monté en épingle par les droites et extrêmes droites, sans bien sûr aucune empathie pour les victimes qui ne servent là que de chambre d’écho à s’emparer, pour diffuser une idéologie crasse en jouant avec les stéréotypes (« les étrangers tuent nos femmes, nos filles, et nos gendarmes »).
La justice ne sera jamais la vengeance.
Elle est même parvenue à l’institutionnaliser comme norme et règle, JUSTEMENT depuis 1981.
Le chagrin privé ne doit pas servir à « en faire une affaire » => c’est bien pour cela que les tribunaux existent.
Ne nous engouffrons pas là-dedans.
Nous en serions toutes et tous victimes.
Concernant le passage que j'ai mis en gras : MBV a été violée à l'âge de 18 ou 20 ans (ce n'est pas un secret, elle l'a raconté dans Féministes). C'est un rappel du contexte, et de pourquoi elle a écrit ça.
Et je vous mets la BD, tiens.