Igalma a écrit:J'ai adoré cette BD qui pour moi est sublime. D'abord j'adore les contes et ensuite je suis de culture proche orientale, donc très sensible au thème, la vision de la sexualité correspond malheureusement à ma culture, elle ne m'a donc pas trop choquée (juste provoqué un certain mal être). Je suis touchée par ce noir et blanc qui mêle BD et la beauté de calligraphie arabe, ce mélange entre les 1001 nuits et le réalisme contemporain. L'histoire est très dure et belle à la foi malgré une succession de viols et de cruauté, elle parle d'un amour véritable, inconditionnel entre l'héroïne et l'enfant noir. Ce mélange de glauque et de féérique interpelle sur la dualité de la Création, enfer/paradis qui s'interpénètrent (le harem a la forme d'un paradis et c'est pourtant un prison cruelle, le bidon ville incarne un enfer moderne et pourtant c'est là qu'un pêcheur au grand cœur fait renaître l'espoir en une humanité généreuse. Les propos religieux, mystiques et fantastiques sont très denses, très érudits, ils recèlent une sagesse millénaire mais aussi un ésotérisme qui peut paraître ridicule. Je me suis régalée avec toutes ces anecdotes sacrées qui au passage font des planches merveilleuses.
J'ai lu cette BD il y a quelque temps déjà, au moins 2 ans. je la relirai mais pas de suite hein.
Voila, Igalma, je crois que tu as résumé un peu ce que j'en pense : une splendeur, un chef d'oeuvre.
Pour info, je suis très proche de la culture arabe, non pas par mes racines, mais par mes choix/goûts : danse orientale, calligraphie arabe et apprentissage de l'arabe pendant 1-2 ans (je ne le parle pas mais connais l'écriture, suis capable d'écrire quelques mots, d'en déchiffrer, etc)
Certes, la calligraphie arabe étant très présente dans cet album, cela influence fortement mon ressenti. D'ailleurs, je l'avais apporté ce bouquin lors de mon dernier atelier calligraphie, avec mon maître. Il connaissait cette BD et l'avait. Elle a parcouru pas mal de mains pendant cet atelier.
C'est une splendeur graphique. Et en relisant le sujet en entier ici, le journaliste de France Culture qui critique le côté calligraphie aurait certainement dû se taire ce jour là.
Lorsqu'on connaÎt l'alphabet árabe, c'est un régal aussi.
Après je crois que pas mal de fond m'a échappé quand même, dû à mon manque de connaissance de la signification des textes religieux.
Côté histoire, je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce que beaucoup appelle le traumatisme par rapport au sexe de l'auteur. Je n'ai rien lu d'autre de lui donc, comme d'autres ici, je ne suis pas influencée par le reste de son oeuvre.
Moi j'y ai vu 1) non pas une vision négative de l'Islam, mais plutôt justement la volonté de rendre ses lettres de noblesse aux textes religieux, qui sont surement beaucoup plus philosphiques et sages (même si je suis athée) que ce que les interprétations ont bien voulu en faire (toutes religions confondues, n'oublions pas notre histoire); 2) une condamnation justement du sexe violent, de ce qu'on peut en faire, de la violence faite aux femmes, et non pas d'un traumatisme par rapport à ça.