egoes a écrit:@Vince : Suite et sans doute fin : je lis bien votre point de vue et peut comprendre la fatigue après ces week-ends de dédicace.
Clairement, on ne va pas être d'accord sur le fond, et c'est à chacun bien notre droit.
Vous dites que vous ne gagnez rien sur les dédicaces, ce n'est -de mon expérience- tout de même pas tout à fait vrai.
J'ai une petite anecdote à ce propos (vous me pardonnerez de prendre 5 minutes pour vous la narrer) : début septembre, je me retrouve à la fête de la bd à Bruxelles et je vois un auteur qui est assis, gentiment, et qui attend.
Il a l'air de légèrement s'ennuyer, ou peut-être est-il fatigué, allez savoir...
Je ne "suis" en tout cas pas la série qu'il dessine, mais en ai entendu parler "de loin".
Il n'a plus personne devant lui et, voyant qu'il n'a pas l'air de partir, je lui demande si les tickets pour ses dédicaces sont épuisés.
Il me répond, toujours gentiment, que ce n'est pas le cas.
Alors que je n'aurais pas du tout pensé à acheter sa bd en librairie (nouvelle série, déjà trop de bd's à la maison, toussa toussa), je me dis que le dessin a l'air pas mal et que c'est une occasion d'avoir une bd personnalisée (oui, les lecteurs de bd's peuvent, lorsqu'ils ne sont pas des trous du cul, être parfois un peu sentimentaux ).
Alors j'achète la bd, ce que je n'aurais donc clairement pas fait si j'étais juste passé devant l'ouvrage en magasin.
J'imagine que je ne suis pas le seul à agir comme ça (sorry, je n'étais donc pas en mesure de dire à l'auteur ce que je pensais de l'ouvrage et j'espère ne pas avoir été trop "lourd" ***) et ... CQFD, en ce qui me concerne* : les séances de dédicaces ne rapportent peut-être pas plus à l'unité, mais elles vous permettent bien de vendre ... plus d'unités !
Les auteurs "gagnent" donc bien "dessus" (et, pour reprendre votre expression que je trouve vraiment assez dénigrante dans le contexte où vous l'avez utilisée, c'est bien "mignon" de tenter de nous faire croire le contraire et de limiter la question du profit à celui qui est "immédiat" pour prétendre que les auteurs n'auraient rien à y gagner (on connaît tous l'adage : "sans intérêt, pas d'action")).
Pour ce qui est de Chauzy, je dois vous avouer vous en vouloir un peu de "salir" à ce point ma jolie histoire -même si ici aussi je comprends le triste point de vue que vous développez- et j'espère sincèrement qu'il a juste souhaité faire plaisir à un de ses lecteurs.
Non, je n'ai rien demandé (il y avait à cette époque tant d'auteurs!), et, oui, c'est bien lui qui m'a proposé -il n'était même plus à une table et à fait ça en se marrant ... sur un tabouret, sous les yeux admiratifs de mes potes et moi**- et a surtout pris le temps -un joli temps, d'évidence plus long que le temps d'un dessin "poli"- pour me faire cette dédicace.
Et, oui, on a poursuivi la discussion après (je n'ai pas regardé si un de ses collègues l'attendait pour aller manger en me maudissant en silence, mais ne maquerai pas de faire attention la prochaine fois ).
Bref, une belle rencontre (et un beau retour sur investissement pour lui, puisque j'ai, depuis lors, acquis encore plus de ses ouvrages, en pensant au "chic type" qu'il avait été (Dieu -colère de- que j'ai été bête, tout ce temps, sans doute !***).
En tout cas, quand, dans mon métier, je fais quelque chose de gratuit, ce n'est pas juste pour plaire ou par peur de décevoir.
Mais je dois être trop naïf (ou mignon), sans doute.
Voilà, c'est évidemment un peu aigri que je clos ce post, en relisant en effet le vôtre, dont on sent qu'il a été écrit par un scénariste aguerri, sachant bien mener son lecteur vers la conclusion qu'il avait prévue et qui, seule, comptait, en réalité, dès le début de son récit, pourtant commencé très gentiment et poliment (ou, autrement et tout aussi classiquement dit : le passage obligé par la Comté, Rohan et le Mordor).
« Vous vous attendiez à quoi ? Je suis un scorpion, c’est ma nature ! C’était plus fort que moi…», lui répliqua l’insecte avec assurance".
La violence, donc... Soit, so be it.
*j'oubliais : le dessinateur était un tout de même un peu étrange : il a pris son portable et a dessiné dans un cadre qu'il avait tracé avec celui-ci.
