de jolan » 11/11/2020 00:30
Bon, pour ma part j'ai revu ce film
The Offence – Sidney LUMET – 1972
Une œuvre atypique. Il n'y a que du gris, du glauque, du sordide dans ce film. A commencer par le sujet, l'enquête, un fait divers sordide, des jeunes collégiennes violées. Puis les lieux. Ces paysages de banlieue anglaise morne et pluvieuse, cette ville sinistre, ses pavillons et immeubles sans vie, ses façades déshumanisées, ce commissariat en reconstruction, avec ses salles d'interrogatoire, ses couloirs aux néons froids, couloirs des tréfonds de l'âme humaine que nous nous apprêtons à emprunter. "Bloody hell" !
Et enfin le personnage de Sean Connery, dont le film épouse le point de vue (et la confusion mentale, dès le plan d'ouverture). Un inspecteur obstiné (- "Des soupçons ? - Pas encore – Ce n'est pas votre habitude"), mais rongé par ses démons intérieurs, les "images" de ses enquêtes, des victimes, ses pulsions et sa violence contenues depuis des années ne demandant qu'à exploser - la misère sexuelle et relationnelle de son couple aggravant les choses. Le rôle le plus sombre et le plus surprenant de sa carrière (qu'il a instigué pour se sortir du carcan des James Bond, et pour lequel il a participé à l'écriture). Un personnage des plus ambivalent. "Bloody boy" !
Au début on voit en lui un homme empathique déterminé à arrêter le violeur, la souffrance des victimes, surtout que c'est lui qui "retrouve la fillette" (mais avec une attitude de violeur, d'ailleurs de quel manteau parlent-ils après, ce n'est pas le sien ?), puis au fur et à mesure il devient de plus en plus violent (avec sa femme) et inquiétant, le montage nous montrant bien qu'il perd le contrôle, la mémoire des faits, et que son imagination lui joue des tours. Il semble surtout avoir reconnu en une minute le coupable (épatant Ian Bannen, là aussi le rôle de sa vie), parce qu'il s'est reconnu en lui ("J'ai raison à 100% !"). Son quotidien de policier l'a finalement confronté à une réalité qui le détruit de l'intérieur. Peut-être a-t-il besoin de cette horreur pour se sentir au-dessus des criminels (dont il n'est sans doute pas si éloigné, son métier le protégeant), pour se croire capable de sauver des vies, alors que la sienne est ratée. "Bloody life" !
Mais on assiste au drame sans jamais pouvoir adhérer (le côté pièce de théâtre sans doute, et son huis-clos étouffant), l'impact s'annihile de lui-même, malgré la force et la noirceur du propos (chacun a sa part de frustration et de fantasmes plus ou moins inavouables, et c'est en révélant l'inspecteur à lui-même que le témoin signe son arrêt de mort). Sur ce point c'est assez bien fait, le film en se greffant au point de vue de Connery met le spectateur face à sa propre part d'ombre. Tout comme il le laisse juger de la culpabilité de Baxter et de Johnson (ça change des films de procès que Lumet a multiplié tout au long de sa carrière) en évitant tout manichéisme. "Bloody bastard" !
Par contre il faut un peu lutter pour aller au terme d'un film trop long.
C'est un poil sinistre pour me "plaire" vraiment, mais la construction cyclique, le montage inversé et subliminal, en un mot la réalisation est intéressante, le film est intelligent, donc ce sera
3/6
Jolan, le gars qui n'a le droit de ne rien dire, sinon ses posts sont supprimés illico par Nexus.