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La traduction des comics

Toute la bande dessinée étrangère, et notamment les comics et les mangas

Re: La traduction des comics

Messagede Tibo! » 05/09/2014 19:26

Message précédent :
J'ai pas suivis toutes les affaires, mais l'inversion du 9/11, la rue de la morgue c'est disqualification directe :D :D (Et ça ne relève pas vraiment de choix)
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Re: La traduction des comics

Messagede Jimbolaine » 05/09/2014 19:49

Tibo! a écrit:J'ai pas suivis toutes les affaires, mais l'inversion du 9/11, la rue de la morgue c'est disqualification directe :D :D (Et ça ne relève pas vraiment de choix)



Oui, mais ça, c'est de la vraie erreur. Le coup de "la rue de la Morgue", de mémoire, il me semble que c'est Geneviève. Le coup du "9/11", j'en jurerais pas. Mais quoi qu'il en soit, ce sont de vraies erreurs et là, effectivement, on peut argumenter solidement.

En revanche, quelqu'un a eu le bon goût, sur un trède voisin, de renvoyer à une chronique que j'avais déjà lue, et qui m'avait passablement énervé aussi. Je remercie cette personne de l'avoir fait, on va pouvoir parler clair. L'auteur de la chronique ne connaît pas "calamitas", et donc, fort de cette méconnaissance, il affirme que "calamitas", c'est pas bien. Il fait la liste des "expressions imaginaires, exclamations enfantines et insultes surannées" qui lui déplaisent, et il en tire un argument spécieux pour affirmer que le boulot est fait de travers.
Mieux, il se vautre dans le travers de tous les gens qui veulent faire le malin en parlant de traduction : il va comparer quasiment mot à mot avec les bulles américaines, profitant de l'occasion pour doublement se la péter ("regardez, je cause anglais" et "regardez, j'ai les comics VO, moi"). Passons la médiocrité de la manœuvre, et affirmons clairement qu'il ne comprend rien au boulot de traducteur qui est, à bien des égards, un boulot d'adaptateur. Umberto Eco parle d'une négociation perpétuelle (entre le texte de départ et la langue d'arrivée, notamment).

On peut reprocher à cette traduction d'en faire des tonnes, d'en faire trop, mais il n'y a pas un seul bon traducteur sur la place qui n'adapte pas. Un copier-coller du texte d'origine ne donnera qu'une traduction plate. On peut se tromper, voir dans le texte de départ une intention éditoriale, un style, une tonalité qui n'y est pas, mais si on colle trop au texte, on rate des trucs. L'une des qualités des traductions Lug des années 1970 et 1980, c'est justement d'avoir inventé des expressions et des tics de langages à plein de personnages. Et d'être parties en vrille plus souvent qu'à leur tour. Je me souviens de la traduction de l'épisode d'Avengers marquant l'apparition de Vision, dans un Strange Spécial Origines, je sais que le traducteur a rajouté des références à la statue du commandeur dans le mythe de Don Juan, et je dis : pourquoi pas !
Sérieusement, le catalogue de reproches énumérés ici me donnerait presque envie de saluer la volonté de la traductrice de créer une forme.
Et le seul vrai reproche que je ferais concernerait le "connard" proféré par Parker. Et encore, sérieux, c'est si je voulais chercher la petite bête.

On rate une référence à Poe ? Ou à l'actualité ? On confond "physicist" et "physician" ? On traduit "nitrogen" par "nitrogène" ? Allez-y, engueulez-nous, vous aurez raison.
Mais là, sérieux, quoi.




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Re: La traduction des comics

Messagede Oncle Hermes » 05/09/2014 20:12

Jimbo, on est rarement en désaccord sur ce forum, mais là..... :?

Bon, d'abord, très égoïstement - et même méchamment, peut-être, tant pis -, je suis heureux pour ma santé mentale de voir nommer Nicole Duclos au début de ton message, parce que ça confirme la (mauvaise) impression que m'avait laissé la deuxième partie du volume Daredevill/Miller sorti récemment par Panini (rééditant les traductions des anciennes "intégrales"), qui m'avait fait vraiment beaucoup penser à Geneviève Coulomb.

Je suis absolument et sans réserve aucune d'accord sur une chose, c'est que le traducteur n'est pas le seul "responsable", et qu'il est un peu injuste qu'il soit le seul nommé et donc celui sur qui retombe en priorité la vindicte des fans. Là où je commence à m'inscrire en faux, c'est dans la charge que tu mènes en conséquence contre les méchants blogueurs. Parce que franchement, tous les commentaires que j'ai pu lire sur les traductions de Mme Coulomb, que ce soit sur des blogs, sur des forums, ou ailleurs, tous s'en prennent également à la politique éditoriale de Panini et à l'absence (ou l'incompétence) des relectures qui ont laissé passer ça.

Maintenant, au bout d'un moment, à partir d'un certain taux de fautes d'orthographe et de syntaxe (voire d'absence de syntaxe), ça devient aussi un peu facile de tout faire retomber sur les petites mains anonymes. Que des erreurs arrivent parfois entre le fichier immaculé du traducteur et ce qui sort de chez l'imprimeur, je veux bien le croire ; mais quand ça arrive toutes les deux pages, on peut commencer à se poser des questions sur le texte à la source aussi.

Tu apportes des informations intéressantes sur les conditions de travail et les contraintes techniques qu'elles ont pu poser par le passé. Le hic, c'est que les conclusions que tu en tires sont à contre courant de ce qu'on voit chez Geneviève Coulomb.

Il fallait lisser les grossièretés ? Dans ses traductions de Spider-Man, elle en rajoutait à la pelle ! Il faut raccourcir le texte ? Elle le rallongeait souvent ! Faire "djeunz" était un choix imposé ? Mais certaines expressions d'argot qu'elle employait sont incompréhensibles même pour ma mère tellement elles remontent à loin (et ma mère est née sous un bombardement de la Seconde Guerre Mondiale :? ).

Et les attaques contre les commentateurs idiots qui ne comprennent pas l'argot et qui n'ont qu'à ouvrir leur dictionnaire, c'est un argument qui me semble aussi avoir des limites : je ne suis pas du métier, mais en tant que lecteur, si d'un côté j'ai un texte original qu'un gamin anglais de 10 ans peut comprendre sans problème, et que de l'autre il faut que je sorte un dico pour décrypter le traduction, je me dis qu'il y a tout de même un problème de rendu.

