Ciné-Club séance 83 Two Weeks in Another Town (Minnelli 62)

[euh... si vous le dites]

Message précédent :
Ah ben, j'allais justement dire que pour débloquer la situation, je voulais bien passer du Ozu au Aldrich.

Allez, si ça vous va, je vous fais un wetransfer.
Rip Blu-ray (petit fichier mais qualité correcte, c'est du 720p) avec sous-titres français ou anglais.


EDIT : voici le lien

[Révéler] Spoiler:

https://transfernow.net/adeeo1059fgw

[Olaf Le Bou]

j'ai réussi hier à choper le Visconti et je viens de le mater.

j'avais volontairement zappé vos critiques pour ne pas me spoiler et je viens de les lire après coup, et je dois dire que je suis foncièrement d'accord avec ce qu'écrit Jolan.
Donc comme beaucoup je n'ai pas été emballé par les mouvements de caméras, mise à part la magnifique scène de la citerne, qui se détache nettement du reste du film. La scène des retrouvailles dans le jardin est belle également, celle de la virée nocturne dans Volterra et chouette aussi. Certains s'interrogent pour savoir si le personnage central est Sandra ou Gianni, mais je me demande si ce n'est pas le palais qui tient le premier rôle. Idéalisé lorsque les deux héros revivent leur enfance, mais sinistre en vérité, empli d'ombres et de recoins, comme autant de traces des drames et passions enfouies qui se sont déroulés là, la déportation du père, la folie de la mère, l'adolescence difficile, les rumeurs d'inceste. Un lieu haï et désiré, à la fois refuge contre le monde extérieur mais portant les stigmates de l'infamie. Ambivalent comme l'est l'héroïne, tiraillée entre passé et futur, Andrew et Gianni, même si le masque renfrogné qu'arbore Claudia Cardinale la plupart du temps est charmant mais pas très expressif au final. Quant à Gianni, ses postures d'ado romantique sont assez agaçantes, surtout qu'il y a plus de veulerie que de charme chez ce jouvenceau pleurnichard autocentré resté coincé à l'âge de 16 ans.
Bref, tout ça est bien morbide, d'un romantisme assez peu touchant, surjoué, et il y a bien trop de flottement dans le scénario pour emporter le morceau.
3/6 pour moi.

[Le Complot]

Ben, Gianni, c'est un "Albatros"...

[jolan]

Séance 1 : The Tarnished Angels (Sirk 1957) = 4.13
Séance 2 : Le Crime de monsieur Lange (Renoir 1936) = 3.6
Séance 3 : Il Sorpasso (Risi 1962) = 4.7
Séance 4 : Rendez-vous de Juillet (Becker 1949) = 2.33
Séance 5 : Vaghe Stelle dell Orsa... Sandra (Visconti 1965) = 3.81

[jolan]

Je propose comme ça vous en faites ce que vous voulez - ça dépendra aussi de qui suggèrera - que dans deux semaines on se fasse un thème "Vieilles Palmes d'Or"

[lobo]

Vous vous arrêtez à la psychologie de Gianni. A mes yeux ce n'est absolument pas ça l'intérêt. Le sujet du film c'est le désir fou de Gianni. Ce désir de ce frère pour sa soeur, qui va bien au-delà de la sexualité, mais qui est ancré dans la sexualité, comme le désir d'Aschenbach pour Tadzio. Et ça, je ne sais pas comment l'exprimer, alors je dis maladroitement que ça ouvre sur un abime métaphysique, mais c'est vraiment ça que je ressens. Ou un décentrage du sujet, que sais-je ? Ca n'est pas une petite étude pyschologique, une petite étude de moeurs, à quoi certain(e)s ici le réduisent. Il y va de la vie et de la mort. Finalement je me découvre viscontien...

