Frannck a écrit:Thierry_2 a écrit:nexus4 a écrit:Il faut aussi savoir où le maquettiste a placé le dessin. A côté d’un article sur Gaza ou sous une pub pour les pâtes Panzani.C’est un dessin pour Libé, pas pour Instagram. D’où l’expression ”dessin de presse”. Le contexte est peut-être insufflé par la mise en page. Dans VA ça aurait été différent.
j'aurais envie de dire qu'on s'en fout à partir du moment que le dessin de presse est désormais massivement partagé via les réseaux sociaux. Je pense que la majeure partie de ceux qui ont vu ce dessin n'ont pas ouvert Libé. Si le sens d'un dessin de presse dépend de ce qui l'entoure sur la page du journal ou si il ne se suffit pas à lui-même, n'est-il pas raté ?
Quand il faut ajouter tous les éléments de contexte que tu réclames, je crois que même un article de presse n'a pas ton approbation. Certains regrettent que Coco ne soit pas morte et jettent de l'huile sur le feu des fanatiques.
joli biais d'association. Je m'incline devant une pensée aussi fulgurante.
je vais devoir préciser ma position parce que, visiblement, il y a une difficulté à appréhender le monde autrement qu'en noir et blanc
je critique un dessin de Coco
Je ne critique pas Coco, l'autrice, la personne de chair et de sang, la rescapée de l'horreur de Charlie Hebdo
Je condamne les menaces de mort dont elle a fait l'objet à cause de ce dessin
Je condamne les entraves à la liberté d'expression
je suis pour le droit inaliénable à la caricature
tant qu'à faire, je considère les attentats (oui, j'utilise bien le mot "attentat" sans guillemets, ni ambiguité) du 7 octobre comme une abomination
oui, le Hamas est une organisation terroriste
ça va, j'ai bon ?
J'ai le droit d'articuler une opinion (que j'espère suffisamment argumentée) qui ne vas pas dans ton sens.
je reprends, un dessin de presse est une unité narrative en soi. Il doit faire sens par lui-même, sans devoir reposer sur un contexte externe. Vous partez du principe que c'est un dessin de presse, sorti d'un journal avec une idéologie que personne n'ignore, mais par la magie des tweet et retweet, de Facebook, d'instagram, etc., les dessins de presse perdent le lien avec leur origine en 3... 2... 1... secondes. Combien ont vu arriver ce dessin sans savoir qu'il vient de Libé, en ignorant sa ligne éditoriale. C'est juste un fait. C'est ainsi que les médias sont consommés. Il faut s'y faire. Fast read, fast view, de préférence pour renforcer son point de vue.
Quelqu'un reçoit la notif sur son écran et il ne sait rien de l'origine.
Il voit un dessin qui raconte une histoire. Mais quelle histoire ?
En évacuant le fait qu'il y a une guerre, qu'elle est la cause d'une catastrophe humanitaire qui se déroule sous nos yeux, comment interpréter ce dessin ? Comment ce dessin peut-être reçu par quelqu'un d'autre que vous ? En 3 secondes, chacun l'a fait à sa manière. Et, au vu de ce qui est montré, la charge n'est pas sur la guerre et ses ravages. Que reste-t-il alors, par défaut ?
La question n'est même pas de dénoncer l'un ou l'autre camp, ou l'indifférence internationale. La réalité va bien au delà. La caricature est nécessaire, mais, je me répète, l'art doit déranger les confortables et réconforter les dérangés. S'il s'en prend aux dérangés, cela devient de l'acharnement. Même bête et méchant, c'est problématique. Peut-être que vous pourrez me sortir 15 dessins où Coco prend la défense des victimes civiles, cela ne change rien au fait que ce dessin manque sa cible de très loin. Peut-être que Coco a choisi son camp. Ce dessin donne un élément de réponse
Honnêtement, il manque trois traits à ce dessin. Une kalash à moitié enterrée ou une explosion au loin... il n'est même pas nécessaire de pointer un belligérant en particulier. Il faudrait juste que le dessin dresse un portrait cohérent de la situation.
Il y aura toujours des gens qui vont y voir le pire. C'est le danger. Cela ne permet absolument pas de menacer un artiste.
Condamner l'interprétation d'un autre parce qu'elle ne cadre pas avec la sienne n'a aucun sens. Chacun interprète avec son bagage et ses biais. Et ne pas posséder les mêmes biais et bagage ne rend pas l'autre inapte ou partisan. Cela le rend juste différent. L'altérité, ce drôle de concept qui fait peur. Il est même possible de se demander pourquoi l'autre possède un point devue différent. Essayer de comprendre... faire preuve d'empathie, et expliquer son point de vue. Peut-être qu'à la fin, chacun restera sur ses positions, mais c'est déjà un pas fait vers l'autre.
Il est possible de condamner sans ambiguité les menaces contre Coco et, en même temps, reconnaître que ce dessin est raté. iL n'est pas interdit d'entendre les arguments de ceux qui trouvent ce dessin problématique mais qui ne cautionnent pas les appels à la violence. A force de tout simplifier, d'aligner toutes les prises de position sur les plus extrêmes (alors, je répète, je critique le dessin de Coco, je condamne sans ambiguité les attentats contre Charlie Hebdo, c'est clair ?), c'est refuser d'essayer de comprendre. Et, contrairement à ce que dit Manuel Valls, comprendre, ce n'est pas excuser. Comprendre, c'est d'abord écouter, et, de là, discuter. Sans obligation de résultat, cela dit.