Maintenant, le gros dossier : la différence que tu as déjà évoqué ailleurs entre les "choix de traduction" revendiqués et les "erreurs de traductions" et "conneries", que tout le monde passerait son temps à TOUJOURS, TOU-JOURS, confondre. D'abord, des conneries, Geneviève Coulomb en a accumulé, aussi, et pas que des petites. Celles citées dans ce topic et d'autres (Una, la fiancée morte de Mar-Vell dans un vieil Avengers, qui devient sa "fille", ou encore, dans un autre numéro, la Guêpe qui déclare "J'ai été le Goliath des origines" pour "I was the original Goliath's partner", par exemple).

Prenons le cas du 9/11. C'est dans Civil War (je grasse) : "The fall of mutantkind has passed into history, like the assassination of John F. Kennedy, the moon landing, the fall of the Berlin Wall, 9/11..." qui devient : "La chute de la mutanité est passée à l'histoire, comme l'assassinat de John Kennedy, l'atterrissage sur la lune ou le 9 novembre."

Bon, y a la grosse faute en gras sur laquelle tout le monde sursaute évidemment. Mais ça vient quand précédé de plusieurs choses discutables, non ? Je veux bien passer sur "mutanité" bien que ce soit très moche, et accepter qu'il s'agisse d'un "choix de traduction" (et d'un gain de place par rapport à "la race mutante"), même si c'est le choix d'ignorer la différence de souplesse, pour les néologismes, entre l'anglais et le français. Dans le cadre d'une lecture rapide, admettons aussi que je n'aurais pas forcément tiqué tout de suite sur "est passée à l'histoire", calque et barbarisme combinés qui m'auraient probablement valu d'être fusillé par mon prof de fac (pour "est entrée dans l'histoire"). Et la chute du mur de Berlin qui passe, elle, à la trappe ? Je suppose qu'on peut justifier ça par le manque de place et le travail "à l'ancienne" (à l'ancienne le lettreur ne sait pas écrire plus petit ? bon...). Mais le tout à la suite, avec la référence foirée à la fin en guise de cerise sur la choucroute, ça fait beaucoup.

Maintenant, encore une fois, je ne suis pas du métier, mais juste lecteur. La logique cependant me pousserait à dire qu'un "choix de traduction", ça doit quand même avoir une certaine cohérence avec le texte de départ. La négociation perpétuelle dont parle Eco, il convient quand même qu'elle ne vire pas trop à l'extorsion à la kalachnikov. Si je traduis "To be or not to be" par "J'ai trop les glandes que mémé soit pas régule", je peux toujours brandir que j'ai fait un choix de traduction et que ce n'est pas un contre-sens car c'est en accord avec le sens profond de la pièce, je vais quand même me faire écharper par les amateurs de Shakespeare. Quand Mme Coulomb traduit "Here comes the Spider-Man" par "Glaglatez Navarrais, Maures et Castillans", elle fait preuve d'une belle inventivité que j'apprécierais sans doute chez un auteur original, mais ce n'est pas ce que je demande à un traducteur ici.

Geneviève Coulomb a longtemps été, et demeure même après sa retraite, l'arbre qui a caché la forêt, j'en suis d'accord, raison pour laquelle je pensais, quelques messages plus haut, éviter d'en remettre une couche. Des tas d'autres traductions foireuses sont "passées entre les gouttes" pendant que l'Internet, ce grand méchant, s'acharnait sur elle. Mais elle et quelques autres qui ont la chance de ne pas avoir leurs noms aussi souvent étalés, sont aussi les responsables de la méfiance et de l'hostilité de principe que beaucoup (trop) de fans de comics manifestent face à toute traduction, estampillée Panini voire plus largement, et ce au point d'aller chercher d'abord la faute et ensuite seulement, éventuellement, la justification possible.
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Re: La traduction des comics

Messagede silverfab » 05/09/2014 20:23

:ok: Oh Tonton, hold your horses! (tiens tes chevaux quoi!,) Tu vois Jimbo, tu me l'as fait Glaglaté le Hermès! :D
Retrouvez les chroniques musicales de
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Re: La traduction des comics

Messagede fabienb » 05/09/2014 20:40

Z'êtes durs avec Mme Coulomb, quand même, elle a fait mieux à l'époque que google Traduction :

https://translate.google.fr/#en/fr/The% ... C%209%2F11

:D
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Re: La traduction des comics

Messagede Jimbolaine » 05/09/2014 21:19

Oncle Hermes a écrit:Jimbo, on est rarement en désaccord sur ce forum, mais là..... :?


Ça arrive.

Mais tu soulèves un autre point, sur lequel je voulais revenir, mais je suis allé manger un morceau (ça donne faim, tout ça).
Qui est celui de l'encadrement éditorial.