[Le Complot]

Vous vous arrêtez à la psychologie de Gianni. A mes yeux ce n'est absolument pas ça l'intérêt. Le sujet du film c'est le désir fou de Gianni. Ce désir de ce frère pour sa soeur, qui va bien au-delà de la sexualité, mais qui est ancré dans la sexualité, comme le désir d'Aschenbach pour Tadzio. Et ça, je ne sais pas comment l'exprimer, alors je dis maladroitement que ça ouvre sur un abime métaphysique, mais c'est vraiment ça que je ressens. Ou un décentrage du sujet, que sais-je ? Ca n'est pas une petite étude pyschologique, une petite étude de moeurs, à quoi certain(e)s ici le réduisent. Il y va de la vie et de la mort. Finalement je me découvre viscontien...

YES !!!!

L'amour et la mort sont intimement liés, alors chez Visconti...

[Olaf Le Bou]

Le sujet du film c'est le désir fou de Gianni. Ce désir de ce frère pour sa soeur, qui va bien au-delà de la sexualité, mais qui est ancré dans la sexualité, comme le désir d'Aschenbach pour Tadzio. Et ça, je ne sais pas comment l'exprimer, alors je dis maladroitement que ça ouvre sur un abime métaphysique

je trouve au contraire que ça manque de profondeur, ou que celle-ci n'est qu'artificielle, desservie par un traitement superficiel des relations entre Gianni et Sandra. Beaucoup de postures de la part de celui-ci et, quand il va jusqu'au bout du rôle de l'amoureux transi qu'il endosse habituellement, il a un dernier sursaut de volonté, il cherche vainement a s'échapper de la prison mentale qu'il s'est construite. et je trouve que Visconti maintient le spectateur à l'écart, en ne levant jamais l'ambiguïté sur la relation incestueuse, en ne dévoilant pas dans quelle mesure Sandra a pu répondre à l'amour de son frère, il nous manque des clés pour comprendre leur comportement.

[Le Complot]

C'est parce qu'il y a toujours chez Visconti une aura funèbre, crépusculaire et très très mystérieuse... Ludwig, autant ne pas en parler, quoi...

[lobo]

A Olaf : Tu persistes dans ton analyse de la psychologie des personnages. Moi c'est pas mon truc et je pense que pour Visconti ce n'est qu'un prétexte, un contenu, pour filmer autre chose. Mais c'est vrai que quand je vois Gianni j'ai constamment en tête Mort à Venise et aussi les personnages incarnés par Helmut Berger.

[lobo]

C'est parce qu'il y a toujours chez Visconti une aura funèbre, crépusculaire et très très mystérieuse...

Toutafé d'accord. Il faut être sensible à cette aura crépusculaire pour apprécier Visconti. Sinon on rabat tout sur le petit jeu des personnages qu'on a toujours beau jeu de critiquer.

[Le Complot]

A Olaf : Tu persistes dans ton analyse de la psychologie des personnages. Moi c'est pas mon truc et je pense que pour Visconti ce n'est qu'un prétexte, un contenu, pour filmer autre chose. Mais c'est vrai que quand je vois Gianni j'ai constamment en tête Mort à Venise et aussi les personnages incarnés par Helmut Berger.

Tu m'étonnes, comment ne pas y penser...

Le signifiant, ce qui précède, ce qui vient avant, existe tellement. Le "moi" aussi, omniprésent...

D'où l'aspect métaphysique...

Il ne faut plus chercher midi à 14h...

[lobo]

C'est marrant entre nous sept cinéphiles on voit déjà se profiler des cinéphilies radicalement différentes.

[Olaf Le Bou]

A Olaf : Tu persistes dans ton analyse de la psychologie des personnages. Moi c'est pas mon truc et je pense que pour Visconti ce n'est qu'un prétexte, un contenu, pour filmer autre chose.

j'essaye simplement de me raccrocher à quelque chose de tangible parce que si le propos c'est juste de filmer un type immature et malheureux en amour en quête de chimères, je trouve ça un peu vain.


