de Oncle Hermes » 23/08/2014 15:14
Serge Lehman poursuit dans son sillon de faire des "comics franco-belges" (La Brigade chimérique, Masqué, L'Homme truqué, bientôt Le Nyctalope) avec le premier tome de cette série uchronique située dans une ville se voulant le symbole de l'internationalisme, dans des années 30 qui n'auraient pas connu la Première Guerre Mondiale.
L'inspecteur Gabriel Faune, "citoyen n°1" de la ville car retrouvé abandonné, bébé, le jour de son inauguration, entretient avec elle un lien confinant au surnaturel. Or, il est persuadé que des changements inexplicables ont lieu dans la ville, qu'il est le seul à remarquer : une statue d'un poilu remplace celle d'un philosophe, un exemplaire des Croix de bois de Dorgelès fait son apparition dans une librairie... Du point des vue des lecteurs, il semble que l'uchronie soit rattrapée par le poids de l'Histoire telle que nous la connaissons. Pour tenter de mettre de l'ordre dans ses idées, Faune, sur les conseils de son mentor (qui n'est autre que Sigmund Freud), écrit son histoire, remontant à l'évènement qui a, selon lui, tout déclenché : un attentat mené par un nationaliste allemand, mais ayant involontairement (?) dévoilé les traces d'un crime plus ancien, littéralement enfoui sous les fondations de la ville...
Comme dans La Brigade chimérique - ou dans La Ligue des Gentlemen Extraordinaires, à qui cette dernière devait déjà beaucoup -, les références à l'Histoire comme à la culture européennes des années 30 sont largement convoquées. Mais la prédominance de la ville qui donne son titre à la série et s'impose comme son véritable personnage principal fait aussi beaucoup penser aux Cités obscures de Schuitten et Peeters. Le scénario ouvre pour l'instant bien des pistes dont il est difficile, à ce stade, de savoir lesquelles seront ou non fructueuses. Le rythme est bon, très prenant. Le dessin de Stéphane De Caneva sert remarquablement tout ça, avec un trait et une mise en page lorgnant beaucoup, justement, du côté des comics, tout en conservant un agréable classicisme. Vivement la suite.