Je n'ai jamais travaillé pour Panini et mes contacts avec eux ne vont guère plus loin qu'un éventuel café pris avec Jérémy Manesse sur un salon ou mes expériences de lecteur (et sachant que je n'achète plus de Panini depuis deux ans, tu vois que je ne suis pas tellement au fait des choses). Mais mon expérience de lecteur m'amène à penser qu'effectivement, le contrôle éditorial est déficient. Pourtant, d'après ce que je sais (oui oui, j'ai quelques infos, quand même, curieux comme une fouine que je suis…), il y a de la relecture en interne. Donc l'info passe mal, ou alors ils sont pas assez nombreux, ou alors le protocole de relecture a été installé après un flot de remarques (auquel cas internet a du bon, hein…).
En revanche, j'interviens comme relecteur pour deux autres éditeurs de comics, et je peux t'assurer qu'il y a des personnes chez qui le boulot de recherche et de compréhension des références n'est pas fait. Pour mille raisons, qui peuvent aller de l'inexpérience au j'm'enfoutisme en passant par des délais serrés ou une réelle difficulté du texte d'origine. Quand un jeune traducteur dont c'est le premier boulot ne sait pas que "Angola jail", c'est la prison d'Angola (la ville) et non une prison en Angola (le pays), j'ai tendance à être conciliant. Quand quelqu'un de plus chevronné, avec vingt ans dans les bottes, loupe une référence à l'ère du Verseau ou ne connaît pas le système scolaire américain, j'ai tendance à être plus teigneux. Il y a des gens dont le boulot est, selon moi là encore, vraiment mauvais et, en toute honnêteté, franchement pire que celui de Geneviève. Je n'en parlerai pas ici (parce que soit on va me reprocher de faire du name-dropping, soit je vais livrer quelqu'un d'autre à l'acharnement, dans les deux cas, c'est stérile…), mais je m'en suis ouvert aux rédactions, qui savent en général fort bien le peu de cas que je fais de ces boulots (mais ça permet de discuter). Après tout, les rédactions sont les interlocuteurs les plus directement concernés.
Après, des fautes d'orthographe, on en fait TOUS. Des bulles qu'on oublie, des mots qui manquent parce qu'on tape les phrases trop vite, des faux-amis qui ont échappé à notre vigilance, des anglicismes, des citations de films qu'on ne voit pas, des références littéraires, politiques ou sportives qu'on ne comprend pas, ça arrive tout le temps, chez tout le monde et même chez les meilleurs. La différence ? C'est l'encadrement éditorial. C'est une relecture par la rédaction, suivie d'une relecture par un relecteur extérieur, suivi d'une relecture pour checker tous les points soulevés. Il y a beaucoup de bouquins qui seraient parus avec des âneries colossales si certains éditeurs prudents n'avaient pas mis en place des protocoles serrés. Et même avec ça, des bêtises passent entre les mailles. Things happen.
Le boulot de l'éditeur, selon moi, est un boulot de protection : protéger l'œuvre, protéger le lecteur, protéger aussi les prestataires. Protéger, au sens de respecter. Parmi les prestataires, il y a les traducteurs. J'aurais tendance à dire que nous les relecteurs, si on fait bien notre boulot, on évite au traducteur d'avoir des ennuis puisque l'on corrige ses bêtises (s'il y en a… et si on les voit, bien entendu…), et j'ai même la prétention de dire que certains albums ont évité quelques critiques grâce à quelques interventions de ma part (bon, je ne pense pas avoir aidé à vendre plus, mais c'est un autre débat). Or, je l'ai dit, le boulot de traducteur passe par une adaptation, plus ou moins grande. Le premier tort de Geneviève est sans doute d'avoir un peu trop fait sentir sa patte sur son boulot. Mais là encore, et sans vouloir la dédouaner, je me dis qu'un verrouillage en amont et en aval par l'éditeur aurait été pas mal.
Tu soulèves la question de savoir quel est l'état du fichier livré par le traducteur. C'est effectivement la bonne question. Des traductions noires de fautes, j'en ai vu passer (et j'en verrai encore, il suffit d'un coup de surmenage pour que les fautes d'orthographe prolifèrent, et au rythme de 250 comics par an décrit plus haut, on se doute que le surmenage, on connaît). Mais si on peut relire en amont, on en écluse déjà quelques-unes. Je ne sais pas si je suis clair, mais ce que j'essaie de dire, c'est que poser la question de l'état du fichier d'origine, c'est suggérer qu'il n'a pas été correctement "édité" quelque part sur la chaîne de travail.
Et "éditer" une traduction, c'est pas seulement voir si les participes passés ont bien été accordés selon les règles, ce genre de choses. C'est aussi, dans les cas qui nous intéressent, dire à la traductrice qu'elle a loupé une référence à un événement d'actualité, c'est lui expliquer qui est Goliath, c'est lui dire que "girl", dans le cas d'Una, signifie la nana, pas la fille. Ce qui revient à confier la relecture, à un moment ou à un autre, à quelqu'un qui connaît l'univers exploité, et qui est payé pour exercer un regard de geek, pas un regard de grammairien.
Je vais donner un exemple précis que j'ai vécu récemment. Tu sais sans doute que DC sort une série intitulée Secret Origins dont le contenu est composé de flash-back renvoyant aux premiers pas des héros. Souvent, les scénaristes s'amusent à reprendre des scènes déjà racontées et à les compléter. En français, l'éditeur distribue les traductions en fonction de l'emploi du temps des traducteurs, et parfois, les épisodes de Secret Origins ne sont pas traduits par ceux qui ont fait les épisodes de base. Comme ça passe par moi, j'en profite pour vérifier comment c'était traduit dans l'épisode référence, et pour harmoniser (ensuite, j'envoie un petit mail au traducteur de "l'origine secrète" pour l'avertir que j'ai changé deux lignes). Moi, je peux le faire, parce que je connais l'univers, les personnages et le catalogue. Un relecteur qui est un kador en grammaire mais ne connaît pas l'univers ne verra pas ça, et n'interviendra pas, auquel cas on a une même scène traduite de deux manières différentes, et si jamais quelqu'un le voit, il pourrait (à raison selon moi) en tirer grief.
C'est pareil pour les vouvoiements et tutoiements, pour les noms français des objets, tout ça. Récemment, je discutais avec un traducteur qui avait traduit un bidule d'une telle manière, alors que dans d'autres occasions ça avait été traduit autrement. On est tombés d'accord pour adopter la première version, on l'a officialisée, et là on va surveiller le fichier de lettrage afin de vérifier que tout soit raccord.
Je ne dis pas que c'est la panacée qui résout tous les problèmes. Il m'arrive de rater un truc, et de le découvrir en feuilletant le bouquin (et je me frappe le front de manière si sonore que ça réveille le bourg entier). Il m'arrive d'oublier ou de découvrir un détail, mais trop tard. Ou de rater une référence. Voire, pire, d'appliquer une correction à mauvais escient (j'ai le souvenir d'une bavure ou deux du temps de Semic, et c'est de mon fait). Et je sais aussi que des corrections à mauvais escient, tous ceux, sur la chaîne de production, qui sont chargés des corrections et vérifications en ont fait un jour ou l'autre (et là, tu corriges, tu fais une ânerie, mais c'est le traducteur qui se fait engueuler : tranquille, quoi…). Mais si ce n'est pas la panacée, ça aide à filtrer un max de choses.
Il n'y a pas d'organigramme type, ni d'organigramme meilleur que d'autres. Mais les bons organigrammes intègrent l'idée que le traducteur (et le lettreur…) font partie d'une équipe, et que chacun, à un moment, est le premier lecteur de l'autre.