Je n'avais jamais vu ça et ai trouvé ça assez rigolo.
Alors j'ai été sur le net pour voir si le type était aussi rigolo et gentil (et puis ... voilà voilàààà ).
** juste pour le bon ordre : c'est sympa de penser que je pourrais impressionner quelqu'un physiquement. Ma compagne est à côté de moi et elle n'arrête pas de rire depuis que j'ai évoqué cette idée !
***En tout cas merci de m'avoir ouvert les yeux sur ce que les auteurs pensent des lecteurs lors de leurs dédicaces... et à quel point ce moment magique pour les uns est visiblement très régulièrement perçu par les autres comme une plaie...
Vous réagissez trop à chaud, mon cher Egoes.
Vous confondez Violence et Argumentation.
Vous oubliez ou déformez certains de mes propos.
Tout d'abord, rencontrer un lecteur qui n'a pas lu notre album ne nous dérange pas le moins du monde. Même si c'est quelqu'un qui connaît déjà notre travail. Nous pouvons parler avec lui des anciens livres, des projets à venir ou encore pitcher le livre en question.
Et, bien entendu, tout le monde ne peut pas acheter deux fois le livre et certains préfèrent attendre la dédicace, aucun souci.
Non, je brocardais la phrase "Vous êtes sur ma pile de lecture" dites avec assurance comme si c'était un honneur... de la part d'un lecteur qui avait acheté le livre à sa sortie... trois mois avant... avouez que la chose est bien moins normal, non ?
Je vous souhaite aussi que votre histoire avec Chauzy se soit passée comme vous le dites, j'essayais juste de vous faire ressentir un peu le point de vue de l'autre côté, comme quand j'explique ce que certains dessinateurs ressentent face à la dédicace. Parce que démonter l'argumentaire de Ronan en raison d'une fois avec Chauzy qui était super cool... c'est un peu léger comme argument.
De même, vous ne vous êtes finalement pas expliqué sur ces séances de dédicaces où l'on ne fait pas de dédicaces ?
Ensuite, je mets le holà tout de suite sur mon utilisation du terme Dédicateurs/Trou du culs. Je parle des "mauvaises" personnes que l'on peut rencontrer en dédicace. Je n'inclue absolument pas tout les lecteurs dans le lot, bien entendu. Mon message était assez clair là-dessus et seul un esprit chagrin détournera le sens de mon propos (et pour le coup, je ne vise pas seulement Egoes).
Certains lecteurs, par exemple, peuvent avoir dans leur attitude, un petit élément du Dédicateur... mais ils rattrapent la chose par une jovialité certaine, la politesse, des remarques pertinentes sur les albums, des questions et/ou un grand sourire. Un autre peut-être assez renfermé, mais rester polie, nous écouter et nous remercier. C'est un peu dommage, mais c'est tout de même l'essentiel.
Et rappelez-vous mes statistiques, hautement précises, de 9 sur 10.
La grande majorité des lecteurs que nous rencontrons nous apporte une réelle satisfaction.
C'est pour cela que nous faisons des dédicaces. Rencontrer son public. C'est aussi ça qui nous permet de parler de nos œuvres, d'entendre des lecteurs parler de nos personnages, et ça, c'est super. Donc oui, nous dédicaçons pour rencontrer notre public.
Concernant l'augmentation du nombre d'unités vendus... c'est un doux rêve, dès que vous vendez plus de 4000 exemplaires à chacun de vos albums.
Non. C'est peanuts. Nada. Nous vendons 80 "unités" sur un salon ? Super, j'ai gagné 40 euros !! Je me suis fait de la publicité ? Rien qui remplacera le travail de fond d'un éditeur et de son service marketing.
Même Chauzy, qui avec vous a gagné un lecteur à vie, et bien, du haut de sa quarantaine d'oeuvre, vous lui avez généreusement fourni entre 20 et 50 euros suivant ses droits et les répartitions dessinateur/scénariste. Génial !
En une dizaine de séances de dédicaces, un auteur gagne finalement entre 200 et 300 euros de droit... qu'il aura dans 2 ou 3 ans, le temps de rembourser son avance...
Il aura vendu 300 bouquins... alors s'il tourne à 10.000 exemplaires par sorties... bah ça change rien en fait.
C'est d'ailleurs un poil différent avec une séance de dédicace en librairie. L'intérêt financier principal ici, n'est pas le lecteur. Non. C'est le librairie. Rencontrer et échanger avec un libraire est primordial. Un libraire qui vous connaît, en général, vous vends mieux, fait plus attention à votre production, surtout avec tout ce qui sort.
