Je crois que Chaland appréciait jouer de cette ambiguïté.
Pour avoir lu récemment nombre de ses ouvrages, ainsi qu'appris beaucoup de choses sur sa carrière, il avait une très grande admiration pour les grands anciens de la BD franco-belge : Jijé, Peyo, Franquin, Tillieux, Hergé, etc...
Son graphisme de néo-ligne claire ainsi que les thématiques de plusieurs de ses récits et albums en témoignent.
Pour autant, il était un auteur de la mouvance des années 70, de la bande de Métal hurlant, style punk dans leur tête tout du moins.
Sa BD est donc très folle, sous un aspect très sage.
C'est ce décalage qui a fait sa réputation, qui fut son style, et qui déconcerte de nos jours encore.
C'est bien du second degré, il n'y a aucun racisme dans les propos de Chaland, dans sa bande dessinée, mais un sous-texte de vilain garnement, qui viole les conventions, qui dynamite parfois ses récits, qui explore de nouvelles façons de faire de la bande dessinée adulte, parfois même (très) vulgaire dans Captivant par exemple, sous des dehors presque enfantin.
L'exemple le plus connu est cette couverture de Métal hurlant aventure

avec son guerrier africain, son parlé "petit nègre" et renforcé par ce sous-titre Nostalgie Coloniale, alors que nous sommes pourtant dans les années 80, que Chaland est français et qu'il parle de la décolonisation belge (mais n'était-il pas le plus belge des français ?)
Chaque image de Chaland doit être lue et abordée avec ce regard adulte, empreint d'une solide culture générale, pour la comprendre dans toute sa complexité. Chaland était un perfectionniste.
cela se voit aisément sur son dessin
cela nécessite un peu plus de recul et d'analyse sur son propos