(Purée, quand donc apprendrai-je à faire court ?)


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Re: La traduction des comics

Messagede Jimbolaine » 05/09/2014 21:51

J'en profite pour répondre à quelques points que j'ai vus passer…

Inigo Montoya a écrit:(Et est-ce que les sommes sont les mêmes dans l'autre sens, dans le rare cas d'une bd française traduite par les américains ?)


Comme dit Alex, ça correspond à une petite série américaine. En revanche, je m'aperçois que beaucoup plus de séries franco-belge sont traduites en Amérique que ce que je croyais. De tous ordres et de tous styles, d'ailleurs. Il me semble que c'est Abrams Books qui a traduit Quai d'Orsay, par exemple.

Et tiens, puisqu'on parle de traduction… le titre américain de Quai d'Orsay, c'est… Weapon of Mass Diplomacy.
Personnellement, et sans avoir lu la BD de Lanzac et Blain, je trouve ce titre américain excellent !

Et pour revenir sur les postes budgétaires, l'éditeur qui achète paie une avance de droit (non remboursable) qui correspond au pourcentage du prix de vente hors taxe sur un certain volume de vente. Et s'il dépasse ce volume de vente, il paie le pourcentage sur les exemplaires en plus. L'éditeur qui achète tente de payer une avance moindre (quitte à promettre un pourcentage élevé), mais l'éditeur qui achète demande une avance élevée (quitte à négocier à la baisse le pourcentage).


Edhral a écrit:Moi aussi, je suis une vilaine curieuse. C'est en traduisant 200/250 fascicules US par an alors qu'un traducteur peut gagner sa vie ? Ou un peu moins ? Je me pose la question pour avoir idée du temps qu'il vous reste pour vos projets plus personnels (scénarios, essais, articles dans la presse) : sont-ce week-ends et soirées qui en sont l'objet ou pouvez-vous vous réserver du temps "normal" pour y travailler ?


Soirées, ouais (mais dans mon cas, je m'organise mal, je vais sur des forums pour répondre à des questions à 22h30, tout ça tout ça…).
;)
Week-end, on essaie d'éviter. Mais on n'y arrive pas toujours.

Certains (genre, moi), sont célibataires et peuvent bosser (ou glander) quand ils veulent. D'autres sont des gens sérieux avec femme, enfants, maison, traites à payer et emprunts à rembourser. Ce qui implique beaucoup de taffs mais également un planning serré. Ça fait des vies de dingue, quand même.

Les projets personnels, j'ai un peu mis ça de côté, justement parce que j'ai envie de consacrer mon temps libre… à du temps libre (genre, me balader, aller prendre un café, lire une bd, cueillir mes poires qui commencent à donner dans le jardin et qui sont vachement bonnes, juteuses et pas farineuses…). Mais ouais, des projets personnels, fatalement, c'est soirées et week-end, sur des semaines de 70 heures !!!


Edhral a écrit:(et si Jean-Marc Lainé passe ici sa réponse m'intéresse aussi ;) )


Voilà, j'arrive, j'arrive.
(Je le savais, pourtant, que c'était un traquenard.)


Nikolavitch a écrit:C'était un strip dans le journal, à l'époque où ça a commencé (toute fin des années 20), donc lu par tout le monde, au même titre que les autres succès de l'époque comme Popeye ou les Katzenjämmer Kids(Pim Pam Poum). Qui posent exactement le même problème que Mickey. Ce n'est pas un argot "dur" en soi, mais une oralité des dialogues, des accents, des trucs pas faciles à restituer (dans Pim Pam Poum, en VO, ils ont tous l'accent d'immigrés allemand, et une partie de l'humour du truc est basé là-dessus, et selon le témoignage d'un pote traducteur qui a bossé dessus, c'est un cauchemar) (et Popeye, c'est pas mieux : les mots qu'il ne bouffe pas, il les invente). Le strip humoristique, c'est vraiment particulier.


Il y a de longues années, j'ai travaillé sur une tentative de traduction des Katzenjammer Kids, pour un éditeur qui se piquait d'éditer les strips. La traduction n'était pas de moi, je n'étais chargé que de la reprendre d'une version manuscrite signée par un vieux traducteur, de la mettre sur fichier informatique et de la rendre un peu nerveuse si besoin était mais sans trop y toucher. Comme c'était du boulot conséquent, avec grosse pagination, lettrage de folie, nettoyage interminable, bref, un gouffre, l'éditeur s'est mis en tête de demander une subvention. Quand on demande une subvention pour une traduction de BD, on monte un dossier pour expliquer pourquoi la BD est importante, on montre des pages et on envoie la traduction.
Les Katzenjammer Kids, tout le monde connaît, c'est trois garnements qui font rien qu'à embêter les adultes, ces derniers s'exprimant dans des jargons pas possibles mâtinés d'allemand et autres curiosités. Il y a un Indien qui parle dans un sabir comparable (vaguement) à du "petit nègre". J'en cause donc à l'ami traducteur en lui faisant remarquer que l'ancienne traduction gommait complètement cet aspect langagier. Il me répond alors que d'une part il comptait capitaliser sur la présence du traducteur en question, reconnu par ses pairs (son nom m'échappe complètement mais grosso modo, fallait pas trop toucher à sa version…), et que d'autre part restituer les accents germaniques et autres pourrait de nos jours passer pour des traces de racisme. Donc, on garde la version "plate", ce qui m'emmerdait profondément, parce que ce qui me faisait rire, dans les Katzenjammer Kids, c'est chustement l'aggzent chermanique des berzonnaches. Entre autres choses, mais c'est une source de rire incroyable.
Voilà donc le dossier qui part à la commission d'attribution du pogn… des subventions. Et après quelques semaines d'attente, le verdict tombe : la commission n'accordera pas de subvention à une édition qui fait l'impasse sur le caractère historique de la bande, caractère historique notamment matérialisé par la présence de personnages à l'accent européen marqué animés par l'auteur en direction de lecteurs eux-mêmes provenant d'Allemagne, Autriche et autre. En gros, gommer les accents dans la VF revenait à effacer l'identité culturelle et linguistique de la série et à oublier son contexte de production et de publication. Zou, pas d'argent.

