Tu vois, tu l'avoues toi-même, ça fait référence au paragraphe précédent, qui parle... du service de presse.
Dans le principe, je suis plutôt d'accord avec ce que tu dis, et par exemple, ta chronique va plus dans mon sens, car elle repose sur des exemples tirés du livre. Alors que pour celle de aaapoum, non.
Comme Xavier est intervenu pendant mon absence.
je me sens un peu obligé de revenir vite fait. Comme je reviens d'un weekend à l'étranger, je me sens en forme alors je vais bien prendre le temps de m'expliquer.
Je ne cherche pas à convaincre quiconque, mais je peux expliquer certaine choses qui nous séparent. En revanche, je préviens, c'est chiant, théorique .
Le biais critique que j'ai choisi porte un nom. Il s'appelle l'esthétique de la réception. Il consiste à jauger une œuvre à partir de ce qui s'appelle les horizons d'attente (social, culturel, historique...). ceux que ça intéressent peuvent approfondir le sujet grâce au DITL , qui est en ligne et gratuit, et de qualité. Bien qu'incomplet, je le préférè déjà largement à Wikipedia dans le domaine de la littérature.
Cette approche m'a semblé pertinente dans le cas précis car j'abordais un tome deux, l'horizon d'attente était défini par le tome 1.
Cela m'a paru pertinent pour plusieurs raisons, mais principalement parce que l'auteur a elle même choisi de travailler son horizon d'attente au point de la transformer en machine marketing. C'est une démarche connue et étudiée par l'un des suiveurs du concept qui s'appelle Naumann, et la rebaptisé en "prédisposition à la réception". (je vous copie en dessous la définition mais à sauter s'il vous saoule, c'est un peu long et barbare)
Dans le DiTL :
"Pour désigner la corrélation entre les producteurs et les récepteurs, le groupe de Naumann a créé l'expression Rezeptionsvorgabe (prédisposition à la réception). D'après eux, le choix que fait l'auteur d'un certain type de Rezeptionsvorgabe n'est pas une décision exclusivement individuelle ou esthétique, elle est aussi le résultat de conditions sociales et historiques. De même, le choix d'une œuvre par ses lecteurs n'est pas un acte purement subjectif, il résulte des «moyens sociaux de lecture». Cette notion de «moyens sociaux de lecture» comprend aussi bien les attentes du lecteur, résultantes de facteurs intra-littéraires que l'expérience pratique de la vie sociale.
La différence entre cette notion et celle d'horizon d'attente est que selon la conception de Naumann, les instances médiatrices, telles que les librairies, les bibliothèques, les lectures publiques d'écrivains, l'enseignement littéraire dans les écoles, la publicité littéraire de la part des maisons d'éditions, de la presse, des mass-media, tout l'appareil idéologique public ont une importance fondamentale. Dans l'horizon d'attente de Jauss, ces aspects ne sont pas prioritaires pour l'analyse de la réception d'une œuvre.
"
Pour moi, aborder
Fraise et Chocolat par ce biais, c'était rappeler combien l'auteur, soutenu par son éditeur et ami, avait calibré le livre. Combien cette préparation avait eu de répercutions dans la presse, qui insidieusement avait joué le jeu du marketing et de la préparation de l'horizon d'attente.
Je mets en parallèle ce que l'on cherche à nous vendre à grands renforts de marketing, l'angle moral et littéraire revendiqué (Anais Nin et Reiser, sur la couv, dans le livre, dans le service de presse, dans libé, dans le monde, dans Bodoi, sur internet un peu partout) avec la réalité de ce que le livre me semble être.
Effectivement, cela implique une critique du livre en creux, qui passe par un jeu de miroir. Ce que vous n'aimez pas.
Mon angle est incomplet. Vous en pointez d'ailleurs très bien les défauts. Néanmoins, ça demeure bel et bien une critique du livre, et je persiste à lui trouver une certaine pertinence. Mon approche critique, c'est que je ne suis qu'une vision subjective du livre. Je viendrais enrichir ou compléter les autres visions que les gens vont produire dessus. Je ne cherche jamais à dresser un portrait objectif. Je ne saurais pas comment faire, l'objectivité en art n'existant pas. C'est ce que j'ai appris de mes maîtres et ce que j'enseigne désormais à mes élèves.
Alors autant être le plus subjective possible. écrire un commentaire unique et personnel d'un livre, c'est répondre au livre, mais aussi répondre aux autres critiques. Apporter de nouvelles perspectives, pas universelles c'est certains, mais valables lorsqu'elles rencontrent des gens qui veulent réfléchir dessus. Ici, dans ce forum, vous l'avez fait. Certains ont aimé, d'autres ont détesté. Mais ce qui est sûr c'est qu'elle n'a pas laissé indifférent. C'est déjà ça.
Ca ne me dérange pas que l'on apprécie pas ce texte, mais je ne voulais qu'il passe pour gratuit.