Et le monde me semble clore le débat sur les salaires chez Total (je n'avais pas fait gaffe que ce débat avait été initié par Total, un beau contre-feu
)
Vous êtes beaucoup à nous poser cette question sur les salaires. C’est, en effet, la stratégie de communication choisie par TotalEnergies dès ce week-end : lancer que ces raffineurs gagnent « 5 000 euros ». De nombreux journalistes, dont notre équipe des Décodeurs, ont travaillé sur le sujet pour essayer de répondre à vos interrogations. Leur papier sera publié dans quelques minutes.
C’est une question compliquée. D’abord parce qu’on ne sait pas trop ce que comprennent ces 5 000 euros : on mélange du salaire, de l’intéressement, des primes ? Voilà les données qu’a pu nous donner l’Ufipem, l’Union française des industries pétrolières énergies, mobilités, qui représente donc la branche professionnelle du pétrole : le salaire de base d’un salarié en début de carrière dans une société de raffinage est proche de 2 200 euros brut par mois, auxquels s’ajoute une prime de quart d’environ 540 euros. Soit 2 740 euros brut par mois en début de carrière.
Pour un salarié ayant près de vingt ans d’ancienneté, le salaire de base se situe à environ 3 600 euros brut, auxquels il faut ajouter près de 1 200 euros de primes (dont la prime de quart et d’ancienneté, à 1 % par année d’ancienneté). Soit un salaire brut mensuel de 4 800 euros après vingt ans de carrière. Les 5 000 euros mensuels avancés par TotalEnergies semblent ainsi bien plus proches du salaire d’un opérateur de raffinerie très expérimenté que de celui d’un salarié moyen.
Mais, au-delà des chiffres, ce « débat » sur les salaires pose des questions politiques et même morales : on parle de salariés qui travaillent en équipe, donc tournent aux 3 × 8, travaillent de nuit, le week-end, dans des conditions dangereuses, et à qui on demande technicité et expertise, le tout dans un groupe qui fait des bénéfices astronomiques. Y a-t-il dans ce cas un niveau juste de salaires ? Et au-delà : y a-t-il un niveau de salaire au-delà duquel on estime qu’un salarié n’est pas fondé à lutter pour son pouvoir d’achat ? « A ce jour, notre force de travail en 2022 est moins payée qu’en 2021, et on devrait accepter cela ? », interroge un salarié.