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Art, artisanat ou divertissement ?

Pour discuter de tous les sujets généraux autour de la bande dessinée, des libraires, des éditeurs et des auteurs

Pour vous, la BD est-elle:

un Art?
68
77%
un artisanat?
9
10%
ni l'un, ni l'autre?
11
13%
 
Nombre total de votes : 88

Re:

Messagede aaapoum » 02/12/2007 21:22

Message précédent :
Moi, je voulais voter pour "les deux". Mais il y a pas l'option. c'est un tord. Je voterai bien si elle était disponible.
Salut Xav.
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Re:

Messagede aaapoum » 02/12/2007 21:33

Pour revenir à la bande dessinée ... je ne comprends pas trop pourquoi on évoque l'artisanat ici, dans le sens où l'artisanat produit des objets, et pas des messages. A moins que l'on parle d'éditeurs comme le Drozophile, ou la micro-édition et qu'on se focalise sur la réalisation et la reproduction en série limité des objets, cette considération n'a pour moi que peu de sens.


Xav, pour répondre à cette question, je connais un texte qui m'avais beaucoup aidé. Comme je te vois souvent, je pourrais te le prêter samedi quand tu passeras au magasin. Pour les autres, je ne sais pas si ça vous convaincra, mais plutôt que de le paraphraser je préfère donner les références. Cela s'appelle "la mort de la pensée (critique), c'est de Serge Daney, publiée dans L'exercice à été profitable monsieur
Il explique sa vision, certes contestable, des différences entre Art et Culture (appelée ici artisanat). Encore aujourd'hui, c'est un peu comme ça que je fais la distinction entre les deux. Elle est d'autant plus intéressante dans le débat qui vous oppose qu'elle offre une réflexion qui, sans se priver de l'idée de commerce, n'en fait cependant pas le cœur de la distinction.
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Re:

Messagede Xavier Guilbert » 03/12/2007 10:05

Tiens, sinon, juste histoire de commencer cette semaine, une petite réflexion qui m'est venue.
Par rapport à la bande dessinée, Bart Beaty, dans son récent ouvrage "Unpopular Culture", débute son texte avec l'introduction de deux notions que je trouve très intéressantes dans le contexte de cette discussion. Il s'agit des notions d'autonome et d'hétéronome.
Pour faire simple, autonome, c'est la référence à une décision singulière ("c'est bien, parce que j'ai aimé"), alors que hétéronome, c'est la référence au nombre ("c'est bien, parce que beaucoup de gens ont aimé"). D'un côté, on a le critique et ses avis tranchés, de l'autre, les hit parades et les listes de meilleures ventes.
Et en fait, c'est en explorant ces notions que l'on peut éventuellement faire une différence entre faiseurs et auteurs, entre une démarche tournée vers le commerce et une démarche tournée vers l'expérimentation.

Ceci étant, bien sûr, ces deux orientations ne se substituent pas aux considérations de talent ou au besoin d'avoir quelque chose à dire. Mais elles permettent de toucher un peu plus à ce que peut être l'éventail des approches de la création. (et elles ont en plus l'avantage de se dégager de la perception de l'art, souvent implicitement associé aux arts plastiques, pour englober les autres domaines de création, narrative en particulier)
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Messagede yann gourhant » 03/12/2007 17:49

Disons qu'historiquement, l'opposition se fait plus entre artisan et industriel, entre le fait-main et l'usiné. L'artisan, c'est quelqu'un qui fait chaque pièce un rien différemment (parce que l'humain n'est pas infaillible), mais dans le but d'avoir une production de série quand même.