Finalement, le bouquin ne s'est pas fait. Et je soupçonne la commission d'avoir demandé à un expert (je pense savoir lequel, d'ailleurs) un bon prétexte pour pas larguer les sous, mais bon, c'est les règles du jeu.
Donc ouais, les strips, ça propose plusieurs degrés de difficultés : ce qui faisait rire en 1930 ne fait peut-être plus rire aujourd'hui. De même, les outils langagiers et les intentions éditoriales ne sont plus les mêmes. Cependant, on ne peut pas tout gommer. Il faut donc tricher constamment pour obtenir des compromis en direction du texte d'origine mais également du public visé.




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Re: La traduction des comics

Messagede Tibo! » 06/09/2014 07:16

Jimbolaine a écrit:ou ne connaît pas le système scolaire américain, j'ai tendance à être plus teigneux.


Du genre ceux qui en 2014 continuent de traduire college par collège ? :lol:


Sinon vraiment intéressant tes posts ! Merci d'avoir pris le temps de développer et d'expliquer ! (Le genre de topic a mettre en post-it, parfait complètement à tous les amateurs de BD traduites).
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Re: La traduction des comics

Messagede Papy Boingtone » 06/09/2014 07:44

Bravo les gars, sacrés développements... Vous ne savez pas faire court ! :shock: J'en ai mal au crâne... :?

Je déconne !

Pour en revenir à Mme Coulomb, je ne lui excuse rien, même si je me dis que personne ne doit relire ce que font les traducteurs chez Panini... Pour ma part, c'est grâce à elle que je vérifie le nom du traducteur au début d'un bouquin maintenant. Pour ce qui est du jargon employé et que parfois je ne connaissais pas, passe encore, je me dis que cela m'instruit, mais les phrases qui non plus ni queue ni tête, là non, c'est bon ! L'une des intégrales de Wolverine est traduit par cette Mme Coulomb et c'était juste horrible à lire, j'avais comparé avec mes VI Semic de l'époque et la trad' était bien meilleur.

Mais elle n'est pas la seule, la traduction de la dernière intégrale des X-Men est un peu lourde aussi... Et j'ai comparé avec mes Spécial Strange.

Bref, tout ça pour dire que c'est pénible, ça gâche une lecture :grrrr: :no:

J'ai la flemme de ré-ouvrir certaines BDs pour citer des exemples, mais franchement, il y avait des boulettes terribles.

Si quelqu'un de chez Panini me lit, merci de faire des efforts de relecture !!!!!!!!!!!!
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Re: La traduction des comics

Messagede Edhral » 06/09/2014 11:53

Messieurs les Pro, merci : vos réponses sont passionnantes (et merci à Inigo Montoya pour l'ouverture du topic !).

J'ai deux amies qui viennent de finir leurs études de traduction, une autre en activité (pas dans les comics du tout, dans la philo !). J'avais déjà bien réalisé que leur travail était autrement plus complexe que ne peut le penser le lecteur moyen de VO (moi, quoi...), qui se dit souvent "si je comprends, je peux faire une VF". C'est bien confirmé ici : comme tout, c'est un métier avec ces difficultés propres ! ;)
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Re: La traduction des comics

Messagede Jimbolaine » 06/09/2014 11:55

Tibo! a écrit:Merci d'avoir pris le temps de développer et d'expliquer !



Je me dis que sur des points comme ça, ça vaut toujours le coup de prendre son temps pour développer.
(Et puis ça me fait un bon prétexte pour pas bosser, je sais, c'est pas sérieux…)


Papy Boingtone a écrit:Pour en revenir à Mme Coulomb, je ne lui excuse rien, même si je me dis que personne ne doit relire ce que font les traducteurs chez Panini... Pour ma part, c'est grâce à elle que je vérifie le nom du traducteur au début d'un bouquin maintenant.


Je partage le sentiment, dans le sens où d'une part les vraies erreurs peuvent s'expliquer mais ne s'excusent pas (les miennes, je peux les expliquer, mais ça n'excuse en rien mon inattention et/ou ma relecture déficiente), et où d'autre part, comme toi, je regarde le nom du traducteur.
Sauf que ce n'est pas le nom de Geneviève Coulomb qui me fait reposer un bouquin.
Bon, aujourd'hui, je n'achète plus rien chez Panini (et quasiment rien chez les concurrents, je prends presque tout en VO), mais il y a un an ou deux, j'ai commencé à virer certaines VF pour reprendre de la VO (oui, grosso modo, mes news je les prends en VO, mais j'épure aussi mes VF en reprenant des trucs dans la langue d'origine). Les VF, je les donne au fils d'une amie, le gamin est en sixième, il commence l'anglais, donc je ne vais pas lui faire peur avec de la VO. Et moi, je garde mes VO. Et ce sont deux autres noms qui motivent mon tri, mais pas celui de Geneviève.
Après, effectivement, si tout le monde faisait comme moi, les éditeurs fermeraient boutique et des gens comme moi auraient bien moins de boulot. Ah, je suis déchiré par un conflit cornélien, là !!!!
;)


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Re: La traduction des comics

Messagede Jimbolaine » 06/09/2014 12:28

Edhral a écrit:Messieurs les Pro, merci : vos réponses sont passionnantes (et merci à Inigo Montoya pour l'ouverture du topic !).