Quand vous dites aura crépusculaire, vous voulez dire cette atmosphère de fin d'un monde qui baigne le film ? Avec l'opposition entre la modernité représentée par Andrew et un monde finissant représenté par le palais presque vide, la ville en décomposition, la mère qui perd l'esprit, l'enfance envolée, la position sociale dominante qui s'effiloche…??

[Le Complot]

Entre autres, plus simplement tu as vu la lumière du film ???

[Olaf Le Bou]

Entre autres, plus simplement tu as vu la lumière du film ???

oui, ça commence dans la lumière éclatante du jour pendant leur trajet en bagnole, puis c'est quasiment toujours en intérieur ou de nuit pendant tout le déroulé du film, et on retrouve la lumière lors de la scène finale.

[Le Complot]

Entre autres, plus simplement tu as vu la lumière du film ???

oui, ça commence dans la lumière éclatante du jour pendant leur trajet en bagnole, puis c'est quasiment toujours en intérieur ou de nuit pendant tout le déroulé du film, et on retrouve la lumière lors de la scène finale.

Yes

[Le Complot]

me raccrocher à quelque chose de tangible parce que si le propos c'est juste de filmer un type immature et malheureux en amour en quête de chimères, je trouve ça un peu vain.

On y arrive.

Qu'est-ce qui n'est pas vain dans la vie, à part l'amour ?
C'est parce qu'il est malheureux en amour que sa quête apparaît comme complètement vaine.

[euh... si vous le dites]

C'est parce qu'il y a toujours chez Visconti une aura funèbre, crépusculaire et très très mystérieuse...

Toutafé d'accord. Il faut être sensible à cette aura crépusculaire pour apprécier Visconti. Sinon on rabat tout sur le petit jeu des personnages qu'on a toujours beau jeu de critiquer.

Moi, j'aime beaucoup cette aura crépusculaire telle que la décrit bien Olaf, l'opposition d'une part entre un monde aristocratique en déliquescence et d'autre part la vulgarité d'un monde nouveau représentée par le mari américain.
Mais, au sein de la description crépusculaire du monde finissant, le personnage de Gianni en tant que tel me touche très peu.
La morbidité romantique de Gianni, pour moi, c'est un outil scénaristique parmi d'autres pour mettre en place l'atmosphère déliquescente qui préside dans la grande demeure de Volterra. Je ne lui accorde pas vraiment d'autre valeur.
Je trouve le personnage de la sœur plus riche et intéressant, justement parce que c'est elle qui fait le trait d'union entre les deux mondes et qui porte ce qui est pour moi le thème principal du film. Elle est le personnage pivot du film, celui autour duquel se cristallise la tension entre monde passé et monde nouveau, entre refus d'évoluer et acceptation que la vie nous transforme et que l'on n'est pas nécessairement condamné à rester englué dans le passé (même si cela ne peut se faire qu'au prix de douloureux sacrifices - symbolisés notamment par la perte du frère).
Son personnage est ambivalent mais c'est aussi le seul qui est peut-être capable d'évoluer. Le retour à la lumière lors de la scène finale en est d'ailleurs une belle démonstration.

[Le Complot]

Son film précédent est aussi la description pure d'un monde finissant, j'allais presque évoquer une erreur : "Mais c'est une autre histoire"... Mais enfin, bien sûr que non, puisque c'est la même personne (Visconti), donc c'est la même histoire..
En plus quelle corrélation dans le temps, 2 années séparent le Guépard de ce Sandra.

[Olaf Le Bou]

Qu'est-ce qui n'est pas vain dans la vie, à part l'amour ?
C'est parce qu'il est malheureux en amour que sa quête apparaît comme complètement vaine.

la vie n'a aucun sens, et ce n'est surement pas l'amour qui lui en donnera un
(de toute manière tout ça n'est téléguidé que par des décharges d'acides aminés pilotant des connections synaptiques au service des deux instincts primaires régissant l'ensemble des activités humaines : la reproduction et la conservation).

partant de là, chacun ses moyens pour combler cette vanité existentielle, le tout c'est de ne pas être dupe du caractère éphémère et illusoire de ces palliatifs.