Drums along the Mohawk (1939) de John Ford
Contrairement à jolan et arcarum, j'ai trouvé le film magnifique.
Tout d'abord, visuellement, le film est une vraie splendeur. Ford sait filmer et son utilisation du Technicolor (une première pour lui) est somptueuse.
Le contexte historique est lui aussi passionnant (d'autant plus qu'il me semble assez peu traité).
Je n'ai pas été heurté comme arcarum par la vision de la colonisation et la place des Indiens. D'une part, ce n'est pas du tout le sujet du film et d'autre part, les Indiens sont surtout instrumentalisés par les Anglais pour servir assez bêtement de chair à canon. Ils ne sont que des ennemis de circonstance.
Longtemps, je suis resté à l'écart du cinéma de John Ford parce que j'avais du mal avec ses portraits de personnages truculents qui m'exaspéraient et me sortaient de ses films, moi qui aurait voulu voir des films plus secs.
Mais mon jugement s'est peu à peu modifié jusqu'à ce qu'aujourd'hui j'apprécie au contraire beaucoup ce pittoresque fordien.
Ces personnages truculents me paraissent d'ailleurs d'autant plus à leur place dans le cas de ce film puisque son coeur thématique est à l'évidence la constitution d'une communauté et des valeurs que ses membres choisissent de partager pour la fonder. Ceci trouvant évidemment son aboutissement avec la scène finale, certes maladroitement appuyée mais qui élargit ces valeurs inclusives à la constitution de la nation américaine dans son entièreté.
Les scènes de vie quotidienne sont dès lors essentielles, celles où l'on voit les personnages interagir. L'aménagement du terrain, l'attente de l'accouchement,... sont autant de moments très réussis qui donnent chair à cette communauté de pionniers qui ne pourra trouver son salut que dans une force de résilience peu commune et une solidarité sans faille.
Les ravages et l'âpreté de la guerre sont aussi magnifiquement traités, ils apparaissent d'autant plus fort qu'ils ne sont le plus souvent montrés que hors champ. Le monologue d'Henry Fonda à son retour du combat est un moment de bravoure en creux exceptionnel, le prêtre qui déclare, effondré, I killed a man, est également, parmi d'autres, un moment très fort.
Au niveau du jeu des acteurs, les seconds rôles sont tous superbes (même si John Carradine est vraiment sous-exploité). Pas vraiment convaincu par Claudette Colbert cependant. J'avoue que je ne l'apprécie guère en général. Ici, j'ai trouvé que son jeu manquait souvent d'un peu de la retenue qui aurait pu donner plus de complexité à son personnage.
Par contre, j'ai trouvé Henry Fonda vraiment très très bon.
Dommage que les Jeux olympiques de 1940 ont été supprimés parce qu'il aurait certainement remporté le marathon haut la main.
Ma note : un bon 4.5/6
Bon sinon, le titre français est une nouvelle fois complètement nul.
Le Mohawk du titre original est le nom d'une rivière et dès lors de la vallée où s'est établie la communauté. Cela renvoie au rapport que les humains entretiennent avec le lieu où ils sont établis.
Sur la piste des Mohawks, ça fait au contraire référence à la tribu indienne des Mohawks. Cela renvoie bêtement à un imaginaire de western classique de confrontation avec des indiens, ce qui n'est pas le propos du film.
"Ca ne résout pas vraiment l'énigme, ça y rajoute simplement un élément délirant qui ne colle pas avec le reste. On commence dans la confusion pour finir dans le mystère."
Denis Johnson - "Arbre de fumée"