de anaxarque » 08/04/2013 08:33
Hum, voici une saga que je n'ai approchée qu'avec d'infinies précautions. Je ne pense pas comme comme l'ami grincheux Alan Moore qu'il est blasphématoire de toucher à ce classique en faisant une préquelle. Pourquoi une telle entreprise serait insultante pour le lectorat ou pour Moore et Gibbons ? Cependant, je ne voyais pas ce que des auteurs, même très confirmés, comme Jae Lee, Bermejo, Cooke, Kubert père et fils, pouvaient apporter de neuf.
Moore a le talent rare de dire beaucoup de choses et de faire des tas d'allusions en peu de place. Les lecteurs attentifs connaissent donc déjà les passés des héros de Watchmen, comme « la grandeur et la chute » des Minutemen qui à l'exception du Hibou ont des choses peu honnêtes à cacher (le juge masqué notamment).
De même, le fait que Roarshash et le second Hibou ont combattu le crime ensemble, l'idée que la détestation entre Ozymandias et le Comédien soit très ancienne et que le Spectre ait eu une adolescence conflictuelle avec sa mère, sont acquis.
Alors, comment faire des récits palpitants avec des choses que l'on sait déjà ?
L’exercice n'a rien d'aisé. Mais au final, les artistes s'en sortent bien. Ce Before Watchmen, n'est pas une mauvaise série de BD, ce n'est pas non plus un chef d’œuvre qui nous apporterait de nouveaux éclairages sur la saga centrale. C'est globalement sympathique. C'est déjà ça.
Jae Lee, par ses dessins réalise un travail somptueux sur la vie et la « transfiguration » d'un Ozymandias prétentieux et illuminé comme à son habitude. Toutefois, Len Wein (le scénariste) ne fait rien d'autre que de reprendre presque mot-à-mot sa « confession » de l'issue 11 de la maxi-série initiale, comme s'il avait peur de toucher au mythe.
Darwyn Cooke nous livre un bon récit avec Minutemen. Ici, il a plus de champ libre et on peut développer des personnages comme Billy Dollar, l'homme insecte ou le Juge Masqué ainsi que des situations, sans déraper sur le livre fondateur.
Pour l'heure, je trouve que le résultat reste de très bonne tenue : il a l'avantage de nous replonger dans cet univers aussi fascinant qu'effrayant, "on l'on s'aimera plus fort, pour y mourrir".
"On Friday night, a comedian died in New York. Someone threw him out a window and when he hit the sidewalk his head was driven up into his stomach. Nobody cares. Nobody cares but me. " Roarshach's Journal, 13/10/1985.