de BOBetBOBETTE » 19/01/2010 17:59
C'est le bordel chez vous !!!
Faut-il remettre le Mentalist dans l'ordre?
C’est le débat qui secoue les médias depuis quelques jours et je vais y ajouter mon grain de sel : la nouvelle série Mentalist, poids lourd de l’année autant en France qu’aux USA, est diffusée avec succès … mais avec des épisodes dans le désordre ! 1, 5, 7, 4, 14, 3, 9, 8, 2, 11, 10 puis 6…
Loin d’être le seul apanage de TF1, la diffusion de séries dans le désordre a longtemps été un combat (le mot n’est pas trop fort…) qui a maintenant le mérite de se jouer à la vue de tous. Durant des décennies, en effet, c’était dans l’indifférence générale que les séries étaient diffusées dans un ordre qui n’avait rien à voir avec leur diffusion originale. Une chaîne, maintenant défunte, programmait même Star Trek et Mission : Impossible au gré des réceptions des bandes masters ! À ce laisser-aller constant (on ne recherchait même pas l’ordre de diffusion !) s’ajoutait un mépris pour l’œuvre. Il faut reconnaître que la continuité était encore quasi-inexistante dans la grande majorité des séries… mais ce n’est pas une excuse !
Aujourd’hui, la série télé est devenue un enjeu capital pour toutes les chaînes du monde et une passion globale pour les téléspectateurs. Plus question de laisser-aller… mais le mépris continue. Alors, allons un peu plus loin que les évidences et recensons les arguments.
- 1ere constatation : les séries ne sont pas diffusées en France de la même façon que dans les pays anglo-saxons ; là-bas, elles sont produites et écrites en fonction d’une chaîne spécifique, d’une case horaire précise et d’une diffusion hebdomadaire. Par exemple, les séries conçues pour CBS à 21h sont évidemment plus « grand public » que celles de 22h ou que celles produites pour une chaîne câblée. Mais en France, le prime-time est composé d’un seul programme unique et trois épisodes s’enchaînent. D’où des décalages pour un épisode jugé trop violent, qui passera du début à la fin de soirée. D’où aussi une volonté de ne pas aligner trois épisodes avec des kidnappings, par exemple. Alors que l’Américain a une semaine pour souffler, nous n’avons que 25 secondes…
- 2eme constatation : une série a beau être produite en flux tendu (on écrit un épisode alors qu’on en tourne un autre et qu’on en diffuse un troisième), les auteurs savent très bien qu’il y a des périodes-clefs durant la saison (les fameux « sweeps ») où leurs épisodes doivent être plus forts que d’habitude : coups de théâtre, guest-stars de prestige… En France, cela n’a plus de signification !
- 3eme constatation : certaines séries ou certaines saisons nécessitent de respecter un ordre rigoureux, sous peine de ne plus rien y comprendre. Telle la saison 7 des Experts (avec son « tueur à la maquette »), alors que d’habitude les épisodes sont interchangeables. Ce n’est pas moi qui le dit ! Dick Wolf, le créateur de New York District (alias Law & Order), affirme lui-même que la longévité de sa franchise repose également sur cet aspect interchangeable. Evidemment, les séries entièrement « à suivre », comme les Prison Break, Damages ou autres Lost, n’offrent pas cette option : dans l’ordre… ou rien du tout !
Manque de chance, la grande majorité des séries contemporaines sont aussi évolutives. Même si chaque épisode retrace une histoire différente, les personnages évoluent, souvent subtilement, toujours progressivement. Et cela est savamment dosé par les scénaristes. Là, l’argument est imparable.
Face à cela, si on met de côté les obligations de codification déjà citées, il reste le besoin de faire de l’audience, commun à la France comme aux USA. Pour bâtir sa soirée, la chaîne va mettre l’épisode le plus fort en premier, histoire de capter l’attention du spectateur prompt à zapper. Par « épisodes plus forts », on entend les plus attractifs, aux histoires les plus « rentre-dedans »… Bref, les plus racoleurs, les plus faciles, les plus fédérateurs. Les sujets un peu plus subtils ou tendancieux vont être relégués en 2ème ou 3ème position.
La grande question est de savoir lequel de ces deux arguments va être privilégié. La subtilité d’une écriture ou l’efficacité d’une diffusion ? Une chaîne comme TF1 a-t-elle d’ailleurs le choix ? Et quand France 2 ou M6 font suivre un inédit de Cold Case ou de Bones par deux rediffusions d’épisodes plus anciens sans prévenir le spectateur, là aussi, il y a de quoi s’énerver.
Il y a quelques années, j’avais livré ce combat plus concrètement en compagnie de Jean-Marc Morandini. La pétition ainsi lancée avait été un franc succès et le CSA s’était ému de la situation. Le CSA ! Pour des séries américaines ! Je jubilais ! Dans les faits, les choses ont-elles changé ? France 3 enchaîne-t-elle toujours la fin de la saison 10 de NYPD Blue avec le début de la saison 1 ? Un peu que oui ! Mais maintenant (grâce aussi aux magazines télé qui indiquent épisodes et saisons), on repère les mauvais élèves…