Et les libraires sont en grande majorité des gens sympathiques, très intéressants et on passe de très bonnes soirées en leur compagnie... parce que ce sont un peu comme des collègues qui travailleraient dans un service différent... ils font pas le même boulot, mais ils sont de la partie, connaissent notre univers. Et c'est toujours rafraîchissants de parler avec des collègues, surtout dans un métier solitaire comme le nôtre.
Et puis, avec les années, pour Ronan et moi, de nombreux libraires sont devenus des amis. Enfin j'espère.
Et les seuls intérêts de faire un salon : revoir les potes et croiser ses lecteurs.
L'intérêt financier est toujours nul. Sauf en cas de rémunération par le salon, mais ce n'est pas si fréquent que ça (3 fois en dix ans pour ma pomme, mais je ne suis que scénariste, ça joue).
Ah, mais oui, c'est pas beau tout ce que je dis. C'est méchamment mercantile. Ce sont des chiffres, des statistiques, des stratégies commerciales, mais justement, retenez le propos sous-jacent : Nous ne venons pas en dédicace pour vendre !! Nous y venons pour rencontrer notre public, et ce, malgré les 10% de lourds. Parce que nous aimons rencontrer les 90% restants.
Et accessoirement, voire les potes (qui peuvent être des lecteurs, j'adore Saint Malo parce que j'y vois chaque année des lecteurs que j'apprécie énormément) en salon et rencontrer de nouveaux libraires.
Et quand je dis "nous", j'englobe la plupart des auteurs... bon, certains sont des cyniques hein... mais je balancerais pas !
Alors pourquoi autant d'usure me direz-vous ? Et bien parce que 8 week-end de dédicaces sur 11, c'était trop. Trop souvent, trop prenant, trop fatiguant.
Personnellement, pour exemple, en 8 semaines, j'ai dû cumulé au bas mot près de cinquante heures de train. Alors, je me plains pas, c'est parce que je vis désormais à la campagne et c'est un gros "kiff", mais ça use, ça fatigue.
Moi, la dernier date, j'avais pas envie, mais je n'ai qu'une parole, donc j'assume. Et puis au final, ce fut cool... malgré 13 heures de train...
Sinon, faire de l'humour sur les propos de Ronan et se moquer de lui, c'est cool, mais si je fais la même chose sur les vôtres, je suis un immonde scorpion ?
La seule raison de mon post, était, encore une fois, d'offrir un éclairage plus prosaïque sur ce que peut-être une séance de dédicace, les mauvais côtés que l'on peut y subir et d'expliquer l'énervement de Ronan.
Et puis, je n'ai jamais dit que vous étiez l'un de ses dédicateurs, je pense même plutôt le contraire au vu de vos propos. J'explique juste en quoi je ne suis pas d'accord avec vous au sujet de la dédicace. Ne soyez pas chagrin si cela va à l'encontre de vos idées.
Mon terme de "méconnaissance crasse" sur le milieu de la BD était peut-être un peu fort. Je m'en excuse. La méconnaissance est toujours là cependant.
Pour vos petites notes de fin de pages :
* Vous voyez que Ronan dédicace donc... et ne faut-il pas mieux croire quelqu'un sur ce que vous avez connu dans le monde réel plutôt que sur un forum ? Si vous étendiez une telle pratique à tout le monde, vous ne vous entendriez très vite avec plus personne !!
De plus, nous parlons d'un post où Ronan s'énerve, sur les dizaines qu'il a pu poster.
** Vous confondez "impressionner" quelqu'un physiquement et "être insistant physiquement"... rester à côté, sans bouger, croiser le regard... enfin bref, me faites pas croire que vous ne voyez pas la différence.
***Je vous ai ouvert les yeux sur ce qu'un auteur peut parfois ressentir. Ce n'en est pas pour autant une généralité, ni systématique. Par contre, maintenant que vous savez cela, peut-être pourrait vous regarder les choses d'une autre manière, voir, des fois, comprendre les réactions épidermiques de certains auteurs (et pas forcément envers vous d'ailleurs hein !) ou devant le sourire d'autre, comprendre (même si vous le saviez déjà) que vous êtes donc l'un de ces lecteurs que l'on apprécie.
Allez, restons-en là. Je reprends ma cure du monde des réseaux sociaux, j'espère de tout cœur que Ronan commencera la sienne.
Je laisse les bonnes âmes débattrent de la taille, la couleur et la qualité des dédicaces.
Pour les autres, les lecteurs, j'espère vous croiser en dédicaces, l'année prochaine, sûrement à partir de juin, en pleine forme et avec le sourire. Même vous, Egoes, pour échanger civilement sur le thème de la dédicace.
Bien à vous,
Vincent