Cyr_il a écrit:Jimbo, par rapport au franco belge tu imagine bien que, ce que tes parents te transmette t'apporte par la suite une facilite pour appréhender les choses.
Ma mère m'a mis des livres entre les mains dès que j'ai pu attraper des trucs. Mon premier bouquin, c'est un livre en chiffon, l'histoire d'un chat blanc et d'un chat noir, amoureux l'un de l'autre et qui se roule dans la farine et le charbon pour avoir la couleur de l'être aimé. Je l'ai encore. En chiffon, si bien que je pouvais le mâchonner sans souci.
Ensuite, classique, Bibliothèque Rose, Bibliothèque Verte, un peu Jules Verne, beaucoup Agatha Christie, la BD (Astérix, Sammy, Lucky Luke, un peu Tintin), et puis un jour les super-héros. Ma mère ne m'a rien montré réellement, ne m'a jamais rien interdit, mais dès qu'il s'agissait de lecture, elle m'offrait tout ce que je demandais.
Cyr_il a écrit: Enfant des années 80 mon père me posé sur les genous du Lucky luke, tuniques bleus ou asterix, bref ce qu'il aimé... alors derrière tu as tendance a en faire ton standard. Ta base.
En fait, je me suis rendu compte, par la suite, que mon standard, c'était
Télé Poche. Entre, disons, 1975 et 1985, je lisais
Télé Poche, et dedans il y avait des BD. Le
Superman de Wayne Boring, le
strip de
Spider-Man par Stan Lee et John Romita (le père, pas le fils), le
Tarzan de Russ Manning… Il paraît que le goût esthétique se forge aux alentours de sept-huit ans (et le goût musical vers douze-quatorze ans), et chez moi, ça correspond à la découverte de pas mal de BD américaine dans
Télé Poche.
Bizarrement, dans les mêmes années, je lisais
Tintin,
Pilote,
Super As, le
Journal de Mickey,
Spirou. J'aurais donc dû avoir plus de références franco-belges. Mais ça n'imprimait pas (si, j'adore
Clifton, j'ai un bon souvenir de
Barelli…).
Donc c'est complexe, quand même, la construction d'une grille de lecture.
Cyr_il a écrit:Jamais on aurait pu me donner a lire un comics car c'était bien moins répandu de part chez moi...
J'ai grandi dans un petit village, c'est dans l'épicerie que j'ai trouvé un
Nova, avec les Fantastiques en couverture. J'allais à l'école dans une ville de vingt mille habitants, je passais à la maison de la presse pour prendre mon
Strange du mois et un J'Ai Lu SF quand j'avais un peu plus de ronds (voire un
Astérix : j'ai acheté des
Sammy quand c'était encore des albums souples, à la maison de la presse). C'est pas tellement dur de trouver, ce qu'il faut, c'est identifier ce qu'on aime. Une fois qu'on a mis un nom dessus, on sait quoi chercher et où chercher. Mais effectivement, si on n'a pas encore croisé ça, on sait pas qu'on a envie de le chercher.
Cyr_il a écrit:Comme timi ma nano culture du comics s'est quasiment faite uniquement de part les dessins animes et films américains.
Pareil, j'ai commencé par les dessins animés de
l'Araignée et des
Fantastiques. Et la série
Wonder Woman. Et la série
Hulk. Ce sont les dessins animés qui m'ont conduit aux mensuels en kiosques.
Cyr_il a écrit:Alors oui quand comme seule référence comics tu as iron man le film et la série walking dead (j'exagère volontairement)
mais je comprends l'image.
Cyr_il a écrit:derrière tu as forcement du mal a appréhender des livres comme le phénix noir des année 60...
Des années 1980, mécréant !
Cyr_il a écrit: bien que le récit soit de qualité, j'ai adorer malgres le nombre important de bulle relatant la pensee des protagonistes, mais, le rendu visuel paraît forcement pour des gens comme moi a des années lumières...
Bien sûr, que c'est différent.
Mais comme je disais chaipluhou, "différent" ne veut pas dire "inégal".
Quand Siegel et Shuster racontent comment Superman se mêle du business des marchands de canons, ils racontent d'une autre manière qu'aujourd'hui. Mais ils racontent bien, avec des moyens qu'on n'utiliserait plus aujourd'hui, ou alors seulement dans une perspective d'effet de style, mais on peut difficilement soutenir qu'ils racontent mal.
Quand Denny O'Neil parle de féminisme dans
Wonder Woman en 1968, c'est maladroit, c'est gauche, c'est même parfois sexiste et contreproductif, mais ça existe, il l'a fait, plein de scènes demeurent réussies. Quand il parle de drogue dans
Green Lantern / Green Arrow, vers 1972, c'est plus adroit, plus équilibré, un peu démonstratif et donneur de leçon, mais ce sont les moyens de l'époque, et l'avancée est spectaculaire.
Etc etc.
Pour ce qui est des
X-Men de Byrne (qui me semble l'un des meilleurs travaux de Claremont et l'un des meilleurs travaux de Byrne, pour l'une des meilleures périodes des X-Men…), le coup des bulles redondantes avec l'image, sérieux, je trouve ça exagéré (ou bien c'est mal rendu par la traduction, mais je ne m'avancerais pas, je ne la connais pas).