Ca c'est un débat beaucoup plus tardif. Historiquement, il y a bien eu opposition entre arts libéraux et métiers manuels. Entre Art et artisanat, en d'autres termes. Certaines de tes idées ont été discutées, argumentées ou contredites dans les pages précédentes... Sur ce point, en page 4 (Léonard De Vinci et la cosa mentale).
Ensuite l'artisan que tu cites représente pour moi le degrès zéro de la démarche artistique. Mais d'une part, il n'est pas incompatible avec ma formule (x% d'intention peut être égal à zéro), d'autres part, il est un cas particulier de la démarche artisanale. Maintenant, la reproduction d'un objet est elle un critère pertinent pour distinguer Art et artisanat? Depuis quelques années, on voit apparaître des galeries d'Art qui souhaitent rendre l'Art "accessible" (financièrement, j'entends), et pour ce faire, proposent des oeuvres originales reproduites par l'artiste lui-même. Alors, ces artistes cessent-ils d'être artistes quand ils reproduisent à l'identique leur propres oeuvres? Et que dirent de ceux qui répétent une certaine "recette" (Polock et son dripping, Monet et ses Nymphéas...). Il arrive souvent que l'artiste touche au but qu'il s'était fixé, cesse alors la recherche. Le but de l'artisan étant parfois plus "simple", il est aussi plus "facile" à atteindre.

Mais la notion d'artisan reste liée à celle de l'object qu'il produit -- pour preuve, la définition donnée dans le Dictionnaire de l'Académie Française:

ARTISAN n. m. XVIe siècle, d'abord artizan. Emprunté de l'italien artigiano, « celui qui exerce un art manuel, un métier », dérivé de arte, « art ».
1. Personne installée à son compte pour exercer un métier manuel. Une échoppe, un atelier d'artisan. Un petit artisan. Un artisan habile, ingénieux. Un maître artisan, artisan justifiant d'une qualification professionnelle règlementée ou coutumière. Travail d'artisan, travail mettant en œuvre une habileté professionnelle. Prov. À l'œuvre, on connaît l'artisan, on connaît la valeur d'un homme à ce qu'il fait.

Là encore, je ne vois pas en quoi cette définition exclue ma défintion. Et puis on voit bien que la définition dérive de l'art, ce qui prouve encore que la racine historique et/ou la démarche intelectuelle est très liée. Les défintions de l'artiste ont aussi pour racine "ars", le terme latin désignant habileté, métier, connaissance techniques... A l'origine, c'est la même chose. C'est à la suite qu'une distinction (pas assez solide, à mon sens) est apparue (cf. page 4, encore).


Par rapport à la bande dessinée, Bart Beaty, dans son récent ouvrage "Unpopular Culture", débute son texte avec l'introduction de deux notions que je trouve très intéressantes dans le contexte de cette discussion. Il s'agit des notions d'autonome et d'hétéronome.
Pour faire simple, autonome, c'est la référence à une décision singulière ("c'est bien, parce que j'ai aimé"), alors que hétéronome, c'est la référence au nombre ("c'est bien, parce que beaucoup de gens ont aimé"). D'un côté, on a le critique et ses avis tranchés, de l'autre, les hit parades et les listes de meilleures ventes.

C'est intéressant, ça. Il faudrait que je lise ce bouquin. Je ne sais pas si ça apporte des éléments de réponse à notre discution, mais ça explique peut-être comment naissent les consensus autour de tel ou tel artiste.
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Messagede Xavier Guilbert » 03/12/2007 18:32

C'est intéressant, ça. Il faudrait que je lise ce bouquin. Je ne sais pas si ça apporte des éléments de réponse à notre discution, mais ça explique peut-être comment naissent les consensus autour de tel ou tel artiste.


Bon, désolé d'avoir pris un peu le train en marche, d'où certaines redites.
Ceci étant, en relisant (rapidement) l'ensemble de la discussion, j'ai l'impression que le problème principal vient d'un choix de mots, qui conditionne un peu (par rapport à la bande dessinée) le discours qui a suivi: le choix de parler d'artiste, plutôt que d'auteur. Le premier met l'accent sur le dessin, et débouche aussitôt sur des considérations plastiques liées à l'histoire de l'Art (qui est souvent trop rapidement réduite à l'histoire de la peinture), alors que le second le place plus au sein des littératures.

