J’avais beaucoup aimé la série originale.
Pourtant, le projet n’avait rien pour me plaire.
J’en ai soupé du zombie qui envahit le monde et des destins de quelques survivants qui s’entretuent au lieu de s’entraider ! Depuis Romero, Kirkman, en passant par les zombies parodies comme Shawn of the Dead et l’hilarant guide de Brooks sur la survie au temps de zombies et les nanars démentiels comme Zombie Strippers, je pensais avoir fait le tour de la question. A l’annonce de la sortie de cette série chez Soleil, je haussais les épaules d’ennui… Peru me fit ravaler mes certitudes.
Zombies offre –le dessin magnifique de Cholet y participe pour beaucoup- une vision solide de la fin des mondes causées par des morts-vivants. C’est autre chose que le film ( ?) World War Z…
Zombies, la série mère présentait des personnages charismatiques, passionnants, ambigus, parfois héroïques, parfais lâches, toujours moralement troubles, des intrigues complexes.
Peru s’ancrait dans le réalisme, il parlait des problèmes concrets en cas de catastrophe zombiesque (le ravitaillement en eau et en vivres, la question de savoir qui va diriger le groupe, et les tensions que cela va susciter), les affrontements contre ces fichus cannibales sont plausibles (on ne voit pas de guerrier « machine à tuer » qui zigouille 450 zombies en deux minutes avant de se faire tuer comme un abruti par un zombie qui avait évité les balles).
On atteignait, avec ce cycle inaugural de quatre volumes la perfection.
Nechronologies est une série dérivée qui présente les réactions face à l’épidémie, dans d’autres zones géographiques que l’Amérique du Nord. Peru commence par la France, avec les Misérables….
Globalement, j’ai adoré l’album, même si je préfère le dessin de Cholet à celui très dynamique de Pétrimaux.
Charles, ce garde du corps présidentiel vétéran est très crédible et très touchant. Il se pose des questions sur la vie qu’il a mené jusqu’à l’invasion, sur la moralité des actes qu’il a perpétré pour des « patrons » douteux, bref, il comprend que sa vie ne fut pas heureuse et remplie d’un but noble. Mais, il a encore le temps de faire quelque chose de bien.
Ce qui me gêne, c’est l’utilisation en « guest-star » de l’actuel président.
Comme l’écrit Cygu
« non pas que je sois fan de notre président mais je trouve un peu abusé de le "massacré" comme ça et de le faire passer pour un assassin alors que personne ne sait quelles seraient ses propres réactions et encore moins celle de hollande dans un contexte pareil
qui dit qu'il ne se sacrifierait pas ?? ».
Charles dresse un portrait terrible de Mitterrand, de Chirac et de Sarkozy, il pensait que Hollande ne « sera pas pire qu’un autre », mais pas mieux non plus. Jusqu’à l’invasion.
Si on résume, les hommes politiques français seraient tous, suivant Peru, enfin d’après Charles qui est son interprète, mais j’ai du mal à concevoir que Peru ne pense pas la même chose que son héros : veules, voleurs, menteurs, cyniques, tricheurs, abrutis, dépravés, assassins, etc.
Au-delà de la lâcheté que Peru prête à Hollande, ce discours politique flirte avec le populisme. On sait ce que cela donne. Ces partis que je ne nommerais pas, si par malheur ils parviennent au pouvoir, sont encore plus incapables que les autres pour gérer les situations de crise et les affaires courantes. Vous me direz que Peru, à lire cette BD semble être plutôt un anar’ de gauche, qu'un populiste. Il peut penser ce qu'il veut, cela ne me dérange pas.
Il est évident qu’un scénariste de BD puisse s’impliquer et donner son avis sur la chose publique. Hergé le faisait déjà. Moore régla ses comptes avec Mme. Tatcher dans V for Vendetta, Miller nous assène sa pensée anarcho-droitière depuis Batman DKR, cela ne me choque pas.
Le lecteur est assez intelligent, je pense, pour discerner les idéologies, y adhérer ou pas, et faire le tri entre la pensée de l’auteur qu’on peut ne pas apprécier et son œuvre qu’on aimera malgré sa vision du monde.
Mais, au vu de la popularité actuelle d’Hollande, on en vient à se demander si sa présence dans cette BD ne constitue pas un simple et obscène coup de communication de Soleil, voué à booster les ventes, faire le buzz, choquer ou rire le chaland, et faire causer- comme je le fais moi-aussi - sur la toile…
Et puis, descendre à ce point Hollande (même si là François descend aussi les autres…), en faire un être aussi détestable et grotesque, ne revient-il pas à tirer au bazooka sur un corbillard tiré par deux vieux canassons rachitiques ?
Sincèrement, je pense que la BD aurait été pareillement réussie sans la présence du vrai Président. Par contre, il serait intolérable que l'on cherche à interdire cette BD parce que l'on se fout du Président. Les droits, pour un citoyen et à foriori pour l'artiste, à la caricature et au blasphème, au mauvais goût, à la mauvaise foi, au matraquage sauvage et sans pitié, sont sacrés.
Mais, je le redis, cette BD, cette reserve à part, est une nouvelle réussite de Peru et elle n'a pas à rougir d'être placée sur la même étagère que les quatre premiers volumes.