Revoyons l'action au ralenti.
Bon, j'arrête là. J'aime tellement ces épisodes que je vous mettrais toutes les pages si je m'écoutais.
Qu'est-ce qu'on voit ? Un dessin vigoureux, vivant, avec des personnages expressifs et tous bien identifiés. Des effets pyrotechniques maîtrisés, une narration sobre et facile à suivre, mais qui se permet des cases verticales, bref, question "graphisme", rien à dire.
Les textes. Trois catégories : la voix off du narrateur omniscient qui recadre constamment le récit, en "résumant", en nommant les personnages. C'est plutôt bien vu. Ça permet au lecteur de passage, qui découvre, de comprendre rapidement qui est qui. Et en évitant la voix off, ça évite ce qu'on appelle la focalisation interne, à savoir suivre l'histoire par le regard d'un personnage précis. Si les personnages pensent, ils ont des bulles de pensée, chacun la leur, donc il n'y a pas de "vedette" qui tire la couverture à soi.
Après, on me dira que la voix off "raconte" un peu l'action. Enlevons-la. Quand Storm prend Phoenix dans sa tempête, est-ce que le lecteur qui ne connaît peut comprendre de quoi il s'agit ? Sans doute pas. Pour faire comprendre le coup de vent, sans le texte, il faut donc repenser la planche entièrement, et donc sortir du système. Dans le système utilisé ici, c'est assez cohérent, on passe de l'info par le texte qui permet de contextualiser, à l'usage du nouveau lecteur, sans perturber le lecteur déjà fidélisé.
Pareil avec la planche du soleil : si le texte ne dit pas qu'il s'agit de la station Starcore, le lecteur nouveau le sait-il ? Non. La méthode "moderne" consisterait à zoomer sur le vaisseau pour voir l'inscription sur le fuselage, ce qui prend plusieurs cases et entre dans un autre système narratif, qu'on appelle la "décompression". Mais si on n'adopte pas le système de la décompression, alors utiliser le texte afin de passer de l'info complémentaire est un système valide.
Et ainsi de suite.
Ce que je veux dire, c'est pas que les
comics de 1980 sont géniaux et ceux d'aujourd'hui nuls à chier, loin de là. C'est que plusieurs systèmes narratifs existent, et que la prééminence de l'un d'eux de nos jours ne veut pas dire qu'il est meilleur. Ça veut seulement dire qu'il est plus fréquemment utilisé. Mais les goûts changent, les méthodes aussi, dans dix ans on écrira des
comics encore différemment.
Donc, quand on lit des comics (de super-héros ou autre) ou du franco-belge, il faut pas oublier de laisser fonctionner une petite appli, en tâche de fond dans le cerveau, qui regarde comment les choses sont faites. Comme disait Jospin dans les Guignols, "y paaaaas d'méthode !"
Cyr_il a écrit:Tient d'ailleurs il ma semble t'avoir vu citer ici et la william vance, étant un inconditionnel de la série XIII quand je regarde le dessin du jour du soleil noir datant de mémoire de 83 ou 84 et bien je trouve le dessin hyper chiadé, bourré de details ! Tu trouve autant de détail dans un star wars du début 80 ?
Alors attention, je suis partisan de comparer l'incomparable, mais encore faut-il un peu savoir comment les choses sont faites. Moi aussi, j'adore
XIII (j'y suis arrivé justement parce que ça ressemblait un peu à un
comic, je dois avouer), mais n'oublions pas qu'un album de XIII, c'est 46 pages tous les ans, avec un format de publication mais aussi de travail plus grand. Donc plus de cases, mais plus de temps pour les faire.
Un
comic book, c'est 22 pages tous les mois. Avec moins de cases, sur un format de travail plus petit. Et souvent il y a un encreur. Donc les conditions de production ne sont pas du tout les mêmes que dans le franco-belge.
Ceci étant admis, regardons un peu.
Un Star Wars par Walt Simonson et Tom Palmer.
Pas réellement chiche en détails.
Une double page.
Quelques autres pages de la même période (sans doute ma préférée dans la vieille série Marvel).
J'ai souvent entendu parler du manque de décors des
comics. Je crois que cette accusation tombe d'elle-même, ici.
Si l'on garde à l'esprit les différences de conditions de production (22 pages par mois, moins de cases, un encreur), ce genre de planche n'a pas à rougir.
Et puisque j'ai envie de vous souhaiter la bonne nuit en fanfare, je vais revenir sur les
X-Men de Byrne. Alors ouais, il bénéficiait d'un encreur passionnant, Terry Austin, qui rajoutait de la matière sur toutes les surfaces. Mais bon, à la base, il y a le dessin de Byrne.
Moi, j'avoue, que des mecs aient été capables de tomber une vingtaine de planches de cet acabit tous les mois, ça me scie encore trente ans après.
Allez, j'arrête de vous bassiner avec
Star Wars et les
X-Men.
Jim