par rapport au post d'onehmouninehl, mes souvenirs d'Antigone de Jean Anouilh sont beaucoup trop loin pour que je me rappelle une éventuelle ressemblance du scénario avec celui de cet album (et ce que je viens d'en lire dans Wikipedia ne montre pas, pour moi, de similitudes). En revanche, s'agissant de l'esprit (l'occupation et la résistance), il m'a rappelé les idées exprimées dans une pièce étudiée au lycée dans la dernière année du cours de français : Montserrat, d'Emmanuel Roblès, qui se déroule pendant la guerre d'indépendance du Venezuela contre l'Espagne, en 1812. Le contexte est différent, mais la thématique et les questions qu'elle soulève sont universelles et intemporelles.
On a donc ici une force occupante, qui a besoin d'une population occupée pour sa subsistance et qui utilise la terreur et la force pour s'imposer, tout en les pratiquant de façon "limitée", mais non supportable sur une longue durée, contre les occupés. Et il y a, pour les occupés, la double incertitude sur la durée et la finalité de l'occupation, qui entraîne, au moins initialement, nombre d'incertitudes pour clairement évaluer/discerner l'ensemble des paramètres avantages/désavantages de la soumission et de la résistance, que ce soit sur le plan de la survie personnelle ou sur celui de la survie de la collectivité. Mais l'évolution des évènements fait que des choix doivent être faits, dont l'issue est la vie ou la mort, et pas que pour soi...
L'histoire nous montre donc les destins de nombreux personnages et les graves conséquences, pour leur survie, de leurs propres choix et des choix d'autres personnages face aux dits évènements. Demeus n'est que l'un d'entre eux, mais il est le combattant le plus expérimenté parmi les occupés et celui qui sera jugé, à tort ou a raison, comme ayant eu le plus d'influence sur les évènements.
Dans ce contexte évolutif et complexe, j'ai bien aimé le non manichéisme s'agissant du comportement des occupés mais aussi, jusqu'à un certain point, des occupants (le chef des occupants, malgré ses aspects pervers, est suffisamment ambigu sur la durée de l'occupation, la façon dont elle se pratique et celle dont elle doit se terminer, pour laisser croire de sa part à une forme [très !] relative de pragmatisme, plutôt qu'à l'expression de la seule force brute. Ce qui lui est d'ailleurs reproché au sein de ses propres troupes, beaucoup moins "ambiguës"...). On retrouve l'ADN des deux premières hexalogies et de ce qui représente une bonne part de leur intérêt.
Le This/Demeus de l'album est dans la droite ligne de celui de la première hexalogie. Courageux, idéaliste, mais, même s'il a gagné en maturité, il est parfois indécis et porté par les évènements, plus qu'acteur décisif. Et je trouve ça bien aussi. Ses failles nous changent des héros si stéréotypés d'un si grand nombre de héros de BD d'aventure.
Petite "surprise" (plus que réellement "déception"), et on retrouve là quelque chose plus présent dans la deuxième hexalogie que dans la première, la fin n'en est pas totalement une par certains aspects. Outre la façon dont Demeus devra vivre les évènements, le sort de Valine, notamment, très impliquée dans les évènements et leur complexité, reste en suspens. Même si cela apporte une certaine "profondeur" à l'histoire, c'est aussi une frustration.
Sinon, s'agissant de la temporalité, je trouve assez judicieux le placement de cet album juste entre la fin de la deuxième hexalogie et le début de la troisième (bon, OK, vu les dialogues sur "La guerre à Angleon", on est peut-être même déjà entré dans la troisième hexalogie). Il est une bonne suite aux deux premières et un bonne introduction à la troisième.