Pour revenir à ta question de départ -- il faut voir aussi que la réponse donnée par les auteurs se trouve aussi au sein d'une pression sociale qui, en France du moins, regarde d'un air un peu méfiant toute personne qui se mettrait par trop en avant. Intellectualisme est souvent associé avec élitisme, avec une connotation négative.
Donc il faut être particulièrement sûr de soi, ou évoluer dans un contexte où la revendication et la contestation est acceptée (cf. les années 70 avec Métal Hurlant ou l'Echo des Savanes), pour oser s'affirmer comme artiste. Artisan, c'est plus simple, c'est moins prétentieux.

Ce que je n'arrive pas à comprendre en ayant lu, il est vrai, un peu rapidement l'ensemble, c'est quelle est véritablement la question que tu te poses: une question d'ordre général, ou appliquée à la bande dessinée? une question de perception du lecteur, ou de l'auteur? ou encore une question de savoir comment la postérité/la critique/le public fait le tri entre les deux positions?
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Messagede yann gourhant » 04/12/2007 00:04

Bon, désolé d'avoir pris un peu le train en marche, d'où certaines redites.

Pas de soucis. C'est vrai que c'est dense :wink:.

le choix de parler d'artiste, plutôt que d'auteur. Le premier met l'accent sur le dessin, et débouche aussitôt sur des considérations plastiques liées à l'histoire de l'Art (qui est souvent trop rapidement réduite à l'histoire de la peinture), alors que le second le place plus au sein des littératures.

Je ne suis pas tout-à-fait d'accord. Un dessinateur est aussi auteur. En fait, dans le cas particulier de la bande dessinée, j'ai tendance à penser qu'artiste est synonyme d'auteur. Il y a discours explicite. Le dessin participe pleinement de la narration.
Si l'on a cité la peinture essentiellement, c'est peut-être que cet art est particulièrement proche de la bande dessinée. Bien sûr, on pourrait aussi parler de cinéma, de littérature écrite, de théatre... Du moment que cela apporte de l'eau au moulin.


quelle est véritablement la question que tu te poses: une question d'ordre général, ou appliquée à la bande dessinée? une question de perception du lecteur, ou de l'auteur? ou encore une question de savoir comment la postérité/la critique/le public fait le tri entre les deux positions?

Tout ça à la fois!
Ma question est partie de la réflexion de plusieurs auteurs que j'ai pu entendre. Mais elle va plus loin que la bande dessinée. Si l'on admet que la BD est un art (et c'est mon cas), alors le discours qui tend à distinguer art et artisanat s'applique aussi à la bande dessinée. Donc, si l'on répond à la question d'ordre général, on répond aussi à la question appliquée à la bande dessinée...
Ensuite, toutes les perceptions, et tous les avis m'intéressent.
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Messagede D H T » 04/12/2007 09:19

#N/A
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Messagede Xavier Guilbert » 05/12/2007 15:04

La question se définit à mon avis selon les objectifs:
- est-ce qu'on veut faire un truc personnel tout seul dans son coin pour le montrer ensuite quelle que soit la réaction du public (et tant pis si ça déplaît, l'important est que ce soit sincère)?


Il me semble qu'une chose a été oubliée dans les discussions sur "l'art incompréhensible".
On a beaucoup évoqué la démarche de l'auteur, et ce qu'elle pouvait apporter. Mais on a aussi complètement passé sous silence la démarche du receveur (spectateur/lecteur), qui est aussi importante et qui est celle qui, au final, fait sens.
L'état d'esprit du receveur est absolument central à la perception de l'oeuvre. L'idée que l'on a de l'art, son humeur au moment de la découverte, la manière dont on y est exposé, son expérience, tout cela est différent et nous est propre -- ce qui fait que l'on ne recevra pas l'oeuvre de la même façon.

Le problème du "nivellement par le bas" de la culture (en passant justement de la notion d'art à celle de culture, et l'idée que tout a de la valeur -- ce qui devient rapidement "tout se vaut"), c'est justement qu'il réclame ou implique une démarche aisée/facilitée de la part du receveur. Qu'un truc soit un peu trop ardu à découvrir, et il est aussitôt taxé d'élitiste.
On retrouve cette tendance dans la stratégie des "best of" (plus rapide que de devoir se taper l'ensemble de l'oeuvre et de faire soi-même le tri), des listes des indispensables de l'année et autres sélections plus ou moins douteuses.
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