J'ai deux amies qui viennent de finir leurs études de traduction, une autre en activité (pas dans les comics du tout, dans la philo !). J'avais déjà bien réalisé que leur travail était autrement plus complexe que ne peut le penser le lecteur moyen de VO (moi, quoi...), qui se dit souvent "si je comprends, je peux faire une VF". C'est bien confirmé ici : comme tout, c'est un métier avec ces difficultés propres ! ;)



Entièrement d'accord, et je dirais même que les difficultés sont liées en partie au format. Nous, en BD, nous avons les impératifs de calibrage, par exemple (même si cela s'assouplit avec l'outil informatique). Et j'imagine que selon la qualité du matériel, ça varie aussi pas mal (j'ai des souvenirs de fichiers italiens ou japonais qui n'étaient pas piqués des hannetons*…).
Mais prenons par exemple les traducteurs qui bossent pour les doublages de séries télé. D'après les maigres infos que j'ai sur le sujet pour avoir croisé des gens du métier, ils bossent dans des conditions extrêmes, avec des délais riquiquis, un matériel de référence réduit, bref, le contexte parfait pour aller vite et déraper. Globalement, ça va, mais quand on a l'oreille et qu'on s'intéresse un peu, on voit (pardon, on entend) les âneries.
Je suis par exemple très client des séries Law & Order, surtout de la première, connue en France avec le sous-titre Police Judiciaire. Globalement, c'est plutôt bien traduit, très bien doublé, ça va. Mais régulièrement, j'entends des âneries. Tout récemment, j'ai entendu "quand j'ai lu les nouvelles de Colombia", et là, j'ai bondi. La formulation donne à croire qu'il s'agit d'un bulletin officiel ou d'un journal, intitulé "les nouvelles de…", que l'inspecteur a consulté. Or, il est clair que cela renvoyait à la fusillade de "Columbine" (pas de "Colombia", mais là, soit le traducteur a mal entendu, soit le dialogue d'origine a altéré le nom pour quelque raison juridique que ce soit… soit, pire encore, j'ai mal entendu :) …). Ce n'est pas tant que "Columbine / Colombia" que j'ai réagi, que sur la formulation. Il est évident qu'il fallait écrire un truc du genre "quand j'ai appris pour Colombia", ou "quand j'ai entendu parler de Colombia".
Et je ne compte pas les "Albany" traduits par "Albanie", les "Angola" traduits par "en Angola" et non "à Angola", les "nitrogen" traduits par "nitrogène" et non par "azote", les "Mister Warden" par "Monsieur Warden" et non par "Monsieur le directeur".
La vitesse d'exécution, les délais, la difficulté technique, l'exigence du lipsync, tout cela peut expliquer que des erreurs se glissent dans un boulot fait en mode "premier jet". Ça n'excuse pas, mais ça explique. Après, peut-être que la rédaction d'un document de travail listant l'ensemble des points problématiques (faux-amis, anglicismes…) permettrait de filtrer davantage. Mais ça aussi, ça demande du temps, de la logistique, une veille régulière, et dans les conditions de production, c'est pas toujours simple.

Pour en revenir au sujet du "si je comprends, je peux faire une VF", c'est effectivement pas aussi simple, et c'est un vrai métier. Cependant, je me méfie comme de la peste de l'idée qui consisterait à penser que si l'on a fait des études en langues étrangères appliquées, on peut devenir traducteur. C'est pas aussi simple. Enfin, selon moi. Je pense pour ma part que le traducteur est un auteur (juridiquement, C'EST un auteur), et qu'il écrit, qu'il crée de la forme. Or, les études, en France, ne nous mènent pas vers de la création de forme. Vers de la compréhension de forme, assurément, mais vers de la création de forme, non. Et ce que j'observe en pratique me confirme un peu dans cette opinion. Un peu seulement : la plupart des traducteurs que je fréquente n'ont pas fait d'études linguistiques (certains même ont fait des études très courtes…), et parmi eux se trouvent ceux que j'estime compter parmi les meilleurs. Bon, parmi les meilleurs se trouve aussi un gars qui a fait des études de langue, donc l'exception, la règle, tout ça. Mais parmi les gens que j'estime parmi les plus mauvais se trouve aussi quelqu'un qui a fait des études type LEA. Donc j'en conclus que les études et la profession, ça n'a RIEN à voir.
En revanche, je suis convaincu que ce qui fait un bon traducteur (mais aussi un bon lettreur, un bon dessinateur, un bon écrivain, un bon photographe, un bon quoi que ce soit…), c'est sa capacité à créer, donc en fait à regarder comment ça marche et à appliquer sa sensibilité. Un bon traducteur, c'est un gars (là encore selon moi) qui sait s'écarter du texte pour faire sonner les voix de ses personnages, et qui cherche dans la langue d'arrivée les moyens de signifier ce que l'auteur a dit dans la langue de départ. Qui respecte l'esprit, quitte à trahir la lettre. Bref, qui, dans une certaine proportion, se comporte en écrivain.
Ici, je ferai argument d'autorité en citant Jean-Claude Zylberstein, l'homme derrière les collection "Domaine étranger" et "Grands détectives". Il disait, il y a des années, chez Jean-Luc Hees sur France Inter, qu'il y a deux sortes de traducteurs, ceux qui collent à la lettre et ceux qui collent à l'esprit. Et que, si les deux sont légitimes et obtiennent des résultats de qualité, il préfère travailler avec les seconds. Car pour lui, un texte, c'est essentiellement des émotions et des idées, plus qu'une grammaire ou des effets de style. Bien sûr, cela peut se discuter, et le monde ne se divise pas en deux catégories aussi simplistes, mais ça constitue deux axes de travail (qui peuvent s'avérer parfois complémentaires).
D'une certaine manière, je pense qu'un bon traducteur de BD est avant toute chose un lecteur assidu de BD qui parle anglais, et non un diplômé de fac de langue qui se met à la BD.
Mais ça n'engage que moi.



Jim


* Diable, si Gilles Penso ne connaît pas l'expression, je vais me faire tancer.
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Re: La traduction des comics

Messagede Papy Boingtone » 06/09/2014 12:32

Papy Boingtone a écrit:Pour en revenir à Mme Coulomb, je ne lui excuse rien, même si je me dis que personne ne doit relire ce que font les traducteurs chez Panini... Pour ma part, c'est grâce à elle que je vérifie le nom du traducteur au début d'un bouquin maintenant.


