anaxarque a écrit:Je viens de lire, en VO, 2009 qui clôt Century. Rassurons-nous, ce qui avait été initié par 1910, puis 1969, devient cohérent même s’il faut s’accrocher, comme toujours avec l'ami Alan.
J'ai tout de même préféré le deuxième (montée de l'intrigue, références utiles et bien articulées, personnages bien travaillées et qui en prennent plein le museau…), mais ce troisième volume est pas mal fort.
Déjà, effectivement, résolution de l'intrigue sur l'Antéchrist. C'est intéressant, bien rythmé, avec une logique de quête qui fonctionne pas mal. La confrontation finale est bien, et en plus, ça ouvre vers d'autres déclinaisons possibles (purée, une
League située dans le futur, ce serait pas mal…).
Ensuite, les personnages sont bien travaillés. Et ce qui est intéressant, c'est que ce qui leur arrive renvoie directement à ce qui leur est arrivé précédemment (Quatermain et la drogue, par exemple). Cela pose donc une question sur la nature du héros, sur sa capacité à se transformer. Le héros échappe-t-il à sa condition initiale ? À son destin ? Ça, c'est passionnant. Du coup, comme la Ligue est réduite (en tout cas, la Ligue sur le terrain), l'intrigue fait intervenir des personnages qui sont comme des "générations suivantes". Sauf que ces générations suivantes sont déjà vieilles. On est encore dans le nihilisme des dernières pages de l'épisode précédent. Mais comme en plus, on boucle l'histoire, ça donne un côté très triste. Et en même temps étonnamment ouvert.
Enfin, une dimension intéressante dans le récit, c'est qu'on voit revenir de vieux personnages, parfois même pour une case unique. L'intrigue tisse des liens forts entre ce numéro et les récits précédents. Ça renforce ce côté "univers partagé", et cette sensation qu'il y a effectivement des combats au long cours sur l'ensemble de la série.
Ce qui me fait aborder le thème des références. Elles sont partout, effectivement, et les moins utiles au récit sont celles qu'on trouve dans les affiches murales ou dans les dialogues à la télévision. Elles, elles ne servent en fait que de décor, de clin d'œil, de jeu de complicité entre le scénariste et les lecteurs. Et elles sont sympathiques, elles permettent de créer une toile de fond bien riche. Un peu comme toutes les trognes d'acteurs qui passent dans la rue (John Barrowman, Matt Smith, Kiefer Sutherland, Masi Oka, et d'autres dont je ne retrouve pas les noms, et plein d'autres que je ne connais même pas…).
Après, il y a toutes les références qui sont utiles à la narration. Elles, elles se trouvent dans les dialogues de M, d'Orlando ou de Mina. Et elles, elles ne sont pas difficiles à repérer ni à comprendre. Elles donnent également une description intéressante de l'évolution de l'univers mis en scène, et permettent de développer le statut de la Ligue par rapport au gouvernement anglais.
Je n'ai pas la sensation que ce tome, ni les deux précédents, contiennent plus de références obscures que les deux premières sagas ou que le
Black Dossier (qui me semble le morceau le plus copieux à avaler, dans le domaine des références). Je crois plutôt que les références utilisées sont peut-être moins connues (alors que Nemo, Hyde ou d'autres sont dans le terreau commun de la culture, tellement profondément qu'on n'y fait plus attention). Il me semble par conséquent que les gens qui se plaignent des références (trop nombreuses, trop obscures, trop inutiles…) abordent le récit sous un mauvais angle, sous l'angle de la chasse au clin d'œil, alors que selon moi il conviendrait de l'aborder sous l'angle du récit d'aventure fantastique. Ouvrir la
League en se disant "
je vais dénicher toutes les références", c'est le meilleur moyen d'être agacé par celles-ci.
En l'occurrence, dans ce tome, une énorme partie des références provient de films et de séries télé ayant pour héros des espions anglais, et le reste provient de références déjà exploitées dans les récits précédents. Vraiment, rien d'insurmontable.
Bref, un tome riche, avec des personnages agréables, qui accomplissent leur destin et passent le relais. Et qui apparaissent très fragiles par rapport à des choses qui les dépassent. Volontaristes dans le tome précédent, ils sont un peu désabusés et au bord du renoncement dans ce volume. Ce qui ne les empêche pas d'avancer, et de mettre en branle des conflits cosmiques face auxquels ils ne sont que spectateurs. À mes yeux, ça ne les rend que plus héroïques encore.
Et extraordinaires.
Jim