C'est par hasard que je suis tombé sur le volume
Batwoman : Élégie pour une ombre de Panini en furetant dans les rayonnages d'une librairie. L'association du nom des deux auteurs m'a tapé dans l'œil. D'un côté, Greg Rucka, que je connaissais pour
Gotham Central (mais je n'en ai lu qu'une partie pour l'instant) et surtout
Wonder Woman: The Hiketeia qui a été il y a quelques mois le véritable déclic d'une frénésie de lecture de comics, notamment "super-héroïques", domaine que je n'avais qu'assez ponctuellement abordé par le passé, m'aventurant peu au-delà du travail de quelques grands noms comme Alan Moore ou Frank Miller. De l'autre, J.H. Williams III, dont je ne connaissais que son travail sur
Promethea de Moore (justement), travail qui était déjà amplement suffisant pour me rendre absolument fan de ce qu'il fait, ne comptez pas sur moi pour émettre la moindre critique négative.
Je rentre chez moi, je fais un petit tour sur le net pour collecter quelques infos supplémentaires, je lis qu'il s'agit d'une réinvention complète du personnage, et à peu près en quelques termes. Ok, je signe. Je viens donc de passer la soirée à enchaîner la lecture, en V.O., de l'équivalent du volume traduit chez Panini, immédiatement enchaîné avec les
issues publiés à ce jour de la nouvelle série
Batwoman. Vous l'aurez d'ores et déjà compris, j'ai pris mon pied.
Car si ce qui a été traduit dans le volume de Panini se révèle déjà de la très bonne came, laissez-moi vous dire tout de suite que ce qui se publie depuis septembre de l'autre côté de l'Atlantique est encore un ou deux crans au-dessus.
ELEGY (Detective Comics # 854-857)
4 chapitres dans lesquels on découvre la "nouvelle" Batwoman et une blessure fondatrice (à Gotham, c'est un élément qui va avec le costume
). Kate Kane est rousse (option "flamboyante"), lesbienne (option "vie sentimentale difficile à gérer"), juive (option "on a mis ça pour montrer au lectorat qu'on se diversifie, mais en fait ça n'a aucune incidence"), et bosse en tandem avec son papa militaire qui supervise les opérations au QG. Elle affronte une "Religion du Crime" qui veut sa peau suite à une obscure prophétie, compte quelques mutants bien bizarres dans ses rangs, et a à sa tête une toute nouvelle maîtresse de cérémonie bien psychopathe, qui a semble avoir très très mal digéré la lecture d'
Alice au pays des merveilles. Le scénario de Rucka n'a rien d'indigne : même s'il n'est pas forcément des plus marquants (exception faite de la révélation finale et de ses possibles implications), il n'y a pas de temps morts, plusieurs scènes sont très réussies (j'ai particulièrement apprécié la séquence du bal de charité) ; surtout, les deux principaux personnages en présence, Kate/Batwoman et "Mistress Alice", sont immédiatement marquants. Et côté dessin, Williams nous en met déjà plein la vue, avec son goût pour les doubles pages aux constructions complexes, et une alternance de styles graphiques selon qu'il traite des aventures masquées ou de la vie civile de son héroïne ; mais le meilleur est à venir !
GO (Detective Comics # 858-860, également présent dans le volume Panini)
3 chapitres qui font directement suite à la fin dramatique de l'arc
Elegy mais sont essentiellement constitués de flashbacks qui reviennent sur le parcours de Kate avant de devenir Batwoman : sa jeunesse dans une famille de militaires, la perte tragique de sa mère et de sa sœur jumelle, son renvoi de West Point pour homosexualité, sa relation avec l'agent Renée Montoya du Gotham Central, sa (brève) rencontre avec Batman et ses propres débuts d'enquêtrice-justicière. Ce n'est pas
Batman Year One, mais là encore ça se laisse lire sans le moindre déplaisir, c'est bien mené, carré, et ça pose les bases du personnage.
BEYOND A SHADOW (Batwoman # 0)
Il aura fallu quelques années avant que Batwoman nouvelle version repasse devant les projecteurs. Histoire de rafraîchir la mémoire aux lecteurs, la nouvelle série commence donc par une quinzaine de pages qui font un peu "résumé des épisodes précédents", sous la forme d'une enquête que mène Batman pour découvrir l'identité de cette "Batwoman". Exit Greg Rucka, J.H. Williams III reste au dessin mais passe aussi scénario en tandem avec W. Haden Blackman. Pour ce volume #0, mais seulement celui-ci, Williams fait aussi équipe pour le dessin avec Amy Reeder, qui se charge de la partie "vie civile" de Kate. Ce qui, vu la multiplicité des styles graphiques de Williams, ne fait pas une grande différence, il faut le dire.
Sympathique, mais oubliable, surtout eût égard à ce qui suit.
HYDROLOGY (Batwoman # 01-...)
4 chapitres à ce jour, le 5e qui sortira mercredi devrait le conclure. Et il y a de quoi trépigner d'impatience. Si vous avez aimé ce qu'avait fait J.H. Williams III avec Rucka, préparez-vous à vous en prendre encore plus plein les mirettes ! On est jamais aussi bien servi que par soi-même et le dessinateur-maintenant-aussi-scénariste se donne l'occasion de produire quelques-unes de ses plus belles planches, autour d'une histoire de femme fantôme aquatique kidnappeuse d'enfants. Pour autant, l'histoire n'est pas que prétexte à jolis dessins et se révèle beaucoup plus dense qu'
Elegy. Brouillée avec son père suite à la fin de l'affaire "Alice", Kate tente de remonter une équipe en prenant comme
sidekick sa cousine Bette, ex-membre des Teen Titans sous le nom de Flamebird. Elle doit en même temps gérer sa vie sentimentale et sa romance naissante avec une inspectrice de la police de Gotham, Maggie Sawyer... laquelle ne porte pas précisément "Batwoman" dans son cœur. Et pour arranger les choses, le D.E.O. envoie sur place l'agent Cameron Chase (de la série du même nom) avec pour mission d'identifier et de capturer la nouvelle justicière. Tout cela peut sembler partir dans tous les sens mais l'une des forces de cet arc est justement la manière dont tout cela s'imbrique de façon extrêmement efficace et prenante. L'intrigue est complexe sans qu'on s'y perde et la psychologie des personnages n'est pas laissée de côté.
Vivement la suite !