Je partage le sentiment, dans le sens où d'une part les vraies erreurs peuvent s'expliquer mais ne s'excusent pas (les miennes, je peux les expliquer, mais ça n'excuse en rien mon inattention et/ou ma relecture déficiente), et où d'autre part, comme toi, je regarde le nom du traducteur.
Sauf que ce n'est pas le nom de Geneviève Coulomb qui me fait reposer un bouquin.
Bon, aujourd'hui, je n'achète plus rien chez Panini (et quasiment rien chez les concurrents, je prends presque tout en VO), mais il y a un an ou deux, j'ai commencé à virer certaines VF pour reprendre de la VO (oui, grosso modo, mes news je les prends en VO, mais j'épure aussi mes VF en reprenant des trucs dans la langue d'origine). Les VF, je les donne au fils d'une amie, le gamin est en sixième, il commence l'anglais, donc je ne vais pas lui faire peur avec de la VO. Et moi, je garde mes VO. Et ce sont deux autres noms qui motivent mon tri, mais pas celui de Geneviève.
Après, effectivement, si tout le monde faisait comme moi, les éditeurs fermeraient boutique et des gens comme moi auraient bien moins de boulot. Ah, je suis déchiré par un conflit cornélien, là !!!!
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Jim[/quote]

Je n'en suis pas au point de reposer le bouquin, même si ça m'ennuie un peu de me dire que la trad' ne sera peut-être pas terrible...
Et puis je me doute bien que le travail de traducteurs n'est pas forcément simple, à la rigueur, j'en ai plus après Panini. Et malheureusement pour moi, je n'achète pas en VO.

En tout cas merci pour toutes ces explications. :ok:
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Re: La traduction des comics

Messagede Electro » 06/09/2014 12:59

Moi je repose direct un bouquin si je vois son nom, je rachète les Sandman chez Urban uniquement pour ça.

Le pire, c'est que Panini réédite sans aucune correction (ni de traduction, ni de lettrage, rien...), alors un re lecteur faut pas rêver, des vendeurs de papier à la tonne...

Pour GC, je suis désolé Jim, mais tu défend l'indéfendable, c'est traduction sont à l'image de Panini, du je m'en fout je prend mon chèque et basta, ça passe c'est juste des petits illustrés.

Watchmen et le premier tome de Suprême sont de parfait exemple de ses traductions plates et sans saveur, je traduis bulle à bulle je comprends rien mais je m'en fout, je traduis.

Elle a fait grave de mal aux comics VF avec ses trads, remarque elle fait passer pas mal de monde à la VO comme ça.
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Re: La traduction des comics

Messagede Toby Dammit » 06/09/2014 14:26

Merci pour ce topic fort intéressant. Je me dirige de plus en plus vers des éditions en version originale, même si je continue d'acheter les sorties Urban Comics étant donné le beau travail éditorial, maquette, présentation et contextualisation. Je ne pourrais pas en dire autant de Panini Comics, je me suis laissé tenter par le nouveau Marvel Icons de Daredevil par Frank Miller. Autant la présentation est sympathique, l'oeuvre de qualité, autant la traduction n'est franchement pas exemplaire. Du coup, je crois que je vais l'offrir et puis me procurer l'Omnibus en version originale.

Cette constatation me fait réfléchir pour d'autres titres, notamment Sin City du même Miller. Je trouve la réédition récente chez Rackham très belle, mais est-ce que la traduction est réputée de qualité ?
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Re: La traduction des comics

Messagede corbulon » 06/09/2014 15:38

Ben c'est l'épouse de Geoff Darrow qui s'est chargé de la traduction de Sin City, et elle fait plutôt du bon boulot. Bon faut dire qu'Alain David est un très bon superviseur, et du coup je suis assez d'accord avec Jim, sur l'importance de l'encadrement. Parce que contrairement à ce que insinue Oncle Hermès, qui lui s'informe bien mieux que moi, bon à la BFM style (il faut plus taper sur Geneviève Coulomb mais dès que j'ai une occasion je le fais), Nicole Duclos peut faire du bon boulot, je pense notamment à Catwoman : Le Grand Braquage, que j'avais trouvé particulièrement réussi oui.
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Re: La traduction des comics

Messagede corbulon » 06/09/2014 15:47

Et puisque j'en suis à à devoir nuancer des gens si bien informés sur Alan Moore ou sur les stratégies marketing Marvel, je rappellerai quand même que sur Sandman, la plus grosse bévue que j'ai pu lire venait de l'édition Delcourt c'était Mike Hammer à la place de la société de production cinématographique du même nom, et ce n'était pas Geneviève Coulomb. Mais bon voilà c'est Delcourt donc tout va bien, c'est plus facile de tirer sur l'ambulance que sur un char armé. Mais ça on le savait depuis longtemps.
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Re: La traduction des comics

Messagede Jimbolaine » 06/09/2014 18:13

corbulon a écrit:Nicole Duclos peut faire du bon boulot, je pense notamment à Catwoman : Le Grand Braquage, que j'avais trouvé particulièrement réussi oui.



Ah tiens oui, je suis content que tu abordes cet exemple précis, parce que je voulais en parler en répondant à l'Oncle Hermès, et j'ai zappé…

Nicole, j'ai eu l'occasion de travailler très régulièrement avec elle pendant les cinq ans et demi de la période Semic, et en règle générale j'ai trouvé son boulot plus que recommandable. L'exemple du Grand Braquage, pour moi, c'est le souvenir de discussions au téléphone sur des points de détails comme les armes à feu, par exemple (y a une scène où l'arme décrite dans les textes ne correspond pas à l'image et on a décidé de changer un peu le texte pour mieux coller). De même, on a longuement discuté sur les choix à faire concernant la traduction du premier tome de Fables, le nom des personnages, ce genre de choses (dans le cas de personnages venus de chez Andersen ou Grimm, on a parfois plusieurs traductions…). Nicole est quelqu'un qui travaille, qui se pose des questions, qui n'hésite pas à envoyer un coup de fil ou un e-mail quand elle un doute. Et j'ai un souvenir enthousiaste de son boulot sur les Dirty Pair d'Adam Warren, où il lui a fallu trouver des tas d'appellations néologisantes pour coller au travail de l'auteur.
Bref, je n'ai pas de mauvais souvenir de la part de Nicole. Et en tant que simple lecteur, j'aimais bien ses X-Men, elle ajoutait des insultes rigolotes ("petit slip", "bec à foin") et savait tenir la voix de ses personnages sur la durée. Je ne sais pas du tout si c'est elle qui continue sur les mutants, mais en tant que lecteur comme en tant que responsable éditorial, je n'ai guère de reproche à faire. J'ai repéré une ou deux bourdes, mais rien de bien grave.

