Longue réponse aux réflexions récentes de quelques-uns :
Me pencher par-dessus l'épaule d'Hergé a toujours été mon but.
J'ai pu le faire une fois, en vrai, et Hergé avait prolongé la chose en acceptant de répondre à mes questions.
Il ne pouvait prévoir — moi non plus — ce qui allait nous rapprocher après sa disparition. Les circonstances ont voulu que je me penche à nouveau, par la suite, sur son travail "se faisant", à travers ses archives. Et c'est vrai qu'elles sont éloquentes à ce sujet.
J'ai toujours voulu partager les bonheurs qui me tombaient sous les yeux. La "Chrono" fut une occasion magnifique. Mais qu'on ne se méprenne pas : dans chaque tome cette dimension de création est présente, mais les moyens (les ressources iconographiques) diffèrent. Il est clair qu'il est plus facile de donner à voir le processus créatif des années 60 ou 70 que celui des années 30, 40 ou 50. J'espère ne pas être passé à côté des éléments qui, à toute époque, permettaient de reconstituer ce processus. Par exemple la seule planche (inachevée) du LOTUS qu'Hergé n'a pas mise à l'encre, ce qui aurait fait disparaître le tracé au crayon. Par exemple les croquis d'attitude, utilisés très tôt. Par exemple les tout premiers crayonnés (LUNE !) ou les découpages sommaires (jetés à la poubelle au début) ou les calques (peu conservés eux aussi), un peu plus tard. Les coloriages reproduits dans le tome 6 ne sont pas moins intéressants : on a généralement choisi ceux de la version journal, différents de ceux qu'on connaît par les albums, avec parfois des effets surprenants, des atmosphères différentes. Quant aux crayonnés, si somptueux, si révélateurs, j'ai voulu qu'on leur accorde, dès qu'ils sont apparus, une place de choix.
Cela dit, non, on n'a pas tout montré. La Chrono n'est pas un catalogue raisonné. Il reste des tas d'éléments intéressant à montrer. Ainsi, le tome 7 m'a donné l'occasion de regarder de plus près des découpages pour les BIJOUX (ou pour d'autres épisodes) que je n'avais fait que survoler. J'y ai fait des découvertes. Il en reste à faire. Ceux que j'ai voulu voir reproduits apportent leur lot de surprises, comme des gags auxquels Hergé aura finalement renoncé, ou comme des approches improvisées de gags qu'il cisèlera et enrichira par la suite.
En fait, on aurait pu faire 12 ou 15 tomes aussi "costauds" que les 7 parus. Mais qui aurait suivi cette entreprise démentielle ? Ici, on était parti pour quelque chose comme 4 volumes, et on est arrivé "naturellement" à 7, comme les boules de cristal. J'aime assez bien ça. Et il reste des choses à étudier, à montrer, à partager. Qui vivra verra.
À propos de partage : que ceux qui ne connaissent pas Les Amis de Hergé n'hésitent pas à aller voir leur site
http://www.lesamisdeherge.be Je prends un plaisir énorme à mettre en forme la (de plus en plus) superbe revue semestrielle de l'association, soit en présentant les trouvailles ou contributions des membres ou de nos correspondants réguliers, soit en apportant moi-même des éléments (et des visuels) neufs, sortis de mes cartons.
Avis aussi à ceux que cela intéresse : je dédicacerai le 11 juin de 14 à 17 heures à la Boutique Tintin de Bruxelles, le 16 juin de 16 à +- 18 heures à la librairie Boulevard des Bulles à Paris, et les 20 et 21 août à Saint-Martin de Ré à l'occasion du Festival BD.
Bon vent à tous. Amitiés,
Philippe Goddin