Allez ! Juste pour me faire incendier, une déclaration provocatrice et néanmoins sincère :
Je préfère le dessin de JANRY à celui de FRANQUIN !
Tous les deux font preuve de cette facilité et de cette évidence qui est la marque des grands, et Franquin a atteint une véritable perfection dans le dessin humoristique, MAIS je trouve que les recherches d'expressivité et de mises-en-page qui préoccupaient Franquin, Janry les a menées encore plus loin et encore plus fort (encrage, cadrages, personnalité...), comme si le premier s'était réincarné dans le second, mais en bien plus jeune et dynamique. Comme si Janry avait acquis tout le savoir-faire de Franquin (et de Greg/Dupa) dès ses débuts, et qu'il avait poursuivi ces recherches au même rythme que ce qu'avait fait Franquin tout le long de sa vie... jusqu'à "Machine qui rêve" et "Spirou à Cuba" qui sont l'aboutissement absolu de ce laboratoire créatif (ce qui n'empêche pas l'erreur stratégique d'avoir voulu imposer ce style à la série Spirou).
Et j'irais même plus loin : le "Petit Spirou" de Tome et Janry, c'est un peu comme les derniers albums de Franquin, ces Gastons en pointillés, ces Idées Noires défoulatoires, ou ces Tifous animés... c'est le "repos" rémunérateur bien mérité qui clôt une vie entière de travail et de recherches. Plus besoin de s'échiner à produire du bon dessin bien léché : la fatigue s'est installée, le statut de star avec son personnage-phare sont atteints, tout effort supplémentaire n'apporterait que souffrance pour un résultat pas meilleur (même pas ensencé par la critique, aux résultats visibles seulement après 4 ou 5 albums épuisants), on peut désormais continuer en "roue-libre", profitant de toutes ces années passées à faire ses preuves, profitant surtout d'un catalogue fourni, de qualité, aux droits d'auteurs rassurants.
Bref, la fougue des auteurs, c'est très fragile : casser "Spirou à Cuba" (comme je pense il fallait le faire), c'était casser l'élan créateur de Janry pour le pousser vers une "semi-retraite" butée et fermée.