Une autre traductrice que j'aimerais évoquer, c'est Françoise Effosse-Roche. C'est quelqu'un qui faisait de la trad BD dans les années 1980, et qui a repris quelque part dans les années 2000, ayant passé de longues années à faire autre chose à l'autre bout du monde. Je lui ai longtemps reproché (et encore aujourd'hui) la calamiteuse (calamitas !) traduction d'un Big Book consacré aux Defenders de Busiek et Larsen, où tous les personnages, même les plus hiératiques, causent banlieue. On en a parlé, elle m'a expliqué, je ne suis toujours pas convaincu, et je trouve que ça fait tache. De même, je lui ai trouvé une propension à utiliser des tournures ou des élisions familières souvent mal venues.
Mais Françoise, j'ai repéré son nom dans des Spider-Woman de Claremont et Leialoha traduits dans Nova au début des années 1980. Et c'est plutôt bien foutu, avec un vocabulaire correct, des personnages qui ont une voix, tout ce qu'il faut. De même, j'ai entendu du bien de sa traduction de Scalped (série que je n'ai jamais lue en VF, je crois, à part peut-être une relecture d'album). La conclusion qui me vient à l'esprit, c'est que dans le premier cas il devait y avoir un encadrement éditorial solide (fédéré par la légendaire Claude Vistel), et dans le second cas la possibilité de travailler sur un univers nouveau où la voix reste encore à définir (et pour le coup, Scalped, c'est propice à accueillir des tournures et des élisions familières) et où donc le traducteur peut faire montre de choix plus tranchés, ça se verra moins puisqu'il n'y aura pas de point de comparaison.
Et d'une certaine manière, cela fait partie aussi de l'encadrement éditorial, ça, confier telle ou telle série à tel ou tel traducteur en fonction de ses forces, de ses affinités, de ses goûts, tout ça. Je ne sais pas du tout comment la série lui a été proposée, mais les échos que j'en entends m'incitent à penser qu'elle y fait un bon boulot et que c'est un bon choix.

De là, dernier point, la difficulté de traduire des séries appartenant à un univers partagé connu depuis longtemps. Les lecteurs ont déjà une idée de la voix de Peter Parker, par exemple (contrairement à une série nouvelle). Nous, en tant que lecteurs, on a des a priori sur la façon dont ils s'expriment, ces personnages ancestraux, et il n'est pas impossible que l'on se montre alors plus exigeants sur des points de détail, comme le fait Gilles Penso, parce que justement ces personnages que nous connaissons depuis des années ou des décennies, nous appartiennent d'une certaine manière un petit peu.



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Re: La traduction des comics

Messagede ArvinSloane » 07/09/2014 15:50

perso ça fait longtemps que je voulais me débarrasser d'une vingtaine d'intégrales Panini(les premiéres Spider-Man et X-Men, en gros), pour des raisons de place et parce que je ne lis plus de vf. Comme beaucoup, je me suis tourné vers la vo, avec les Archive Editions, Masterworks et autres Essentials...
J'avais complétement zappé l'affaire Geneviève Coulomb jusqu'à récemment, du coup ça m'a motivé pour descendre mes intégrales de leur étagére(si qqun est interressé, au passage.... mp) et par curiosité je les ai feuilletées.
Je n'ai pas retrouvé les pages et cases incriminées et j'ai rien lu de particulièrement choquant, j'aurais même tendance à dire que dans l'ensemble c'était plutôt correct
Il me paraît même plutôt logique de dater les textes ds le temps, on peut toujours moderniser le language de Spidey, ça ne sera pas pour autant plus accessible aux "djeuns". Spider-Man c'est les années 60 , c'est comme ça. C'est aux "djeuns" de faire l'effort d'aller vers les années 60 et pas l'inverse.
On va pas réécrire les premiers Spirou et Tintin pour attirer les moins de vingt ans...

En revanche, je suis tombé sur un ou deux cas de traduction récente foireuse qui m'ont laissé assez perplexe
Notamment concernant un volume de la dernière série Punisher MAX chez Marvel/Panini
Le punisher qui essaye de s'évader avec l'aide d'un co-détenu(en gros), lui dit au moment de tenter une percée en solo : "Surveille mon dos!"
j'imagine que le texte original était "Watch my back", expression banale qu'on entend dans tous les films où il y du gunfight grosso-modo
Comment on peut traduire "Watch my back" par "Surveille mon dos" ?
plus loin un gardien demande l'ouverture d'une porte de cellule par radio, en anglais je suppose qu'il dit "Open cell door 27" et c'est traduit "Ouvrir cellule porte 27"
franchement, c'est google qui traduit ou quoi?
je suis d'accord avec toi Jimbolaine, ça ne me viendrait même pas à l'esprit de rager contre le traducteur(je n'ai même pas regardé son nom), par contre sur le coup j'avais "la haine" contre Panini.Quelle que soit la raison d'une telle connerie, c'est le boulot de l'éditeur de l'éviter. Et franchement , il me semble que la qualité des trad n'est vraiment pas la priorité chez Panini
A 16 euros le bouquin... c'était le dernier en ce qui me concerne
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Re: La traduction des comics

Messagede fabienb » 07/09/2014 17:12

A tout hasard, pour compléter cet excellent sujet, signalons que Jérémy Manesse, traducteur (mais pas que) chez Panini tenait un chouette blog il y a quelques années.
Certains articles parlaient de son boulot de traducteur sur (entres autres) 100 bullets ou Y the last man.

Les archives sont disponibles en lignes là :
http://www.jeremymanesse.com/article-pe ... 71532.html

Cherchez les articles intitulés "Lost in Translation", c'est passionnant, au moins autant que les interventions de Jim ;)
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Re: La traduction des comics

Messagede fabienb » 08/09/2014 14:25

Pas en BD, mais c'est dans les premiers tomes du Trône de Fer (George R R Martin).
Le traducteur a systématiquement traduit desapointed par désappointé.

Alors, dans le bouquin, tous les personnages sont très désappointés, au lieu simplement d'être très déçus.
Et ça me fait systématiquement "sortir" de ma lecture :D

Rien de grave. Depuis, je me suis mis à la VO.
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